Abonnés

« L'hymne à la joie », aux racines de la Peña Baiona

Par Pablo Ordas
  • Jean-Dauger peut être un stade bouillant. En effet, C’est tout un peuple, empli de ferveur, qui pousse derrière l’Aviron. Un peuple fier de ses racines comme le prouve le chant «La Peña Baiona», qui a pris une dimension considérable dans les années 2000 . Une ambiance digne des stades de football argentin selon Martin Bustos Moyano qui a porté la tunique ciel et blanche de 2013 à 2019.
    Jean-Dauger peut être un stade bouillant. En effet, C’est tout un peuple, empli de ferveur, qui pousse derrière l’Aviron. Un peuple fier de ses racines comme le prouve le chant «La Peña Baiona», qui a pris une dimension considérable dans les années 2000 . Une ambiance digne des stades de football argentin selon Martin Bustos Moyano qui a porté la tunique ciel et blanche de 2013 à 2019. Midi Olympique - Pablo Ordas
  • Jean-Dauger peut être un stade bouillant. En effet, C’est tout un peuple, empli de ferveur, qui pousse derrière l’Aviron. Un peuple fier de ses racines comme le prouve le chant «La Peña Baiona», qui a pris une dimension considérable dans les années 2000 . Une ambiance digne des stades de football argentin selon Martin Bustos Moyano qui a porté la tunique ciel et blanche de 2013 à 2019.
    Jean-Dauger peut être un stade bouillant. En effet, C’est tout un peuple, empli de ferveur, qui pousse derrière l’Aviron. Un peuple fier de ses racines comme le prouve le chant «La Peña Baiona», qui a pris une dimension considérable dans les années 2000 . Une ambiance digne des stades de football argentin selon Martin Bustos Moyano qui a porté la tunique ciel et blanche de 2013 à 2019. Midi Olympique - Pablo Ordas
  • Jean-Dauger peut être un stade bouillant. En effet, C’est tout un peuple, empli de ferveur, qui pousse derrière l’Aviron. Un peuple fier de ses racines comme le prouve le chant «La Peña Baiona», qui a pris une dimension considérable dans les années 2000 . Une ambiance digne des stades de football argentin selon Martin Bustos Moyano qui a porté la tunique ciel et blanche de 2013 à 2019.
    Jean-Dauger peut être un stade bouillant. En effet, C’est tout un peuple, empli de ferveur, qui pousse derrière l’Aviron. Un peuple fier de ses racines comme le prouve le chant «La Peña Baiona», qui a pris une dimension considérable dans les années 2000 . Une ambiance digne des stades de football argentin selon Martin Bustos Moyano qui a porté la tunique ciel et blanche de 2013 à 2019. Midi Olympique - Pablo Ordas
Publié le Mis à jour
Partager :

Au fil du temps, la Peña Baiona est devenue l’hymne le plus connu du rugby français et son cadre a largement dépassé les seules frontières du Pays basque et du monde de l’ovalie. Voici sa génèse.

Le rituel dure depuis plus de quinze ans. Avant chaque rencontre de l’Aviron à domicile, à quelques minutes du coup d’envoi, la sono du stade crache les mêmes notes. C’est parti. "Dans notre cher petit Bayonne…" Les premières syllabes montent dans le ciel de Jean-Dauger, le public se lève comme un seul homme, le moment de communion peut commencer. La Peña a traversé deux décennies de joueurs. Des mômes, désormais jeunes adultes, l’ont entendue maintes fois. Malgré les années, elle a su garder de sa superbe, ne s’est pas essoufflée et ne laisse jamais indifférent. Sa portée va au-delà des frontières du Pays basque et dépasse le simple cadre sportif d’un match de rugby. On exagère ? Quel hymne, à l’entrée des joueurs sur la pelouse, est chanté par les supporters des deux camps ? Quel hymne est repris par les fanfares présentes les soirs de matchs internationaux au Stade de France ? Quel hymne est chanté à tue-tête par des fêtards éméchés, à toute heure du jour et de la nuit, à Dax, Bayonne, Nîmes ou Béziers ? La Peña voyage dans le temps et dans l’espace. Elle est devenue plus qu’un simple chant de supporters.

