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Fickou : « Teddy est ciblé comme s’il avait tué quelqu’un »

  • À seulement 25 ans, Gaël Fickou fait partie des joueurs les plus expérimentés du groupe France. Il en est notamment le capitaine de défense de Shaun Edwards.
    À seulement 25 ans, Gaël Fickou fait partie des joueurs les plus expérimentés du groupe France. Il en est notamment le capitaine de défense de Shaun Edwards. Icon Sport - Icon Sport
Publié le Mis à jour
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À seulement 25 ans, Gaël Fickou (54 sélections) a déjà participé à deux Coupes du monde. Il n’empêche, depuis le début de ce Tournoi, il a pris une nouvelle dimension. Dans cet entretien, il évoque avec naturel et franchise l’évolution de son statut, le culot de la nouvelle génération de joueurs qui brille actuellement et avance quelques explications sur la réussite soudaine d’un XV de France encore en proie au doute il y a seulement quelques mois. sensations.

Ce match en écosse est-il un piège ?

Tous les matchs sont des pièges ! Surtout quand on a gagné les rencontres précédentes. Plus tu gagnes, plus le risque est grand de tomber dans un piège. Vous croyez que les écossais ne rêvent pas de nous taper ?

Si, bien sûr…

Le piège, il est là. Toutes les équipes que l’on va affronter vont vouloir nous faire tomber. Ce match à édimbourg, il nous faut en sortir avec une victoire pour aller chercher quelque chose de beau.

Vous dîtes "quelque chose de beau"… Est-ce tabou de parler de grand chelem ?

Non, mais souvenez-vous d’où l’on vient. Il y a quelques mois, ce n’était quand même pas très rose. Restons humbles et concentrés. Surtout, pas d’emballement. Sans nier, évidemment, que nous sommes en course pour décrocher le Grand Chelem.

Quand je suis arrivé en équipe de France, il y avait des légendes comme Thierry Dusautoir, Vincent Clerc ou encore Nicolas Mas. Des mecs qui avaient beaucoup gagné en bleu. Forcément, quand tu arrives au milieu de ces joueurs-là, tu regardes, tu écoutes et tu te tais

En rêvez-vous ?

Tout le monde en rêve. Ça fait dix ans que l’équipe de France n’a rien gagné. Et nous n’avons jamais été si près…

Mais comment expliquez-vous ce revirement radical en quelques semaines ?

Vous savez, j’ai connu déjà pas mal de sélectionneurs. Déjà à l’époque de Philippe Saint-André, je me souviens qu’il réclamait la possibilité de travailler avec 42 joueurs. Aujourd’hui, Fabien (Galthié) a la chance de les avoir. Philippe demandait aussi de pouvoir bénéficier de plus de techniciens dans son staff. Aujourd’hui, Fabien (Galthié) a ces 42 joueurs à disposition et nous sommes "staffés" comme jamais. C’est hyperprécis à chaque poste, dans chaque secteur de jeu. C’est la première fois qu’il y a un technicien pour la défense, pour la touche, pour la mêlée, pour le jeu au pied… C’est précieux.

La présence de Fabien Galthié à la Coupe du monde lui a-t-elle permis de poser un diagnostic précis sur le malaise qui entourait le XV de France ?

C’est ce qui fait la différence aujourd’hui et c’est pourquoi le changement s’est opéré si vite. Nous avons commencé à construire ce projet au Japon parce que nos dirigeants ont permis à Fabien (Galthié) ou même encore à Laurent (Labit) d’être présents. Clairement, cela nous a permis de gagner du temps.

Êtes-vous surpris par cette nouvelle génération qui semble totalement décomplexée ?

Non, pas du tout.

Mais ces jeunes joueurs sont-ils différents de vous à votre arrivée dans le groupe France ?

C’est complètement différent. Quand je suis arrivé en équipe de France, il y avait des légendes comme Thierry Dusautoir, Vincent Clerc ou même encore Nicolas Mas. Des mecs qui avaient beaucoup gagné en Bleu. Forcément, quand tu débarques au milieu de ces joueurs-là, tu regardes, tu écoutes et tu te tais. Aujourd’hui, les jeunes qui arrivent en équipe de France, qu’est-ce qu’ils trouvent ? Le plus vieux, c’est Bernard (Le Roux). Le plus ancien, c’est moi et je n’ai que 25 ans. Pour eux, c’est forcément plus simple. Ils n’ont aucun complexe à avoir puisque, en plus, nous n’avons rien gagné.

Êtes-vous devenu un joueur d’influence au sein du XV de France ?

Oui, mais c’est lié aux responsabilités et à la confiance que m’accorde le staff. Et puis, à seulement 25 ans, je suis un des plus vieux dans ce groupe. J’ai donc un rôle à jouer. Je dois m’impliquer plus que les autres… Enfin, pas plus que les autres, mais montrer plus de leadership. C’est une évolution naturelle. Avant, on attendait ça de moi, mais on ne peut pas demander à un mec de 18 ans d’être un leader.

Avez-vous le sentiment qu’on attendait trop de vous par le passé ?

Peut-être, mais c’est normal. J’ai fait ma première Coupe du monde à 21 ans, ce qui a suscité des attentes. Aujourd’hui, je me montre davantage, je me sens bien dans ce groupe. Je suis heureux, tout simplement.

