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Grill : « Cette fois-ci, nous ne laisserons pas dire tout et n'importe quoi »

  • Florian Grill
    Florian Grill La Dépêche du Midi
Publié le Mis à jour
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Florian Grill, président de la Ligue Ile de France a confirmé ce mardi qu'il serait bien le leader de la liste d'opposition face à l'actuel président de la FFR, Bernard Laporte, lors des élections à la présidence de la FFR en 2020. Il pose ici les premières bases d'un projet collectif pour le rugby français et évoque une campagne qui s'annonce longue et probablement tendue.

Quel est votre premier sentiment au fait d'avoir été désigné pour conduire la liste d'opposition à Bernard Laporte ?

Florian Grill : C'est un peu émouvant pour moi parce qu'on est ici dans mon club formateur, le PUC. J'ai forcément une petite pensée pour les bénévoles, les éducateurs et les amis qui m'ont accompagnés. J'ai donc été désigné par un groupe de travail où il y a eu beaucoup d'échanges avec des bénévoles et des anciens internationaux. Je mesure aussi la responsabilité que cela représente, mais ce n'est pas anodin que ce groupe avec de grande figures de ce sport ait désigné un amateur pour porter, avec tous, un projet collectif. Ça a du sens. Le cheminement s'est fait assez naturellement et je l'apprécie.

Quelle est votre motivation ?

F.G. : Le rugby traverse une crise assez inédite. De notre avis à tous, il y a une perte de sens qui se traduit par une baisse massive du nombre de licencié. Et je pense que, dans ce cadre là, notre groupe de travail veut prendre ses responsabilités. On a donc travaillé sur un projet autour de seize chantiers et trois grands axes. Le premier, c'est de revenir à une fédération éthique. Le mot est important. Il y a toute une série de décisions à prendre qui sont détaillées dans le projet et qui sont fondamentales. Nous avons besoin d'une gouvernance qui fonctionne avec des règles qui garantissent et qui permettent la démocratie à tous les échelons, à commencer par le comité directeur de la FFR. Le deuxième axe, c'est la volonté de relancer le rugby autour d'un jeu de mouvement. C'est le passé et l'ADN du rugby français. Les gens doivent retrouver le sourire. On a quelques équipes qui produisent ce jeu-là et ça donne le sourire et ça remplit les stades. Ce rugby de mouvement doit être incarné des écoles de rugby jusqu'aux équipes de France. Et qu'il y ait une cohérence. Et le troisième axe, c'est de relancer le rugby autour d'un tryptique : la passion de la compétition, quelque fois le niveau ; les valeurs éducatives parce que le rugby aident à construire des femmes et des hommes et le troisième axe, c'est l'engagement citoyen.

A quelle genre de combat vous attendez-vous ?

F.G. : En bon rugbymen, nous n'avons pas d'inquiétude majeure avant un match. Nous serons respectueux de la forme, c'est extrêmement important. Nous serons factuels si il y a lieu d'apporter des réponses de ce type. Il y a une nécessaire exemplarité. Et campagne ou non, nous sommes tenus à cette exemplarité vis-à-vis des bénévoles qui essaient tous les jours de faire venir des jeunes au rugby. La manière dont on s'exprimer a forcément un impact.

Pierre Camou n'avait pas souhaité entrer dans cette guerre médiatique il y a trois ans. En avez-vous tiré des leçons ?

Nous avons appris de cette expérience. Nous avons prévu de faire 200 jours de terrains pour rencontrer en moyenne 10 clubs par jours à peu près. L'objectif, c'est de rencontrer 100 % des clubs. Nous avons constitué un réseaux de relais locaux dont le chiffre est monté dernièrement à 290. Ces relais locaux vont organiser notre campagne. Nous allons loger chez les uns et chez les autres. L'objectif, c'est que notre programme soit amendé au jour le jour et à mesure de nos échanges avec les clubs. L'idée, c'est d'occuper davantage le terrain que nous ne l'avions fait il y a trois ans. Et puis, Pierre (Camou) avait cette formule : « je ne dis pas du mal des gens du rugby car ça fait mal au rugby ». Cette fois-ci, nous ne laisserons pas dire tout et n'importe quoi.

Vous attendez-vous à ce que d'autres personnalités vous rejoignent ?

F.G. : Elles seront les bienvenues. Nous avons besoin d'avoir un rugby soudé et nous tendrons la main à toutes les personnes qui souhaiteront accompagner le mouvement. Le rugby ne peut pas se permettre de diviser car nous avons perdu des armées de bénévoles à trop politiser le rugby. Il faut arrêter ça et travailler avec toutes les personnes de bonnes volonté. Arrêtons d'opposer le monde amateur et professionnel. Essayons d'avoir une politique global du rugby et travaillons en bonne intelligence avec tous les acteurs du rugby.

Vous allez participé à partir de ce jeudi au congrès de la FFR à Nantes où pour la première fois vous serez étiqueté « tête de liste » de l'opposition. Comment appréhendez-vous ce rendez-vous ?

