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Les Bleus en questions

Par Midi Olympique
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    Les Bleus en questions Midi Olympique - Patrick Derewiany
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Ramos était-il blessé ? Oui 

Touché à une cheville en première mi-temps face aux Etats-Unis, Thomas Ramos avait néanmoins pu tenir sa place jusqu’à la 57e minute, avant d’être remplacé par Maxime Médard. Croisé à la fin de la rencontre dans les couloirs du stade de Fukuoka, Ramos n’était pas inquiet pour la suite de la compétition. Pourtant, le lendemain de la rencontre, le staff du XV de France annonce son forfait. Une blessure constatée par World Rugby qui a autorisé son remplacement par Vincent Rattez. Néanmoins, le Toulousain était titulaire moins de dix jours plus tard avec son club contre Castres. Le staff des Bleus a alors dû se justifier. « Il y a un diagnostic qui a été fait, il y a des imageries qui sont les mêmes ici qu’à Toulouse, a avancé le sélectionneur. Il y a une évaluation de l’indisponibilité qui a été évaluée à environ dix jours, toujours avec l’incertitude de savoir si c’est neuf ou si c’est onze. » Avec deux matchs à jouer pendant cette période, le camp tricolore voulait être sûr de pouvoir compter sur deux arrières au cas où Maxime Médard se serait blessé lors du premier.

Ce groupe vivait-il vraiment bien ? Oui

Le doute n’est pas permis. Après quatre mois de vie communue, le XV de France était une véritable équipe et non plus une simple sélection. « C’est la force d’une Coupe du monde. On ne connaît pas forcément les joueurs mais après une ou deux semaines vous avez l’impression que ce sont vos frères de club », a déclaré Guilhem Guirado devant ses coéquipiers après la défaite contre le pays de Galles, avant de donner un exemple personne : « Jefferson, j’ai appris à te connaître. Même après avoir disputé trois tournois des 6 Nations, je ne te connaissais pas. J’ai appris à te connaître. » Un esprit de corps sur lequel misait Jacques Brunel pour que l’équipe de France retrouve des couleurs lors de ce Mondial. Le sélectionneur a été satisfait sur ce point-là et il a voulu remercier ses joueurs après l’élimination : « Moi, je me suis régalé, on s’est régalés avec le staff. Je pense que ça a relativement bien fonctionné. On aurait voulu que cette aventure soit différente, plus belle, meilleure, plus longue. Mais vous n’avez rien à vous reprocher. Franchement, vous avez été une belle équipe. Merci. » Une vie de groupe louée pendant toute l’aventure par l’ensemble des joueurs et notamment des plus jeunes qui ont trouvé leur place sans aucun problème. L’apparition de la « bande à Loulou », autour de Picamoles, en est le meilleur exemple. 

Les jeunes ont-ils pris le pouvoir ? Oui 

Une nouvelle génération s’est, elle, affirmée au Japon ? On peut le penser notamment à travers l’autorité de la charnière Antoine Dupont-Romain Ntamack. L’annonce de la retraite internationale de Camille Lopez semble aller dans ce sens. L’ouvreur de Clermont n’a que trente ans mais on a l’impression qu’il a compris que Romain Ntamack (20 ans) serait dur à contenir. Dans l’animation, le Toulousain s’est montré assez étincelant, contre l’Argentine et contre le pays de Galles, ce fut frappant, au moins en début de match. C’est vrai, ses tirs au but ont manqué de fiabilité, les cinq points laissés en route ont coûté cher face aux Gallois. Sa gestuelle est sans équivalent dans le rugby français. À la mêlée, Antoine Dupont (22 ans) aussi s’est affirmé comme un quasi-taulier. Son style de bélier puncheur a éclaté à la face du monde. Il apparaît très dur à déloger du poste. En numéro 8 aussi Gregory Alldritt (22 ans) a marqué des points précieux. Ces trois hommes ressemblent à la colonne vertébrale de l’équipe de 2023. On ajoutera Camille Chat (24 ans) qui fut à deux doigts de déloger le capitaine Guilhem Guirado du talonnage. À l’aile Damian Penaud à 23 ans, fait d’ores et déjà figure de cadre. Ses fameuses foulées en font un attaquant irrésistible et indispensable. Son forfait, craint avant Galles-France, aurait été vécu comme une catastrophe. Tous ces talents sont en passe de devenir de vraies locomotives.