Quand Shaun Edwards vous a proposé d’être capitaine de la défense, quel a été votre première réaction ?

Un sentiment de fierté, d’abord ! Quand un mec comme Shaun Edwards croit en toi, te donne sa confiance, te propose de tenir un rôle aussi important, forcément ça ne peut pas laisser indifférent.

Que vous a-t-il dit ?

Il m’a expliqué qu’il avait bien suivi mes performances pendant la Coupe du monde au Japon, que j’avais fait de bonnes prestations en défense. Et qu’il pensait que j’étais celui qui correspondait le mieux pour ce rôle.

Avez-vous hésité à accepter ?

Ça ne va pas, non ? J’ai dit oui direct ! En restant moi-même, j’essaie de m’impliquer le plus souvent possible, de rappeler les principes et de montrer l’exemple le plus souvent possible.

Votre nomination à ce poste de capitaine de la défense a surpris certains observateurs. Est-ce parce que vous avez toujours été perçu comme un joueur davantage porté sur le secteur offensif ?

C’est une certitude ! Les gens me voient davantage pour mes qualités offensives. Dans le secteur défensif, j’ai longtemps été dans le contrôle. Aujourd’hui, je suis plus agressif sur l’homme, plus dur dans les contacts.

Votre replacement à l’aile contre le pays de Galles a-t-il changé votre rôle de capitaine de défense ?

Non, au contraire. Souvent, ce sont les ailiers qui annoncent la défense. Depuis le début du Tournoi, c’était moi en équipe de France. Du coup, ça n’a rien changé.

On a beaucoup reproché à Teddy Thomas ses performances défensives. Est-ce réellement plus difficile de défendre à l’aile ?

C’est différent dans la mesure où il y a plus de leurres dans la ligne à surveiller. L’objectif, à ce poste, c’est de très vite identifier la cible. Certes, l’ailier a un peu plus de temps pour analyser la situation, mais il a plus de joueurs à surveiller aussi. La difficulté est là, sur la lecture de l’attaque adverse. Et le problème pour Teddy, c’est que le système est totalement différent au Racing. Les Racingmen sont plus dans le contrôle. Pour moi, par exemple, c’est plus facile car j’ai l’habitude pratiquer cette forme de défense au Stade français.

Avez-vous trouvé injustes les critiques envers Teddy Thomas après le match contre le pays de Galles ?

Oui, parce que les gens oublient tout ce qu’il apporte à l’équipe sur le plan offensif. Après, il ne faut pas nier qu’il a commis quelques erreurs en défense. Il le sait, il travaille pour gommer ces carences. Mais l’acharnement dont il est parfois victime est quand même incroyable. Teddy est ciblé comme s’il avait tué quelqu’un. Arrêtons de déconner. Il a raté quelques plaquages, c’est arrivé à d’autres et ça arrivera encore.

Comment expliquez-vous ça ?

Teddy est un joueur qui ne laisse personne indifférent. Tout simplement. Un jour, il est le meilleur ailier du monde, le joueur le plus incroyable parce qu’il a marqué trois essais. Le lendemain, on l’enterre parce qu’il a raté deux plaquages. C’est profondément injuste. Ce mec ne mérite pas ça.

En ayant été performant à l’aile lors du match à Cardiff, ne craigniez-vous pas que le staff vous installe à ce poste ?

(il sourit) Très franchement, si l’équipe gagne, c’est l’essentiel. Après, mon poste c’est trois-quarts centre. C’est là où je me sens le mieux. À l’aile, il y a tellement de joueurs avec des qualités... Je pense à Damian (Penaud), à Teddy évidemment. Et puis, il y a aussi "Gaby" (Ngandebe) qui va à dix mille et qui va très vite devenir un atout pour les Bleus.

La "rush defense" a le défaut d’ouvrir des possibilités dans le deuxième ou troisième rideau par du jeu au pied adverse. Cela vous oblige-t-il à une plus grande vigilance en tant que capitaine de la défense ?

C’est un rôle collectif. Surtout, on travaille sur des solutions actuellement. Nos adversaires ne parviennent quasiment plus à nous franchir sur le premier rideau, ils vont donc forcément commencer à utiliser le jeu au pied. Les Gallois l’ont déjà fait, les Écossais vont le faire.

À seulement 25 ans, vous avez déjà participé à deux Coupes du monde (2015 et 2019). Votre rêve est-il d’en disputer quatre ?

Si j’en fais trois, je serais déjà très heureux. Quand je vois tous les jeunes joueurs talentueux qui débarquent en équipe de France, je me dis qu’à un moment ils vont me pousser vers la sortie (rires)... Regardez le match qu’a réalisé Arthur (Vincent) à Cardiff. Il y a aussi "Jean-Louis" (Pierre-Louis Barassi) qui va revenir très rapidement, Julien Delbouis qui va exploser très vite. Et puis, en 2027, j’aurai 32 ou 33 ans… Je ne pourrai plus rivaliser avec tous ces mecs. Je préfère donc me projeter sur les trois prochaines années pour faire partie de l’aventure France 2023. Jouer une Coupe du monde dans son pays, ça doit être top.

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