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Déraciné pour apprendre

Par Rugbyrama
  • Georges Mendy international sénégalais, est une terreur en Fédérale 2 avec 15 essais inscrits avec son club. Mais son projet passe avant tout, celui de permettre au rugby sénégalais de se développer.
    Georges Mendy international sénégalais, est une terreur en Fédérale 2 avec 15 essais inscrits avec son club. Mais son projet passe avant tout, celui de permettre au rugby sénégalais de se développer. Photo CAR
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Georges Mendy, le Sénégalais de 23 ans a posé ses valises en Haute-Vienne dans le club de Saint-Yrieix-La-Perche en Fédérale 2. Redoutable joueur sur le terrain, il souhaite profiter de cette expérience sous forme d’apprentissage pour concrétiser son projet : celui d’éducateur de rugby.

Ses amis, sa culture, son pays… Si Georges Mendy a (presque) tout quitté pour venir en France, c’est pour le ballon ovale. Un nouveau cadre de vie qui lui a donné une nouvelle famille. Celle du rugby. Cette passion pour l’ovalie, il la doit à un ami d’enfance.

« Je me souviens bien la première fois que j’ai découvert ce sport. C’était le 17 août 2012 (Georges avait 18 ans), il (son ami) m’a poussé à venir essayer avec lui parce qu’il avait eu des échos positifs. Sans lui, je n’en serais pas là aujourd’hui. »

Pourtant, à l’époque, rien ne prédisposait le jeune Sénégalais à pratiquer le rugby, un sport encore (très) peu développé et connu au Sénégal. « Dans mon pays, la culture et la tradition c’est le football et la lutte. Quand on me parlait de rugby, ça ne me disait rien du tout et quand on m’expliquait les règles je trouvais ça un peu bizarre », se rappelle-t-il. Ce qui ne l’a pas empêché d’essayer… et d’y prendre goût. « à partir de ce jour, je n’ai jamais arrêté. Je vis rugby, je mange rugby, je parle rugby. J’ai ça dans le sang », affirme celui qui a effectué ses débuts au poste de talonneur.
Une vraie réussite puisque le natif de Niaguis (petite ville au sud du Sénégal) honore ses premières sélections en équipe nationale (aussi bien au rugby à VII qu’à XV) quelques mois seulement après ses débuts, au poste de trois-quarts centre cette fois-ci. Le jeune homme se met alors à rêver :

« Je voulais découvrir un autre cadre de vie, et me forger un caractère. »

Guidé par sa volonté de voyager, Georges Mendy est rapidement repéré pour ses qualités rugbystiques. Grâce à des vidéos postées sur internet et relayées par les médias locaux, il se fait détecter en France et atterrit en Gironde, à Saint-André de Cubzac (club de Fédérale 3). Mais malgré un tutorat avec les espoirs de l’UBB, Georges ne garde pourtant pas un souvenir impérissable de sa première expérience en Europe.

« C’était la première fois que je partais aussi loin de chez moi. J’étais jeune et peut-être pas assez préparé et surtout je n’avais pas de projet professionnel défini à côté du rugby pour voir sur le long terme. Je n’avais sûrement pas les capacités suffisantes et la maturité nécessaire pour me projeter vers quelque chose de solide et de concret en France », nous souffle-t-il.

Alors âgé de 20 ans, le jeune rugbyman quitte la France au terme de son contrat et repart au Sénégal où il évolue quelques mois avec les Panthères de Yoff (un club de Dakar). La suite ? Un retour précipité en France, en Haute-Vienne. Mais cette fois-ci avec un « vrai » projet à concrétiser : celui d’éducateur de rugby au Sénégal.

« C’est pour eux la possibilité de progresser rugbystiquement, professionnellement et surtout humainement »

Tout est parti d’un appel téléphonique. Contacté par le club de Saint-Yrieix-La-Perche (Fédérale 2), il participe au projet développé au Sénégal par l’Office Français de l’Immigration et de l’Intégration qui prévoit la venue en France de joueurs de rugby avec un double projet - sportif et d’apprentissage - pour ensuite les faire revenir dans leur pays d’origine et y développer une activité économique. « Le club s’est positionné et m’a proposé un contrat tout en m’aidant à développer mon projet. J’étais excité à l’idée d’être au cœur de cet échange et j’ai sauté sur l’occasion sans la moindre hésitation », se souvient le joueur africain. « C’est pour eux la possibilité de progresser rugbystiquement, professionnellement et surtout humainement », nous détaille Thierry, proche du club haut-viennois et à l’origine de ce « partenariat ». Accompagné d’un autre joueur sénégalais, Georges Mendy se rappelle le jour de son arrivée dans le Limousin, un soir d’hiver 2017.

« Il faisait nuit et il était en train de neiger. On se regardait et on se demandait où nous étions tombés », déclare-t-il, le sourire aux lèvres, avant de poursuivre : « La vie ici est différente, ce ne sont pas les mêmes habitudes, mais ça me plaît et c’est facile de s’intégrer. Les présidents du club m’ont accueilli à bras ouverts et m’ont proposé un petit travail dans la supérette du coin en attendant de passer mes formations. Depuis, je fais partie de la ville et tout le monde me connaît. »

Autrement dit, le pays du kaolin, c’est son nouveau « chez lui ». Côté sportif ? Demandez donc aux équipes adverses… Avec 15 essais depuis le début de la saison, le centre (ou ailier) aux appuis de feu est une terreur sur les terrains de Fédérale. Jouer au niveau supérieur ? « Certainement pas ! J’ai eu des contacts de plus « gros » clubs mais je ne cherche pas spécialement à évoluer en tant que joueur. Je cherche à aller au bout de mon projet professionnel. »



« Je ne me doutais pas
que le rugby pouvait amener autant de choses »

Un dessein qu’il aimerait concrétiser en rentrant au Sénégal. « Je voudrais me servir de mon expérience en France et rentrer partager les valeurs du rugby. J’ai tellement appris, ça serait dommage de ne pas en faire profiter », assure le « magicien » (surnom donné par ses coéquipiers du Rugby Club Pays de Saint-Yrieix). Turbulent à l’adolescence, il reste aussi reconnaissant de tous ceux qui lui ont permis de pratiquer ce sport et de se canaliser.

« Je ne me doutais pas que le rugby pouvait amener autant de choses. C’est l’école de la vie. Je remercie les personnes qui m’ont donné ma chance. »

Un retour à Dakar qui est donc programmé d’ici une dizaine années. « Il y a de grosses capacités au Sénégal et plus généralement en Afrique mais on arrive à un stade où les entraîneurs n’apportent plus rien aux jeunes joueurs. Ils manquent de compétences et ils ne sont pas suffisamment formés. » Un symptôme dont souffre le continent africain depuis de nombreuses décennies. « Ça dépend de tellement de choses. Des décisions économiques mais aussi politiques […]. Si l’argent ne suit pas, j’aimerais au moins que les dirigeants montrent de l’intérêt à notre sport », conclut-il. à court terme, la flèche du Sénégal a une saison à terminer avec le club arédien avant de se préparer pour la Coupe d’Afrique de rugby à XV qu’il disputera au mois de juin en Côte d’Ivoire avec sa sélection.

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