Pour l'amour de Béziers

  • Christophe Dominici
    Christophe Dominici Anthony Dibon / Icon Sport - Anthony Dibon / Icon Sport
Publié le Mis à jour
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L'édito d'Emmanuel Massicard... L’ASB comme le PSG. Depuis que Christophe Dominici a officialisé son projet de reprise du club de Béziers avec le soutien d’un riche et discret investisseur, le rugby héraultais se prend à rêver de pouvoir imiter le phare du football français, en quête de puissance économique. Nous en sommes à des années-lumière. Toutes proportions gardées, ce n’est clairement pas demain la veille que nous verrons Béziers rivaliser avec l’ogre parisien, ses stars et sa démesure.

Pourtant, à l’échelle du monde ovale, où les droits télévisuels sont dix fois inférieurs à ceux du sport roi et où les plus gros salaires n’atteignent pas le Smic du ballon rond, l’annonce du possible rachat d’un de nos bastions historiques ne passe pas inaperçu. Et pas simplement parce que Béziers peut devenir le premier club à concrétiser les vœux - jusqu’ici pieux - de nombreux autres clubs du Top 14 ou de ProD2 qui ont, ces dernières années, lorgné l’Asie ou le Moyen-Orient en quête de mécènes et donc de supers pouvoirs sportivo-économiques.

Il faut se réjouir de voir qu’un tel club, collectionneur de Brennus (onze), porteur d’une culture solidement ancrée dans son territoire et formateur de très nombreux talents à travers les époques, suscite les convoitises. Même en Pro D2. La mariée est encore belle, sauvée des affres il y a quelques années par Cédric Bistué et Pierre-Olivier Valaize, les coprésidents qui l’ont portée jusqu’ici. La promesse du rachat pour un euro symbolique ne pourra pas faire oublier leurs engagements. Pas plus qu’elle nous fera croire au sauvetage miraculeux. Il s’agit bien d’une reprise, opportuniste.

Jusqu’à preuve du contraire, le Béziers de 2020 n’a pas les mêmes difficultés du Stade français de 2011 qui, au bord du gouffre, s’était laissé arnaquer par la Facem, fumeuse société canadienne qui devait apporter 12 millions d’euros pour sauver le club parisien et qui l’avait finalement laissé en crise. L’ASBH, elle, semble encore avoir le choix. Alors, avant que l’affaire soit actée, le discret ami messie émirati de « Domi » doit jouer à livres - de comptes - ouverts. Nous en saurons plus, donc, dans quelques jours.

En attendant, réjouissons-nous donc avec la perspective qu’un investisseur réveille de vieux fantasmes sur les bords de la Méditerranée où l’on se prend à rêver de reconquête sportive et de grands soirs. C’est une bonne nouvelle pour Béziers et ses supporters, eux qui vont reprendre des couleurs. Et c’est aussi une bonne nouvelle pour le rugby qui, à moindres frais par rapport à d’autres disciplines, attire toujours les ambitieux.

Pour autant, tout n’est pas rose avec ce projet qui ferait débarquer un mécène de plus sur l’échiquier du rugby professionnel français déjà bien fourni dans le genre. C’est la promesse d’un nouvel afflux d’argent facile pour verrouiller la soif de titres rapides et de besoin d’explosions de joies toutes aussi précoces. C’est enfin la promesse de salaires à la hausse qui viendront doper une économie factice et prolonger la carrière d’anciennes gloires étrangères sur le retour plutôt que d’offrir du temps de jeu aux gamins du centre de formation rouge et bleu ou ceux des clubs à l’entour.

Voilà tant de dérives et les fameux vices du modèle qui feront valser les promesses du monde d’après. Autant en apporte le mécène…

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