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Guirado : « J'espère une prise de conscience » (3/3)

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    Guirado : « J'espère une prise de conscience » Icon Sport
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Mercredi, entre deux sessions de révision et sur fond de jeux d’enfants, Guilhem Guirado nous a accordé plus d’une heure d’entretien pour évoquer trois sujets qui lui tiennent à cœur : la vie hors rugby, entre famille et études, son nouveau défi à Montpellier et sa décennie en Bleu. Le talonneur, qui fêtera ses 34 ans mercredi, s’est livré, avec la franchise et l’humilité qui le caractérisent.

Comment avez-vous géré votre confinement, ces moments de vie sans rugby ?

Ça a été un arrêt brutal, sportivement parlant, mais je suis content car cette période a été enrichissante. Ce n’était pas facile à aborder mais ma famille l’a bien surmontée. Nous sommes restés soudés et chacun a réussi à trouver sa place. Ça a permis de se recentrer sur ce qui est vraiment important. En tant que rugbyman, je sais que je suis privilégié et je ne veux pas me plaindre de ma situation. Mais avec nos carrières, on passe à côté de certains instants du quotidien ou de moments charnières de la vie privée. À ce niveau, le confinement a été opportun : j’ai pu cuisiner en famille, avoir du temps pour jouer avec les enfants… Ça a amené à se remettre en question sur plein de choses. Et puis, j’ai bien avancé sur les études. C’est une grosse satisfaction.

Parlez-nous de ce double projet…

À l’origine, j’avais un DUT en gestion logistique et transport. Je m’étais arrêté à Bac + 2. Je n’avais pas pu continuer car le rugby me prenait énormément de temps, surtout quand j’ai commencé à partir en équipe de France. J’avais donc délaissé tout ça mais sans jamais perdre de vue les études. J’avais toujours cette idée dans un coin de la tête. J’ai finalement repris l’année dernière. Ça s’est fait par opportunité : j’avais réalisé plusieurs conférences pour l’Edhec de Nice, une école de commerce. Le directeur m’a fait l’éloge du programme de Bachelor Business Management. Il m’a convaincu et je me suis lancé. Bon, j’ai rapidement pris du retard avec la Coupe du monde mais j’ai pu le rattraper lors du confinement. J’ai réussi à valider quelques matières et j’ai d’autres examens à venir. J’espère aller en quatrième année.

Quelle reconversion avez-vous en tête ?

Je n’ai pas encore d’idée précise de ce que je vais faire mais ça ne peut être que profitable d’avoir un Bac + 4 pour mener un projet. Ça ouvre des portes et ça donne des atouts. Ma formation me permet d’avoir des compétences dans la gestion d’une entreprise, notamment. Ça commence déjà à m’aider sur le plan fiscal. Au moins, quand je raccrocherai, je n’arriverai pas les bras croisés, en disant : "J’ai joué au rugby." Rien qu’aujourd’hui, ça me fait déjà du bien. Mon quotidien n’était fait que de sport, de compétition, de performances. Ça élargit mon horizon. Et ça me stimule. J’ai beaucoup donné au rugby et notamment à l’équipe de France. Maintenant que j’ai arrêté la sélection et que j’ai plus de temps pour moi, je peux poursuivre un nouvel objectif. J’avais besoin de me relancer avec autre chose.

La thématique du double projet est au cœur de l’actualité rugbystique. Quel est votre message sur le sujet ?

J’espère qu’avec toute la période d’incertitude et de questionnement qu’il y a en ce moment, il y aura une prise de conscience générale. On ne peut pas vivre que de ça. Surtout, on ne peut pas miser que sur ça. Régulièrement, des jeunes qui rêvent de devenir professionnels me demandent : "Mais comment vous avez fait ?" Je leur rappelle qu’une carrière demande beaucoup d’exigences et qu’il y a aussi une part de réussite qui ne se contrôle pas. Il ne faut donc pas s’en rendre dépendant. Si vous réussissez sportivement, tant mieux, c’est génial. Mais faites autre chose à côté aussi, projetez-vous, ça ne pourra que servir. En plus, si vous ne pensez et mangez que rugby, ça peut finir par être contre-productif et gâcher le plaisir qui reste la base. Les parents, aussi, ont une responsabilité : ils ont tendance à retourner le cerveau des enfants. Heureusement, les miens ont toujours su me faire garder les pieds sur terre.

Pour le bien des rugbymen, faut-il réinventer le professionnalisme d’aujourd’hui ?

En tout cas, c’est dur de demander aux pros d’être le plus performants possible tout en trouvant du temps pour mener de front des études. Personnellement, si j’avais dû reprendre au beau milieu de ma carrière, je ne sais pas si j’y serais arrivé. Il y a énormément de contraintes avec notre métier et c’est normal vu les attentes placées en nous. Tout compte fait, il vous reste un seul vrai de jour de repos par semaine en général. Si vous devez rattraper un cursus sur le peu de temps disponible, quand est-ce que vous vous reposez ? Mentalement et physiquement ? Pour l’heure, un rugbyman reste professionnel avant tout, il faut bien l’avoir en tête. Ce n’est plus le rugby d’avant ou tu avais deux entraînements par semaine. Mais je pense qu’il est possible de trouver un modèle viable, en collaborant avec des écoles, en adaptant les formations sur la durée…

Avez-vous le sentiment que les joueurs de votre génération ont anticipé la suite ?

Parfois, on se demande ce que l’on va faire après, comme ça, de manière informelle… Certains ont déjà un métier précis en tête, d’autres se posent des questions, cherchent. Et il y en a d’autres pour qui l’on comprend que c’est l’inconnu et qui vont finir par se demander arrivé à 35 ans : "Mais qu’est-ce que je vais faire ?" C’est dans ces cas-là où il ne faut pas hésiter à se tourner vers le syndicat, par exemple, pour avoir une aide. Sinon, ça peut vite se compliquer.

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