À l’origine de celle-ci, il y a une chanson, "Griechischer Wein" (Vin Grec), écrite dans les années 70 par deux pointures de la musique : le chanteur autrichien Udo Jürgens (vainqueur de l’Eurovision en 1966) et le parolier allemand Michael Kunze (79 disques d’or et de platine, 3 Golden Europe Awards). Elle parle des travailleurs immigrés grecs en Allemagne qui se retrouvaient, entre eux, pour boire une coupe de vin et repenser à leur pays. José Velez en a fait une version espagnole en 1976, le "Vino Griego". Dans la foulée, le chanteur portugais Paulo Alexandre l’adapta à la langue de son pays. Forte de ces deux nouvelles versions, elle s’est répandu dans le monde mais dut attendre la fin des années 90 pour débarquer en France. "Elle est arrivée vers chez nous par une banda de Montfort qui a ramené une partition du Portugal et qui a commencé à la jouer, raconte Manex Meyzenc, directeur de la maison de disques Agorila. Nous avons ensuite commencé à la travailler au début des années 2000."

Toutes les peñas m’ont marqué. Ce chant, tu as envie de l’écouter, tu as les larmes aux yeux, la chair de poule. Quand il se termine, tu as envie de tout exploser.

À l’époque, l’Aviron est en Pro D2. Entre 1 000 et 1 500 personnes viennent au stade pour les grands matchs et, en 2002, la première peña de supporters voit le jour. La Peña Baiona. Elle est créée par Francis Gastambide, Frédo Teillery, Patrice Herlax, et Michel Laborde. Tous les midis, la bande se rejoint au Guernika, un bistrot situé place Paul-Bert. Patrice Herlax, fan de l’OM, souhaite trouver quelque chose qui réunisse tout le monde. Michel Laborde lui demande de ramener des CD. "En tant que musicien, j’ai choisi un morceau, raconte ce dernier, un brin ému. C’était le "Vino Griego". De là, nous avons commencé à l’écouter en mangeant au Guernika. Dominique Herlax, oncle de Patrice, qui était un poète, a proposé d’y poser des paroles." Patrice Herlax, aujourd’hui décédé, et Francis Gastambide vont à la rencontre de Manex Meyzenc, dans sa maison de disques, et lui proposent cette invention. Meyzenc reconnaît : "À l’époque, j’étais un peu réticent parce que je suis plus pour la création que pour la reprise de morceaux existants. Au final, je leur ai répondu : "C’est sympa, on ne risque rien, on va la tenter." Les résultats de l’Aviron ont été crescendo et nous avons bénéficié de l’élan de ce premier club de supporters. Nous en avons ensuite fait plusieurs enregistrements." L’Harmonie Bayonnaise, Gorka Robles et Marc Lartigau ou les Chœurs de l’Aviron se succèdent pour enregistrer différentes versions. Les joueurs aussi. "Il y a eu toute cette embellie qui s’est faite à ce moment-là. À l’époque, Jean-Dauger, de par cet hymne, était l’endroit où il fallait être", affirme Francis Salagoïty, président de l’Aviron de 1999 à 2011, puis de 2015 à 2018.

Beltran : "Même Richard Dourthe a eu sa petite larme…"

Le succès du "Vino Griego" est une aubaine pour la maison de disques, Agorila, qui reçoit de nombreuses sollicitations. L’air est notamment utilisé pour la cérémonie de remise des médailles des championnats du monde d’athlétisme au Stade de France en 2003. Petit à petit, le "Vino" se transforme surtout en repère pour les joueurs, à Bayonne, dans la préparation méticuleuse et minutée de l’avant-match. " Souvent, on se dit un petit mot à ce sujet : "Tout le monde est prêt, écoutez." C’est le signal", raconte Grégory Arganèse, talonneur de Bayonne entre 2012 et 2019.

Pour les joueurs généreux, qui aiment prendre toute cette force venue du public avant de la rendre sur le terrain, elle est un réel vecteur de motivation. L’Argentin Martin Bustos Moyano a passé six ans sur les bords de Nive. Il raconte : "Quand tu arrives à Bayonne, tout le monde te parle de la Peña. C’est difficile d’expliquer ce que tu ressens quand tu es dans le vestiaire." À en croire les principaux acteurs, on ne se lasse pas de cet hymne et sa puissance reste la même malgré le temps qui file. "Toutes les peñas m’ont marqué. Ce chant, tu as envie de l’écouter. Tu as les larmes aux yeux, la chair de poule, avoue Abdellatif Boutaty. Quand il se termine, tu as envie de tout exploser." David Roumieu, talonneur ciel et blanc entre 2007 et 2015, abonde dans le même sens. "Ça transcende. Pour avoir connu le pic du top des supporters, c’était extraordinaire. Encore maintenant, si je revois des images avec ce chant, ça me donne des frissons. Je ne m’en lasserai jamais."

