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Les personnages du rugby français : Dusautoir, « Ô Capitaine, mon capitaine ! »

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    Dusautoir : « Ô Capitaine, mon capitaine ! » Midi Olympique
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Retraité des terrains depuis déjà trois ans, son ombre tutélaire plane encore autant que sa parole compte, lorsqu’il s’agit d’évoquer le XV de France dont il a refusé le rôle de manager que voulait lui offrir Bernard Laporte après la dernière Coupe du monde. Et pour cause, puisqu’il demeure avec 56 capes le recordman du nombre de sélections en tant que capitaine du XV de France.

Voilà quelques jours, plus humain que jamais, Thierry Dusautoir l’a explicité sur le plateau du Canal Rugby Club. Comme plus de 110 000 de personnes en France et plus très loin des 2,5 millions dans le monde, l’ancien troisième ligne a contracté le coronavirus, au tout début de la vague de contamination. « Vers le 14 mars, j'ai eu l'apparition de symptômes et j'ai été diagnostiqué même si je n'ai pas été testé. Cela a été deux semaines assez fatigantes et éreintantes mais, encore une fois, tout va bien pour moi et ma famille. Dans le contexte actuel, on est quand même chanceux... »

Des mots empreints d’humilité et de pudeur vis-à-vis du plus grand nombre, à son image. Il est comme ça, Thierry Dusautoir. Toujours classe dans la douleur comme dans les meilleurs moments, et surtout pas du genre à se plaindre ni à s’apitoyer sur son sort. Des vertus qui ont fait de lui, devant l’histoire, le capitaine le plus capé du rugby français, qui a porté son record à 56 capitanats obtenus en 80 sélections. Le plus emblématique de l’histoire du rugby français ? Peut-être pas puisque tant d’autres ont laissé une trace indélébile, de Lucien Mias à Jean-Pierre Rives en passant par les Jean Prat, Christian Carrère ou Jacques Fouroux, sans oublier les « modernes » Saint-André, Pelous, Ibanez ou Galthié (liste non exhaustive, évidemment…). Alors, certes, on en entend d’ores et déjà certains s’élever, reprochant pêle-mêle au « Dark Destroyer » un charisme contestable dans l’art oratoire, voire un bilan globalement négatif. Il est vrai qu’avec moins de 50 % de victoires en tant que capitaine, et plusieurs claques marquantes (comme cette dernière sélection en quarts de finale contre la Nouvelle-Zélande, 62-13), difficile de nier que Dusautoir n’a pas terminé son mandat sur une bonne note…

Les derniers exploits des Bleus ? Il en était...

Mais les rageux seront toujours là pour rager, c’est bien connu, et les faits sont là pour réconforter les thuriféraires de Dusautoir. Le dernier exploit des Bleus en Coupe du monde ? Il en fut le principal artisan, quand bien même il ne portait pas encore les galons de capitaine, en assénant le record de 38 plaquages aux Néo-Zélandais en quarts de finale du Mondial 2007 (20-18). Le dernier succès des Bleus face à ces mêmes Blacks ? Il en était le leader, à Dunedin (29-22). La dernière victoire obtenue par le XV de France face aux Sud-Africains ? Idem, pour un joli triomphe obtenu sur ses terres toulousaines (20-13). Le dernier grand chelem tricolore ? Bingo, lors du Tournoi 2010. Et l’on n’oublie pas pour la bonne bouche la dernière grande campagne des Tricolores lors d’un Mondial en 2011, débutée dans la fange d’une phase de poules complètement manquée, et terminée à un petit point du Graal en finale, pour les raisons que l’on sait. Un hold-up sur lequel Dusautoir a toujours eu la dignité de ne jamais s’épandre publiquement, quand bien même le titre de meilleur joueur du monde qui lui avait été remis au lendemain de la finale avait tout d’un lot de consolation…

2011, le discours d’un roi

Que retiendra-t-on de Dusautoir, alors, au-delà des évidences, de son palmarès de club long comme le bras (un titre de champion d’Europe en 2010, cinq Brennus en 2005, 2006, 2008, 2011 et 2012), de cette abnégation jamais démentie au combat et de ces plaquages destructeurs qui firent sa légende ? D’abord, un regard. Deux yeux noirs et en perpétuel éveil qui, perchés au-dessus d’un visage aux traits fins et placides, transmettaient à eux seuls une foule d’émotion. Deux billes sombres et vives, qui n’en finissaient jamais de pétiller, et trahissaient à elles seules à qui savait les lire toutes les émotions que le capitaine cachait bien profondément derrière son masque d’austérité. Chiant, Thierry Dusautoir ? Certains de ses partenaires le lui ont reproché, oui, lorsque Philippe Saint-André tenta d’imposer le plus « nature » Pascal Papé. Faux procès, au vrai… Car derrière la rigidité de sa posture, Dusautoir n’en conservait pas moins une rage intérieure, un bouillon d’émotions héritées d’une enfance, dont ce faux calme faisait en réalité son moteur. Désireux de prouver, de montrer, de gagner. Pénétré de sa fonction de capitaine, ça oui, mais jamais le dernier pour s’ouvrir aux autres et de s’intéresser à tout le monde. C’est ainsi en discutant avec l’officier de liaison du XV de France que Thierry Dusautoir élabora la meilleure réponse à un haka jamais imaginée, avec cette fameuse flèche blanche face aux Blacks, en finale du mondial 211 (idée que les Anglais ne se sont pas privés de copier en 2019…). Le même jour, d’ailleurs, que Thierry Dusautoir livra son plus poignant discours, invitant les Bleus à emmener les Blacks à la rencontre de leurs racines, avec un mot sur les origines de chacun de ses partenaires. Preuve que lui aussi savait jouer sur la corde émotive, dans ses moments choisis. « Ô Capitaine, mon capitaine », clamaient les lycéens enfiévrés du Cercle des Poètes Disparus. Nostalgique, on en viendrait presque à les rejoindre, si le mandat de Charles Ollivon ne s’avérait pas des plus riches en promesse, dont on brûle désormais de connaître la suite...

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