F.G. : Je me sens comme le porte parole d'un groupe de travail, extrêmement solidaire, mais qui a créé sa solidarité dans la confrontation. Tout ne s'est pas fait sans heurts. Comme l'ont dit Jean-Marc (Lhermet) ou Serge (Blanco), nous avons vivement débattu et nous sommes parvenus à un consensus. Ça a de la gueule quand même, non ? Je suis bluffé que des grands internationaux comme Serge (Blanco), Fabien (Pelous), Jean-Claude (Skréla) aient su dire « on va se mettre derrière un mec issu du monde amateur ». Mais ce congrès, nous ne voulons pas le rendre différent. Nous déroulons notre projet. Nous avons nos 16 chantiers qui sont diffusés à partir d'aujourd'hui sur Ovale-ensemble.fr. Peut-être que des clubs vont commencer à aller voir. Mais j'ai envie d'échanger avec les clubs, de les écouter. Le rugby, ce n'est pas le combat de coqs permanent. Ce qui m'intéresse, c'est la réaction des clubs à ce qu'on leur propose, comment ils vont nous demander d'amender ces propositions. Peut-être vont-ils nous nous dire que nous avons oublié des choses ? Nous avons devant nous un an de rendez-vous avec les clubs. Le congrès n'est donc qu'un passage, je n'en fais pas un objectif absolu.

Quels sont pour vous les enjeux de ce congrès de Nantes ?

F.G. : C'est d'abord une inquiétude financière liée à plusieurs facteurs : augmentation de la prime d'assurance de la GMF de 44 % en deux ans, perte d'un partenaire majeur (BMW), la baisse des affluences dans les stades. Et ensuite en raison d'une présentation extrêmement sommaire et qui ne permets pas en comité directeur de suffisamment rentrer dans les détails. C'est très difficile de se faire un véritable avis. Dans ce budget, il y a de grands agrégats par direction, mais rien de précis. Un exemple : je ne suis pas capable aujourd'hui de dire quelle est l'augmentation réelle de la masse salariale à la FFR depuis l'arrivée de la nouvelle gouvernance. Je l'estime entre 20 et 30 %, mais c'est difficile à chiffrer car c'est noyé au milieu des différentes directions qui composent la FFR. J'ai donc une forme d'inquiétude sans être capable de la qualifier précisément parce que la présentation du budget qui est faite est bien trop sommaire et pas au niveau d'une entreprise de cette taille-là. De mon point de vue, c'est soit une volonté de cacher certains éléments ou un problème de compétence, mais je ne crois pas à cette dernière hypothèse. C'est pourquoi j'appellerai à ne pas voter le budget car je considère que je n'ai pas les éléments nécessaires pour le faire.

Quels sont les autres enjeux de ce congrès de Nantes ?

F.G. : Pour nous, c'est d'aller à la rencontre des clubs. La création de ces immenses ligues qui s'est traduit par la suppression des comités territoriaux, la perte d'une nombre hallucinant de bénévoles, une perte de proximité avec les clubs. J'évoque toujours cet exemple de la ligue Aquitaine où six comités territoriaux ont été supprimés, ce qui s'est matérialisé par la perte de 200 bénévoles. Avec ces ligues, nous avons perdu du lien. Et comme il y a une gouvernance qui divise, une gouvernance clanique, on s'est coupé de l'essence même de ce sport. Et ça, malgré l'effort des dirigeants de ces grandes ligues. Seulement, on leur demande un truc infaisable. En Ile de France, je sillonne un territoire qui fait 17000 km2 pour 150 clubs. C'est déjà le maximum dans le cadre d'un bénévolat. Je vous laisse imaginer le travail que cela représente pour les dirigeants de la ligue Nouvelle Aquitaine dont le territoire est de 82000km2 et plus de 300 clubs. J'ai beaucoup d'admiration pour le président de cette ligue si il doit aller voir tous les clubs. Ou alors, il faut salarié les gens mais le rugby n'en a pas les moyens. Je m'attends donc, tôt ou tard, malheureusement à des dérapages financiers.

Avez-vous déjà des retours de votre travail ?

F.G. : Oui, ils sont plutôt positifs. Les clubs savent très bien qu'une stratégie de développement du rugby, ce n'est pas simplement la distribution de ballon ou de téléviseurs (ndlr : financées par la LNR pour les téléviseurs). Les clubs ont besoin d'être aidé. Mais si quelqu'un a soif, il ne suffit pas de lui donner une bouteille d'eau. Il faut lui fournir le matériel pour trouver une source ou créer un puits. On essaiera donc de donner des outils aux clubs pour les accompagner et surtout d'être extrêmement proches d'eux et d'être à l'écoute. C'est ça, le besoin des clubs. Les différentes affaires qui ont touchées la nouvelle gouvernance, ça concerne plus à mon sens le microcosme médiatique, même si l'image du rugby qui se dégrade à cause de ça, me désole. Tout comme la violence de cette gouvernance dans le management humain. Ce n'est pas conforme à l'image que je me fais du rugby.

Un exemple ?

F.G. : La façon dont Guy Novès a été remercié ou la manière d’asseoir Fabien Galthié sur les genoux de Jacques Brunel me gênent. Et il n'y a aucun jugement sur les compétences techniques des uns ou des autres. Mais ce management est extrêmement violent. C'est pourquoi j'insiste sur les qualités de la relation humaine que peut avoir un garçon comme Jean-Marc Lhermet, par exemple. C'est quelqu'un qui a un sens de la relation et qui ne situe pas cette relation dans le conflit comme ça peut être le cas de certaines personnes à la Fédération qui sont soit revanchardes, soit dans la division. Le rugby, c'est rassembler, tendre la main, faire preuve de solidarité.

A quel moment interviendra la constitution de votre liste ?

F.G. : Ce n'est absolument pas le sujet aujourd'hui. Il n'y a pas d'organigramme, ce serait redoutablement prétentieux. Pour l'instant, il y a des gens qui ont travaillé avec des sujets de prédilections. La liste, on la fera à la dernière minute du temps imparti parce qu'on compte bien profiter des 200 jours de campagne pour identifier des gens ayant le potentiel pour porter les sujets qui sont dans notre projet. 

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