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XV de France : Un quart de bonheur

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    Un quart de bonheur
Publié le Mis à jour
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L’équipe de France a atteint son objectif initial en décrochant, non sans mal, sa qualification pour les quarts de finale de la Coupe du monde. Avant d’en arriver là, il faudra en passer par un Crunch, face à l’impressionnante équipe d’Angleterre.

Si les Bleus ne connaissaient pas Sam Lousi au coup d’envoi, ils ne sont pas prêts de l’oublier. Le géant deuxième ligne tonguien ne fait pas dans la dentelle et perpétue, avec un certain panache, la légende des coupeurs de tête venus des îles lointaines. Il démembre tout ce qui passe à sa portée : les côtes de Sébastien Vahaamahina en entrant sur le côté d’un ruck, le dos de Paul Gabrillagues après le coup de sifflet de l’arbitre, les jambes de Baptiste Serin à retardement. On n’a d’ailleurs pas osé dire au demi de mêlée toulonnais, ni à Charles Ollivon encore échaudé par "le match le plus violent qu’il a pu jouer" qu’ils vont retrouver le "grand Sam" en Challenge Cup dans quelques semaines, avec le RCT. Car cet ancien treiziste, et membre des Hurricanes depuis deux ans, vient de s’engager avec les Scarlets de Llanelli. Une sacrée bonne pioche pour l’équipe galloise, si toutefois les arbitres sont tous aussi cléments que l’Australien Nic Berry, ancien demi de mêlée du Racing, qui refusa d’aller au-delà de la simple réprimande.

à ce propos, Jacques Brunel écarta vite la question de l’arbitrage, trop soucieux de ne pas se mettre à dos l’ensemble du corps arbitral pendant la compétition avant d’avouer que "ça s’apparentait à de la natation". Plutôt musclée, alors. On pencherait plus pour du water-polo, les plongeons n’ayant rien d’artistique. Cela a bien aidé des Tonguiens, qui n’avaient pas grand chose d’autre à proposer que du jeu à une passe. Un spectacle qui a ses amateurs, comme l’ancien deuxième ligne springbok Bakkies Botha : "J’aime bien quand les Français ont le ballon dans les mains, parce que j’adore les caramels que mettent alors les Tonguiens." C’est une approche toute personnelle du rugby. Impunité au sol, et des golgoths qui aiment taper fort, vous avez le mélange gagnant pour des ballons ralentis et un faux rythme. Pas vraiment en adéquation avec le jeu recherché par les Bleus, depuis le début de la préparation. "On a travaillé sur la vitesse et la course pendant deux mois, je ne suis pas certain qu’ils aient fait la même chose", rigolait après coup Charles Ollivon. "Il était difficile dans ces conditions de libérer rapidement et proprement la balle ", analysait de son côté le sélectionneur. Un rugby minimaliste mais efficace. Et les Bleus n’ont pas réussi à amener les Océaniens loin de leur zone de confort.

Rien de parfait

Un petit match en somme, où les Bleus ont encore affiché certaines lacunes. Notamment une mêlée chahutée comme un bateau de pêche dans le golfe de Gascogne et ces zones de rucks où les États-Uniens avaient déjà joué les shérifs. Enfin, cette incapacité à tenir la stratégie initiale. Au vrai, rien n’a vraiment été parfait face au Tonga, le spectre de 2011 planant un instant au-dessus des Bleus. Avant une dernière claquette de Damian Penaud pour Yacouba Camara, sous un dernier renvoi pendant lequel tous les supporters retenaient leur souffle.

Ces imperfections étaient déjà criantes contre les Eagles et les Pumas. Mais les Bleus sont en quart de finale de la Coupe du monde et c’est un immense soulagement. C’est même l’essentiel, puisque la France a longtemps tremblé à l’idée de ne pas sortir de la phase de poule pour la première fois de son histoire. "Nous sommes qualifiés, alors que tout le monde sait que l’on revient de très loin. Il n’y a pas si longtemps, personne n’aurait mis une pièce sur nous. à partir de maintenant, nous sommes sûrs d’être qualifiés et je crois aussi qu’on va pouvoir jouer plus libérés", promettait à son tour Baptiste Serin. Les Pumas devaient ridiculiser la bande de Guilhem Guirado dès le premier match, laissant les Tricolores à leur long chemin de croix. Cette édition 2019 était à oublier avant même de prendre l’avion. Au diable le Japon, il fallait se concentrer sur 2023 et ce Mondial à la maison que l’on pouvait enfin espérer remporter, grâce à tous nos champions du monde des moins de 20 ans...

Ces Bleus de 2019 ont donc fait mentir ces funestes pronostics. Il faut savourer ce parcours jusque là sans encombre sur le plan des résultats, se souvenir que la France bataillait quatre jours avant face aux États-Unis pendant que le Tonga se reposait. Il faut aussi visualiser les occasions nettes d’essais en première période, ou encore le fait que les Tricolores ont eu deux essais refusés à la vidéo pour en-avant, en seconde mi-temps. Il faut absolument se raccrocher aux choses positives, puisqu’il y en a !

Les éclairs de Raka

Entendons-nous bien : il n’est pas question de leur tresser des lauriers car sans quelques fulgurances d’un Alivereti Raka revanchard, on se serait ennuyé ferme dans les travées du stade de Kumamoto. Au regard des résultats depuis quatre ans, il serait pourtant indécent de quémander une manière plus affriolante. Pour l’instant, on se contente volontiers des entames de feu. Puis on accepte de serrer les fesses, croiser les doigts, faire des incantations vaudou pendant les passages à vide. Pour l’instant, ils ne sont pas rédhibitoires et cela a au moins le mérite d’animer les fins de match, de faire monter le palpitant, de se dire que le rugby français a toujours cette petite folie au fond de lui. Que ce XV de France pourrait encore nous réserver la surprise de ne pas perdre le fil devant l’Angleterre, qu’il peut réussir à transformer les pétards du début de match en feu d’artifice de phase finale.

Il faudra pour cela avoir un peu plus de rigueur tactique et une bien meilleure finition, c’est évident. Un quart de match accompli, même s’il suffit pour l’instant au bonheur des Bleus, ne pourra pas les amener au-delà des quarts de finale. En attendant, la France du rugby a six jours pour rêver. Et ça fait longtemps qu’elle n’a pas connu ça : ce frisson, cette excitation, cet espoir qu’elle peut encore jouer avec les grands.

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