Chez les nombreux entraîneurs qui se sont succédé à la tête de l’Aviron depuis une vingtaine d’années, la Peña a aussi laissé son lot d’anecdotes. Jean-François Beltran n’a rien oublié de ces moments magiques. "Le rituel, c’était qu’un dirigeant ouvre légèrement la porte des vestiaires pour que la chanson puisse arriver jusqu’à nous. Même un garçon comme Richard Dourthe, qui avait quand même fait la finale de la Coupe du monde, avait, de temps en temps, sa petite larme. Surtout quand il s’agissait d’un derby contre Biarritz, révèle celui qui fut coach des arrières entre 2006 et 2008. Je ne dis pas qu’elle fait gagner les matchs mais sur des rencontres équilibrées, elle peut faire la différence." Aussi important soit-il, ce chant n’est que rarement évoqué par les coachs dans les briefings d’avant-matchs, dans les moments qui suivent l’échauffement ou dans les vestiaires avant que les supporters ne l’entonnent. "Les mecs savent qu’ils vont la vivre et l’intègrent dans leur préparation. Pour les plus expérimentés, la force de ce chant leur donne une idée de l’importance du match. C’est un baromètre. Certains joueurs viennent ici pour connaître ça. Ils me l’ont dit", assure Yannick Bru. "On parle de fierté, de jouer devant notre public. Ce sont des choses qui, naturellement, reviennent" ajoute Vincent Etcheto.

Les joueurs bayonnais ne sont pas les seuls à en profiter

Chargée d’animer les tribunes depuis 2002, la célèbre mascotte Pottoka vit ces quelques minutes de manière privilégiée, seule sur le pré. "C’était magique d’être dans ce chaudron", remarque Christophe Daupes, première personne à avoir enfilé le costume du pottok le plus connu de France. "Le moment où je me retrouvais au centre du terrain avec Stéphane Decomble (ancien speaker du club, N.D.L.R.), je recevais une onde positive… Vous ne pouvez même pas imaginer la puissance du chant, lorsqu’il est repris a cappella par tous les supporters. Cela donne une énergie folle. Après ça, je pouvais faire 250 roulades, je ne sentais plus la chaleur sous la tenue. C’était l’EPO du début de match."

Et chez les adversaires, quelle importance a-t-elle ? Arganèse, passé par Castres, Montauban et le Racing avant de filer à Bayonne, détaille : "Je me suis toujours servi de l’ambiance qu’il y avait dans les stades. Au Munster, où j’ai joué avec Castres, quand tout le monde chante, c’est impressionnant. Quand tu viens affronter Bayonne, il faut le prendre aussi. Tu te dis que tout le monde est contre toi et ça te motive." Yannick Bru a disputé, il y a une quinzaine d’années, trois matchs avec le Stade toulousain sur la pelouse basque. C’était entre 2004 et 2007, pendant les années au cours desquelles, d’avis d’anciens, l’ambiance était la plus chaude. Il se remémore : "C’était sympa de le "subir". Quand le public se met à chanter, ça donne les frissons. Quand on est adversaire, on sent qu’il va y avoir un gros combat, ça prépare à l’affrontement, ça renvoie beaucoup d’énergie." Francis Salagoïty souligne : "J’ai vu des présidents adverses, assis à côté de moi, ou des hommes politiques la chanter à l’entrée des joueurs."

Pour les médias, aussi, la Peña Baiona est une chance. Une vidéo de celle-ci, tournée un soir de novembre 2016 par les caméras de Canal +, lors d’un match entre Clermont et Bayonne et diffusée sur la page Facebook du "Canal Rugby Club", a été vue par plus d’1,4 millions de personnes. "Le Vino a eu une énorme résonance pour tous les gens qui ne sont pas de Bayonne", analyse Géraldine Houzeau, responsable communication du club entre 2014 et 2018. Comme toutes les bonnes choses, il ne faut pourtant pas en abuser. Ainsi, les actions de communication autour de cet air, bien qu’intéressantes en termes de retombées, ne doivent pas être utilisées à outrance. Houzeau toujours : "Autour d’un derby, on ne se pose pas la question, c’est oui. C’est comme quand on revient en Top 14, nous savons qu’entendre la Peña sera le moment tant attendu par tous les téléspectateurs." L’hymne des supporters de l’Aviron, comme Pottoka sont, d’ailleurs, bien plus connus en France que les trois quarts des joueurs de l’effectif. Certains n’accordent pas la moindre importance à ce sport dont ils n’ont jamais regardé une seule minute mais connaissent cet air par cœur.

