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Henry Tuilagi, traiteur en chef

  • Henry Tuilagi est désormais traiteur au Chief’s Event, il organise des banquets en plein air qui permettent aux convives de découvrir la gastromonie des îles du Pacifique.
    Henry Tuilagi est désormais traiteur au Chief’s Event, il organise des banquets en plein air qui permettent aux convives de découvrir la gastromonie des îles du Pacifique. Jean Paul Thomas / Icon Sport
Publié le Mis à jour
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Le Samoan a quitté les terrains de rugby en 2016. Depuis, le Catalan d’adoption, désormais âgé de 43 ans, est devenu traiteur et organise des réceptions xxl. Comme si vous étiez dans les îles du Pacifique, avec cuisine au feu, danses et animations en tous genres. En parallèle, il reste un mentor pour nombre de joueurs fidjiens, tonguiens ou samoans.

Quatre ans après ses ultimes charges balle en mains, sous les couleurs du Salanque Côte Radieuse XV, en Fédérale 2, Henry Tuilagi reste une légende vivante de ce jeu. En cette période de privation, propice à la nostalgie chez tous les amoureux de rugby, le nom et les images de l’emblématique troisième ligne ressurgissent sur la toile. Dans les équipes de rêve des uns, dans les souvenirs les plus marquants des autres. Le natif de Fogapoa a laissé une empreinte durable sur son passage et dans les mémoires : James Haskell en parle comme du seul joueur ayant jamais suscité de la crainte chez lui ; Jake White, à l’époque où il officiait sur le banc des Springboks, a raconté n’avoir jamais vu Os du Randt être étourdi par un adversaire jusqu’à sa rencontre avec le colosse samoan en 2006.

Quand on lui raconte avoir vu son nom ressurgir soudainement, au détour d’articles ou de tweets, l’intéressé rigole : « Ah bon, vraiment ? C’est marrant que ça ressorte… C’est toujours bon de se remémorer ces moments. C’était une bonne époque. » Aucune mélancolie ne trahit sa voix rocailleuse : « Le rugby ne me manque pas plus que ça. Je suis content de ce que j’ai vécu. J’ai eu mon temps, j’en ai bien profité. Il y a quelques petites choses que je regrette de ne plus avoir. L’entraînement, notamment. Ce qui est bizarre car je n’aimais pas tellement ça à l’époque. Mais il y avait cette routine : le fait de se lever le matin, de préparer son sac et de rejoindre les copains. Je suis un retraité heureux, en tout cas. Je profite pleinement de ma famille. »
 

De 50 à 400 convives


À 43 ans, Henry Tuilagi a tracé sa propre voie. Avec une nouvelle activité mêlant, là aussi, passion et travail  : il est devenu traiteur au travers « Chief’s Event », société lancée à la toute fin de sa carrière : « J’ai pu mieux appréhender mon après-rugby en lançant mon entreprise en parallèle. Je suis fier d’avoir trouvé cette solution pour rebondir, en basculant sur un projet qui me tient à cœur. » Le Samoan organise de grands banquets de plein air en proposant aux convives de goûter à la gastronomie et au sens de la fête des îles du Pacifique. Comme si vous étiez à Suva ou Apia : « Je suis heureux de partager notre culture et tout ce qui nous représente : il y a la cuisine et aussi les danses, les musiques, le sens du partage… Il est important à mes yeux que les gens s’ouvrent à nos traditions, qu’ils comprennent qui nous sommes vraiment. Ce sont de grandes fêtes ouvertes : les participants viennent nous voir préparer le repas, on discute, ils peuvent aider s’ils le veulent… C’est toute une expérience. Le but est de faire venir les îles sur place. »