L’avis de Bernard Laporte : « Les jeunes ont été très impliqués, on peut dire que la charnière Dupont - Ntamack s’est imposé pour l’avenir, mais qu’ils ont pris le pouvoir, pas encore. Dans les prochains mois on devrait voir apparaître d’autres champions du monde moins de 20 ans dans le groupe France. »

La France est-elle loin des meilleurs ? Oui

Les faits sont là. À l’analyse brute du tableau final de cette Coupe du monde 2019, l’équipe de France, quart de finaliste de l’épreuve, fait toujours partie des huit meilleures équipes du monde. Les Bleus ont su éviter (de peu) le piège argentin en début de compétition et se sont ensuite contentés du minimum syndical pour sortir de leur poule, en battant sans briller le Tonga et les États-Unis. Le désormais fameux typhon Hagibis permettant aux Bleus de contourner le révélateur anglais lors de la première phase. Ainsi, bon an mal an, Les Français ont su s’inviter à la table des Anglais, des Néo-Zélandais, des Springboks, des Japonais, des Australiens et des Irlandais. Pour finalement accoucher, en quart face aux Gallois, du match le plus abouti de leur compétition, soldé sur une défaite cruelle 20 à 19 dans les conditions que l’on sait. Ceci étant, force est aussi de constater que le jeu des Bleus n’a été que trop rarement rassurant et porteur de garanties. Hormis lors de la première période de ce fameux quart de finale, où les Bleus ont marqué les Gallois au fer rouge, le reste du bilan est plutôt terne. Bien loin des standards du très haut niveau mondial présenté par les Anglais, les Néo-Zélandais ou les Springboks, les Français ont affiché de grosses difficultés dès qu’il a fallu s’en tenir à une stratégie claire. Leur conquête a souvent été chahutée (souvenez-vous du match contre le Tonga), les lancements de jeu n’apparaissent pas aussi huilés et efficients que chez les tout meilleurs. Qu’on le veuille ou non, La France a souffert dans la guerre des rucks contre les États-Unis, a fait preuve d’une indiscipline récurrente et n’a pas su tuer un quart de finale qu’elle ne pouvait décemment pas perdre ; là où les Anglais allaient encore en touche alors qu’ils menaient de 30 points contre l’Australie à cinq minutes du terme de leur quart de finale. Les Bleus, par bribes, sont capables d’étincelles mais pour gagner à ce niveau il faut être bon tout le temps. Les Bleus doivent apprendre à être constants sur toute la durée d’un match. Si près, si loin.

L’avis de Bernard Laporte : « J’ai l’impression qu’il y avait trois équipes au-dessus du lot dans ce Mondial, l’Angleterre, l’Afrique du Sud et les Néo-Zélandais et que derrière il y a un deuxième wagon avec le XV de France. On va tout faire pour accrocher le premier, le plus rapidement possible. »

Galthié a-t-il pris la main sur le sportif ? Oui

Quand Bernard Laporte a recruté Fabien Galthié pour « épauler » Jacques Brunel, on se doutait que l’ancien demi de mêlée ne viendrait pas pour faire de la figuration. Galthié a commencé par imposer le préparateur physique de son choix, Thibault Giroud. Ceux qui ont suivi la préparation estivale ont vite vu que l’ancien coach du Stade français et de Montpellier s’est occupé de pas mal de choses lors des sessions d’entraînement. La préparation, intensive, basée sur la vitesse d’exécution, a été orchestrée par lui. D’ailleurs certains joueurs l’ont laissé entendre très tôt comme Camille Chat : « Le projet de jeu, pour moi, est plus précis que lors du dernier Tournoi des 6 Nations, constatait le talonneur Camille Chat. Galthié est quelqu’un de très pragmatique. On comprend rapidement ce qu’il veut. » Maxime Médard l’a confirmé : « Fabien amène un peu plus de détails, un peu plus de structures. On a vu pendant le Tournoi et la tournée de novembre que nous avions des difficultés sur nos sorties de camp, sur des tâches basiques mais qui ont leur importance à haut niveau. Il a apporté des structures qui nous rendent plus sereins et plus organisés. Il a aussi parlé d’endurance mentale pour éviter de perdre des matchs sur la fin comme ça nous est arrivé. » Antoine Dupont a développé la même idée en ajoutant « les zones de marque » et « les phases de pression » aux secteurs améliorés par Fabien Galthié. Difficile de dire que ce dernier n’a pas posé son empreinte sur le style français. Les lancements offensifs observés face aux Argentins et aux Gallois notamment semblent en être la preuve.