Tradition et voyages

Le "Vino" berce, enflamme et laisse des souvenirs impérissables. "Quand il y a eu les projets de fusion, en tant que supporters - et moi en tant que président des socios, raconte aujourd’hui Manex Meyzenc, nous avons mis en avant Pottoka et l’hymne parce qu’ils voulaient les abandonner. Nous leur avons dit que c’était notre patrimoine, que c’était une hérésie de vouloir abandonner tout ça." Il fait partie de la culture bayonnaise. Yannick Bru appuie : "Quand tu es adversaire, tu te dis que c’est rigolo, que c’est un clin d’œil à la tradition. Quand tu commences à connaître les gens, tu sens que c’est quelque chose de puissant auquel ils sont attachés. J’ai compris que c’était un chant à part. Avant le match, c’est celui-là. Après, ç’en est un autre. Il ne faut surtout pas inverser les choses. Le poids des traditions est important ici, je l’apprécie d’autant plus."

"Il y a beaucoup de Basques en Argentine. L’ambiance dans les stades de foot est très festive. Quand je rentrais sur le terrain et que j’entendais tous les bruits, j’avais l’impression d’être là-bas", développe Martin Bustos Moyano. "C’est le passeport de l’Aviron bayonnais à l’international, appuie Bru. Des gens en Afrique du Sud, qui n’étaient pas des spécialistes du rugby, m’ont dit : "Ah ! Bayonne, c’est la chanson allez, allez…" Et ils se mettent à fredonner l’air. C’est la marque Aviron. Plus que les résultats du club, les gens connaissent la Peña Baiona." "Je l’ai entendue au Japon pendant la Coupe du monde", ajoute Vincent Etcheto. "Moi, dans pratiquement tous les stades dans lesquels j’ai joué, complète David Roumieu. Elle booste beaucoup de gens."

Elle est devenue plus qu’un hymne. Aujourd’hui, c’est le symbole d’une identité, un support de communication, un vecteur de souvenirs, un créateur de lien social, une passerelle entre générations, un moment de partage et un chant entraînant, ne l’oublions pas. Aujourd’hui, Bayonne rime avec Peña et la réciproque vaut aussi. "Pour moi, elle commence dans les rues du petit Bayonne avant les matchs et s’y prolonge après, sourit Etcheto. Au départ, elle ne m’emballait pas, je l’avoue. Au moment où elle a été créée, l’Aviron jouait au même rythme, à deux à l’heure. Et puis les supporters ont su cristalliser autour d’une chanson, d’une ambiance. Elle résume les amoureux de l’Aviron."

Boutaty : "Si l’Aviron, un jour, arrive à se qualifier…"

Élu meilleur public de Top 14 en 2006, le peuple ciel et blanc s’est forgé une place à part dans le monde du ballon ovale. "Comme en tauromachie, ils ont besoin de sentir que les joueurs sont à la hauteur de ce qu’ils veulent", explique Yannick Bru. "Ils taquinent et peuvent être durs envers l’arbitre, se rappelle Arganèse. Ils ont cette faculté à avoir des traits d’humour, quand on voit ce qu’ils faisaient pour Imanol Harinordoquy."

Vincent Etcheto, encensé par tout un territoire après la remontée en Top 14 (2016) avant de subir les foudres l’année suivante lors de la relégation, sait que les avis changent vite, dans sa ville natale. "C’est pour ça que je ne suis pas dithyrambique. C’est un public avec ses qualités, qui sont très hautes, et ses défauts, qui le sont aussi. Il oublie vite, il est versatile et, parfois, il omet que le rugby est un jeu, un plaisir." La passion peut parfois s’avérer débordante, poussant aux excès. On dit que quand Bayonne gagne, les commerçants de la ville se portent bien et que l’humeur des habitants s’en ressent. Quand les Ciel et Blanc enchaînent les défaites et les mauvais comportements sur le pré, en revanche, la situation peut se crisper brusquement. "Des gens sont inconditionnels et ils ont, parfois, des mots qui dépassent le simple cadre du sportif. C’est regrettable mais ça reste des cas très isolés", précise Grégory Arganèse. "Il n’y a pas eu beaucoup de résultats positifs quand je jouais mais pour ce public, il ne faut pas grand-chose, loue Boutaty. Si l’Aviron, un jour, arrive à se qualifier pour la Champions Cup, il va y avoir le feu à Bayonne." Et la Peña Baiona résonnera alors plus fort encore.

Vous êtes hors-jeu !

Cet article est réservé aux abonnés.

Profitez de notre offre pour lire la suite.

Abonnement SANS ENGAGEMENT à partir de

0,99€ le premier mois

Je m'abonne
Voir les commentaires
Réagir
Vous avez droit à 3 commentaires par jour. Pour contribuer en illimité, abonnez vous. S'abonner

Souhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?