En Catalogne, cette invitation au voyage rassemble régulièrement de 50 à 400 convives, pour les baptêmes, mariages ou autres : « Je rencontre des gens tellement différents de ceux que j’ai pu côtoyer quand je jouais. Je m’immerge dans des communautés et des petits villages que je ne connaissais pas. C’est une belle ouverture sur les autres. » Et une manière idéale de souder les siens : « Je cuisine, surtout la viande et le cochon. Ma femme est à mes côtés et, parmi mes sept enfants, il y en a qui sont mis à contribution. Il y a aussi de la famille et des amis qui se joignent à nous pour les grosses célébrations. » Le tout forme une communauté haute en couleurs et cosmopolite. À l’image de la famille Tuilagi, native des Samoa mais Catalans d’adoption : « Mon pays, mes amis, ils me manquent forcément mais cette activité nous permet de maintenir notre mode de vie. Et puis nous sommes très heureux en France. Nous mêlons d’ailleurs les deux cultures dans la cuisine et les gens adorent ça. » Itinérant pour l’heure, Henry Tuilagi espère un jour pouvoir installer son concept dans un restaurant proche de Villelongue-de-la-Salanque : « Mais il faut un établissement avec beaucoup de place, c’est la contrainte. Sinon, on ne pourra pas partager comme on le fait aujourd’hui. »


La nouvelle génération perce


Si Henry Tuilagi mène une reconversion loin des terrains, il est régulièrement amené à y revenir. Comment pourrait-il en être autrement ? « Je n’ai pas trop le choix : j’ai cinq garçons et fille qui y jouent, raconte-t-il. Il y en a qui ont testé le handball, le judo… Mais le rugby l’emporte par-dessus tout. Tout tourne tellement autour du rugby, dans la famille. » Dans le sillage de Henry et de ses six frères professionnels, Henry Junior, 20 ans, commence à percer, au centre de l’attaque des espoirs de l’Usap. Bon sang ne saurait mentir, paraît-il… Le paternel suit de près cette éclosion de la nouvelle génération. Comme il garde encore un regard protecteur sur le devenir des centaines de joueurs des îles du Pacifique évoluant en Europe. L’international aux 10 sélections et à l’aura illimitée apporte son soutien à Dan Leo au sein de Pacific Rugby Welfare, le syndicat des Fidjiens, Samoans et Tonguiens exilés : « J’échange régulièrement avec Dan. C’était une très bonne initiative de sa part de lancer l’association. Nos Fédérations sont petites et ne reçoivent que des miettes. Réunir les trois pays peut nous rendre plus fort et nous permettre de faire entendre notre voix face aux grandes Fédérations européennes. Nous sommes aussi là pour apporter notre aide afin que personne ne se retrouve dans la difficulté. »


Débarqué à Parme en 2002, à 26 ans, avant de prendre la direction de Leicester et de Perpignan, le champion de France 2009 possède un recul précieux sur l’évolution de la situation : « Je trouve que ça va dans le bon sens, de manière générale. Il y a plus de liens entre nous et les réseaux sociaux permettent de garder le contact. Quand je suis arrivé en Europe, il y avait peu d’expatriés et il n’y avait pas tous ces moyens de communiquer. C’était plus dur de s’intégrer, de gérer la distance. L’isolement pouvait vite arriver. Maintenant, si tu es seul, si tu ne vas pas bien, si tu as besoin d’un conseil, tu peux plus facilement recevoir du soutien. » Le portable de Henry Tuilagi est toujours allumé, d’ailleurs, si besoin : « J’ai régulièrement des joueurs au téléphone. Vous savez, nous formons une communauté très soudée, on se serre les coudes. »
De temps à autre, le syndicat et ses dizaines d’adhérents se rassemblent chez Henry, autour d’un grand banquet dont il a le secret. Lui, un des papas des « Pacific Islanders » de France et d’ailleurs… L’intéressé en rigole de sa voix grave  : « Non, je ne suis pas le papa ou quoi que ce soit. Je suis juste heureux si je peux aider un jeune dans sa carrière. » Un vrai chef, pour vous servir, en toutes circonstances.

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