Guirado a-t-il été mis en danger ? Oui

Concernant ce débat, il faut, avant toute chose, le clarifier. Dans l’esprit des coachs du XV de France, et notamment celui de Fabien Galthié, Camille Chat était le meilleur talonneur du groupe France et après tout, cette opinion se défend : maintenant qu’il a en partie gommé ses errements au lancer, le Racingman est un « produit fini », surpuissant en mêlée fermée, renversant au plaquage et hyperactif en défense, quoique parfois désordonné dans les tâches qu’il accomplit sur un terrain de rugby. Mais si le virtuel numéro 1 était Camille Chat, pourquoi être parti, dès lors, au Japon, avec un capitaine fragilisé ? L’attitude du staff était ici au mieux malvenue, au pire irresponsable, tant le cas Guirado accoucherait tôt ou tard d’un malaise au sein du groupe France, dans ce Mondial… Oui, Guilhem Guirado a donc été mis en danger par ses coachs. Il s’en était d’ailleurs ému auprès d’eux, après le match amical remporté face à l’Italie au Stade de France, leur reprochant entre autres choses de ne pas assumer publiquement leur décision. Leur a-t-il depuis pardonné ? L’accolade ayant suivi la défaite en quarts de finale entre le capitaine tricolore et le sélectionneur Jacques Brunel aurait tendance à prouver que oui. En revanche, la cicatrice entre Guilhem Guirado et Fabien Galthié, qui date d’une fin d’aventure toulonnaise douloureuse, ne sera semble-t-il jamais refermée…

L’avis de Bernard Laporte : « Oui il a été contesté sportivement notamment par Camille Chat, mais Guilhem a été exemplaire et un vrai et grand capitaine »

La composition d’équipe était-elle un enjeu primordial ? Non

Convenez que tout ceci est finalement très français et, comme beaucoup de coachs de Top 14, les entraîneurs de la sélection nationale s’étaient fait donc un point d’honneur, au Japon, à dissimuler le plus longtemps possible leur composition d’équipe. Pour garder inviolé le plus lourd secret de l’histoire de l’humanité, l’encadrement tricolore avait même sacrifié au ridicule, élevant d’immenses bâches autour de ses terrains d’entraînement, postant des bénévoles de la Rugby World Cup aux endroits stratégiques des enceintes afin de décourager les espions. Dans le but de mettre un terme au jeu du chat et de la souris avec les médias, un membre du staff tricolore proposa un jour aux journalistes présents (une vingtaine au bas mot) le deal suivant : la composition d’équipe serait livrée à la presse, sous embargo, trois jours avant l’annonce officielle. Alors ? Les médias, qui estimaient qu’un tel procédé revenait à mentir à leurs lecteurs, leurs auditeurs ou leurs téléspectateurs, refusèrent le deal  en question, provoquant un durcissement des relations avec l’encadrement des Bleus. Dès lors, quand est-ce que la parano entourant les compositions d’équipe  prendra-t-elle fin chez les Bleus ? Quand est-ce que les entraîneurs français aborderont cet aspect là de leur job avec la relative décontraction qui caractérise les Anglo-Saxons ? Au sujet du délire entourant les compositions d’équipe dans le rugby pro français, on partage d’ailleurs l’avis de Bernard Laporte, lequel répète à l’envi, comme pour désacraliser la chose : « Le rugby, c’est courir, plaquer, sauter en touche et pousser en mêlée. Le reste, c’est de la branlette ».

