Quand Ntamack « père » allume les Bleus
Présent au Japon pour y soutenir le XV de France mais aussi son fils, Romain, l'ancien entraîneur des Bleus et trois-quart international Emile Ntamack (46 sélections) s'est confié aux Anglais du Daily Mail. Et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il n'y va pas de main morte avec le rugby français.
Son propos sur le XV de France, Emile Ntamack l'ouvre par un comparatif socialo-rugbystique. « Pendant dix mois en France, nous avons eu les gilets jaunes qui cassaient tout, bloquaient tout. Chaque samedi, vous ne pouviez plus mettre un pied dans la rue. Qu'est-ce que ça a changé ? Rien. Eh bien, c'est la même chose pour le rugby français. » Dans les colonnes du Daily Mail ce dimanche, l'ancien trois-quarts international français (46 sélections) revient sur le début de campagne des Bleus.
Ponctué de trois victoires, certes, qui leur ouvrent la route vers les quarts de finale avant même d'affronter l'Angleterre, samedi à Yokohama. Mais aussi des performances globalement insatisfaisantes, dont on retiendra pour positif la première période face à l'Argentine et l'entame des rencontres face aux USA et aux Tonga. « Les problèmes reviennent toujours, après les accalmies. Pareil pour le rugby français : ce ne sont pas une ou deux victoires au Japon qui vont changer les choses en profondeur. Les mêmes problèmes vont revenir. »
Ces problèmes, Ntamack père les énumère. Et il brosse large. Le staff, d'abord : « Le problème, ce n'est pas Brunel. Le problème, c'est de savoir qui décide dans cette équipe. Il y a 16 personnes dans le staff. Chacun parle aux joueurs mais qui est le chef ? En Angleterre, c'est Eddie Jones qui décide de tout. Peut-être que, parfois, il se trompe, mais il décide quand même. En France, on ne comprend pas bien qui décide de quoi. Il y a Brunel aujourd'hui, Galthié pour demain mais qui est déjà là. Alors, qui commande pendant cette Coupe du monde ? On ne sait pas. »
Le French flair est partout... sauf en France!
Passé le staff, Emile Ntamack en vient à la gestion des hommes. « Parfois, nous sommes prisonniers de notre culture. Nous ne donnons pas assez de temps au talent. Quand ils ont choisi de titulariser Romain (Ntamack, son fils) pour affronter l'Argentine, tout le monde a dit : « Mais pourquoi changer maintenant ? Il est trop jeune. » Sauf qu'il a montré que c'était la bonne décision. [...] Comme lui, nous avons des joueurs de grand talent en France. Mais leur laisse-t-on le temps et la confiance du collectif pour s'épanouir ? Non. »
Au tour, désormais, de l'ombre du french flair. « Avec ce french flair, nous vivons trop dans le passé. La vérité ? L’Écosse, l'Australie, le pays de Galles, l'Irlande, l'Argentine ont tous une part en eux de french flair. Je peux en voir partout, dans toutes ces équipes... sauf en France ! »
Bastareaud en symbole
Cette disparition du jeu à la française, cette perte d'identité, Ntamack la symbolise par la capitannat offert à Mathieu Bastareaud, en début d'année. « C'est difficile, pour moi, de parler de Mathieu car il a connu sa première sélection alors que je faisais partie du staff de l'équipe de France. Il était le symbole d'une génération émergente mais, aussi, un joueur qui devait encore faire de gros efforts. En 2009, il a commencé à grossir. Je lui ai dit : « Mathieu, tu as trois mois pour perdre quatre kilos. C'est ton challenge pour rester en équipe de France. » Il est revenu avec deux kilos de plus... Mathieu, c'est un centre mais à ce poste, la seule puissance ne peut pas suffire. Il survit en Top 14, bien sûr, mais vous ne pouvez plus avoir ce seul profil dans le rugby international. Et malgré tout, ils en ont fait leur capitaine. Je ne veux pas m'attaquer au joueur mais au symbole. Bastareaud capitaine de l'équipe de France ? C'est désormais cela, notre rugby ? Notre philosophie ? Dans le passé, vous rêviez de Serge Blanco, Philippe Sella, Philippe Saint-André, Christophe Dominici... Ils étaient nos symboles. Est-ce que Bastareaud peut-être le symbole du rugby que vous souhaitez pour vos enfants ? Je ne crois pas. »
Une charge solide mais étayée, qui a le mérite de son honnêteté. Avant de conclure, plus optimiste pour l'avenir de cette Coupe du monde : « Tout le monde sait que l'équipe de France n'est pas la meilleure du monde. Et on s'en fout. Ils n'ont plus rien à perdre. Et ils sont en vie. Désormais, tout peut arriver. »
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