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Nuit noire et page blanche

Par FAURE Léo
  • Ici, ici c'est la Rochelle !
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Publié le
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Cette fois, il y a urgence. En bas à droite de l’écran d’ordinateur, l’horloge indique "01h18". C’est la nuit, la télé ne diffuse plus que des daubes à se pendre et le chat ronfle, au pied du lit, exténué par une folle journée à dormir. En haut à gauche de l’ordinateur, l’intitulé du document de traitement de texte indique fièrement "Sans nom 6". Autant se le dire franchement : les cinq premières tentatives pour écrire cet Edito ont échoué. Nous sommes jeudi depuis cinq quarts d’heure et il faudra que quelque chose sorte de publiable, d’ici à la mi-journée.

Pourtant, le contexte sentait bon. Avant de se lancer dans le concret de l’écriture, on s’était mis un peu de musique, dans les écouteurs. Rien d’apaisant : une playlist à l’appellation annonciatrice, Testostérone. Effectivement, ça envoyait du bois même si, pour les plus biologistes, on notera que quelques chanteuses à fort coffre se mêlaient à l’hormone mâle. En tout cas, ça donnait du rythme à l’imaginaire.

L’idée de base, sobrement couchée dans le document informatique "Sans nom 1", était de consacrer ces lignes aux barrages du Pro D2. Ne riez pas, ça le méritait vraiment. Lavée des anomalies du mécénat qui tuait le suspense dès décembre, notre deuxième division offre depuis trois ans un visage superbe. Cette saison, dix clubs ont joué tout à la fois la qualification et le maintien. Le premier des relégués, Bourg-en-Bresse, fut aussi la plus belle histoire du rugby français 2019. Ces barrages, on y revient, excitent au moins autant que la finale de Challenge qui se jouera ce soir. Mais par où commencer ?

La voilà, l’idée : Vannes, le petit qui joue sa grande première ? Non, en fait. Rien de personnel, j’adore le chouchen. Mais ce serait malhonnête pour Nevers, qui signe la même apparition. Et puis, un texte sur des Bretons qui annonce "un village d’irréductibles Gaulois" dans ses cinq premières lignes sent déjà le faisandé.

Il était 0h31 et le premier Éditorial venait d’échouer. Il avait été écrit une fois, deux fois puis trois, pris par tous les angles mais sans succès. L’idée était bien mais, étirée sur six paragraphes, elle en donnait trois de bons et trois de trop. Poubelle.

Alors, on parle de quoi ? De l’officialisation mardi de Galthié au chevet des Bleus, dans un communiqué qui ne dit rien qu’on ne savait déjà ? De Brunel qui s’exprime enfin pour réaffirmer une autorité que, de fait, il va devoir partager ?

Pas emballé ; avant tout, changer la musique. Lâcher la gratte électrique pour une ambiance plus légère, francophone et à la frontière fragile entre la pop mielleuse et la variété.

C’est parti, deuxième sujet, document "Sans nom 4" : la finale entre Clermont et La Rochelle.

C’est basique, attendu mais finalement pas dénué de sens. En y réfléchissant, il y a bien des choses à dire sur ce match ces clubs qui se ressemblent tant. Sur l’affrontement des hommes, comme les duels Fofana-Doumayrou, Priso-Falgoux, Atonio-Slimani ou Iturria-Gourdon, tous en concurrence pour une place à la Coupe du monde. C’est bien, c’est porteur. Mais ça ne fait pas un Editorial. La preuve par l’échec, à chaque tentative d’écriture. Poubelle.

Il est 0h56 et ça commence à sentir le roussi. Incontestablement, l’événement du week-end, celui qui aurait fait couler l’encre d’un Éditorial en vingt minutes, sera la finale de Champions Cup Leinster-Saracens. Mais le rugby français, malade, n’y est pas invité si ce n’est ses arbitres, nos derniers représentants glorieux à l’international.

Franco-française, elle, la finale de Challenge est un sujet délicat à mener à terme, de façon équilibrée. Quoiqu’il arrive, un Français va gagner. Quoiqu’il arrive, un Français va pleurer. Aucun scénario ne nous réjouit pleinement, aucun parti pris ne se justifie. Quand soudain, dans les écouteurs, Gainsbourg livre la clé de ce duel fratricide :

Amour cruel, Comme un duel,
Dos à dos et sans merci,
Tu as le choix des armes, Ou celui des larmes,
Penses-y*

Merci, Serge, pour le coup de main. Il est 1h37, l’Editorial est écrit. Et le chat ronfle toujours. * Refrain de la chanson Quoi, écrite par Serge Gainsbourg pour Jane Birkin, 1987

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