Brunel avait-il perdu la main ? Non

Le sélectionneur avait moins d’influence sur les entraînements. Dès le début de la préparation, il a laissé la place à ses adjoints et notamment à Fabien Galthié pour établir le plan de jeu. En revanche, il est resté le grand patron et c’est bien lui qui décidait des compositions d’équipes. Après avoir consulté son staff, il prenait seul la décision finale. Il n’est pas étranger au maintien de Guilhem Guirado alors que Fabien Galthié aurait souhaité voir Camille Chat commencer le quart de finale contre le pays de Galles. C’est aussi l’ancien manager de l’UBB qui a pris la décision de renvoyer Thomas Ramos en France après le match contre les États-Unis en raison d’une blessure à une cheville. Un choix qu’il a assumé alors que l’arrière toulousain a pu disputer le derby contre Castres en Top 14 moins de dix jours après son départ de Kumamoto. Présent dès l’arrivée de Jacques Brunel à la tête du XV de France, Jean-Baptiste Elissalde déclarait ainsi : « Jacques est toujours le chef, il est le décisionnaire. Fabien a forcément apporté des idées neuves. Alors on a tous des « titres » (entraîneur de la défense, des trois-quarts, etc.) mais à la sortie, il y a surtout beaucoup d’échanges entre nous et c’est le principal. »

L’avis de Bernard Laporte : « Je le disais en début de compétition et j’en reste persuadé après coup. Nous avons gagné du temps avec l’incorporation de Galthié, Labit, Giroud. Je suis pleinement satisfait de l’état d’esprit que le staff a affiché. Tout le monde est resté à sa place. Je n’ai passé qu’une dizaine de jours à leurs côtés durant ce Mondial, mais je peux vous assurer que Jacques Brunel gardait le dernier mot et heureusement. Dans un staff, il n’y a qu’un sélectionneur ».

La préparation était-elle trop dure ? Oui et Non

L’arrivée de Thibault Giroud était une condition sine qua non de l’acceptation de Galthié de figurer dans le staff des Bleus. Les deux hommes avaient travaillé ensemble à Toulon et Fabien Galthié croyait en ses méthodes. L’objectif était d’organiser des séances à haute intensité pour préparer les joueurs à des matchs de même nature. Dès le mois d’août quelques confidences de joueurs nous ont laissés entendre qu’ils étaient marqués par la dureté des entraînements, surtout sous la chaleur. Alors le travail imposé par Giroud était il trop éprouvant ? Peut-être que oui car les Bleus ont blessé beaucoup de joueurs. Tour à tour, Falgoux, Willemse, Doumayrou, Bamba, Fofana, Mauvaka et Ramos ont quitté le groupe. Aucune autre équipe n’a perdu autant de joueurs… Mais certains se sont blessés en match (difficile de faire la part des choses avec l’usure de l’entraînement). Mais à la question centrale, on peut aussi dire non car les Bleus ont fini plutôt en forme. Ils nous ont semblé plus frais que les Gallois sur le quart de finale, un match qui les a vus quand même mener jusqu’à la 74e minute. Les détracteurs de Giroud ont argué que face aux Pumas, aux Américains et aux Tongiens, les fins de match ont été difficiles… Était-ce physique ou mental ? Une chose est sûre, Galthié a parfois confié qu’il était difficile pour les joueurs français d’accepter les séances aussi intenses que les matchs car culturellement, ils ont tendance à se protéger ; à la différence des Anglo-Saxons.

L’avis de Bernard Laporte : « Je n’aime pas cette question car quand on voyait d’où l’on partait… Je vais vous faire une confidence, après une discussion avec Warren Gatland après le quart de finale. Il a été surpris, car il m’a avoué qu’il pensait que l’équipe de France était capable de tenir 20 minutes à très haut niveau, or en quart de finale, jusqu’au bout, bien qu’à 14, on a rivalisé sur ce plan-là. Alors oui, nous avons eu pas mal de blessés, mais je ne crois pas que notre préparation ait été plus dure que celle des Anglais. Au contraire et on voit qu’ils sont en finale de la Coupe du monde ! »

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