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Califano : « C'était l'époque où ma fontanelle ne s'était pas encore bien refermée... » (1/2)

  • Christian Califano a joué dix ans au Stade toulousain, de 1991 à 2001
    Christian Califano a joué dix ans au Stade toulousain, de 1991 à 2001 AFP
Publié le Mis à jour
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Aujourd'hui bien ancré dans le monde des consultants télévisuels, il a été l'un des piliers les plus connus de son époque. L'ancien international Christian Califano revient sur son acceptation de la critique, les adversaires qui l'ont marqué et son arrivée insolite au Stade toulousain. 

Dans un récent numéro de Midi Olympique, Benoit Pensivy, l’un de nos anciens journalistes, racontait que vous aviez failli en venir aux mains dans un vestiaire lors d’un match en Irlande après un de ses articles. Racontez- nous !

(Il se marre franchement) C’était une période où nous n’étions pas au mieux avec le Stade toulousain. Nous sortions d’une forme de suprématie avec quatre titres de champion de France, nous commencions à être chahutés sportivement, notamment par le Stade français. Nous vivions très mal les premières critiques. Benoît (Pensivy) qui a une très bonne plume, avait su déceler nos difficultés. Je me souviens très bien de ce jour-là mais, en revanche, je ne sais plus s’il était entré seul dans ce vestiaire ou si quelqu’un l’avait poussé (rires). Il s’était retrouvé au milieu et ne s’était pas dégonflé. La discussion avait été vive. Quand je lui avais demandé s’il voulait qu’on s’explique vraiment, il avait tombé la veste. Il m’avait un peu bluffé. Finalement, c’est devenu un ami.

Justine Heymans, elle aussi ancienne journaliste de Midi Olympique, raconte dans une chronique que vous lui avez envoyé Franck Tournaire car elle avait écrit quelque chose qui vous avait déplu... En clair, vous ne supportiez pas la critique ?

Quand j’étais jeune et con, je ne supportais pas la critique, effectivement. Je n’étais pas le seul. Les joueurs qui affirment ne pas lire la presse sont des menteurs. À l’époque, je disais toujours que je ne lisais pas Midol. En vérité, le lundi matin j’étais le premier à la librairie pour l’acheter. Limite, j’aidais à les mettre en place dans les rayons ! (rires) Dès 7 heures du mat’, j’avais lu la moindre rubrique, surtout celle des étoiles pour être sûr que j’en avais une. Bref, rien ne pouvait m’échapper. C’était l’époque où ma fontanelle n’était pas encore bien refermée (rires). Tout le monde t’encense quand tu es bon et que tu gagnes mais dès que ça va moins bien, les critiques fusent. J’ai mis du temps mais j’ai fini par l’accepter.

Étiez-vous méchant sur un terrain ?

Absolument pas. J’ai connu des mecs beaucoup plus méchants et beaucoup plus fous que moi. J’ai malheureusement quelques faits d’armes à mon actif et qui peuvent prouver le contraire mais je n’étais ni bagarreur ni un gros parleur. Pour moi, un mec qui parlait sur un terrain, il perdait son temps. Personnellement, j’avais envie de jouer. Ma plus grande appréhension avant d’entrer sur un terrain, c’était de mal faire.

Qui étaient ces joueurs plus méchants, plus fous ?

J’ai grandi grâce à deux joueurs qui étaient mes idoles. Il y a d’abord eu Manu Diaz, et ensuite Claude Portolan. Deux joueurs aux registres très différents. Manu (Diaz) était quand même l’homme le plus craint au monde. Il a fait échapper pas mal de types...

Qui d’autres ?

Des clients, j’en ai rencontré quelques-uns… L’un de ceux qui m’ont le plus marqué ne parlera pas à grand monde. C’était en cadets, lors d’un match contre Romans avec le RCT. Le mec s’appelait Stéphane Mandier. Habillé, crampons compris, il devait peser 80 kg. Pourtant, j’ai souffert le martyre. Ce type était une table basse. Impossible à bouger. Avec Marc de Rougemont, qui était notre talonneur, on se pose encore parfois la question aujourd’hui : comment ce gars-là, avec tout ce qu’on a pu lui faire, n’a jamais bronché ? J’ai pourtant affronté des Crenca, des Casadéi et d’autres. Mais ce Stéphane Mandier, je m’en souviendrai jusqu’à ma mort.

Et au plus haut niveau ?

Carl Hayman est celui qui m’a le plus impressionné. J’ai joué mes deux dernières sélections avec les Bleus face à lui (tournée en Nouvelle-Zélande 2007, N.D.L.R.). Je peux vous jurer que j’ai eu mal (rires). Après le dernier match joué face à lui, j’ai mis deux mois à remarcher normalement. Quelques semaines plus tard, quand je suis revenu en club -à l’époque je jouais à Gloucester- j’ai ouvert la porte du vestiaire et je me suis retrouvé face à Olivier Azam et Patrice Collazo. Ils m’ont regardé, n’ont pas dit un mot et ont éclaté de rire. À aucun moment, ils ne m’ont demandé si j’allais bien. Aujourd’hui encore, ils me chambrent avec cette anecdote. Vraiment, j’avais vécu l’enfer. Et dans les règles, s’il vous plaît.

Avant de vous rabibocher, vous avez aussi vécu des moments de fortes tensions avec Sylvain Marconnet. Pourquoi ?

Au départ, c’était l’antagonisme Paris-Toulouse, tout simplement. Rappelez-vous que le Stade français nous file quarante points en 1998 en demi-finale (39-3). C’est peut-être la défaite qui m’a le plus marqué, avec celle contre les Wasps en Coupe d’Europe (77-17, 1996). Ensuite, avec Sylvain, une rivalité s’est aussi installée en équipe de France. Il a débarqué en 1999 après ma suspension (coup de tête contre les Fidji). À l’époque, je l’avais très mal vécu. Certains m’avaient pas mal chambré. Du coup, les retrouvailles étaient souvent chaudes entre nous. Mais c’est du passé. Aujourd’hui, dès qu’on se croise, c’est un vrai plaisir.

Ce coup de tête de 1999 contre les Fidji vous prive d’une belle aventure jusqu’en finale du Mondial. Le regrettez-vous encore aujourd’hui ?

Je ne peux m’en prendre qu’à moi-même. Bien sûr que j’ai les boules ! Ce qu’ont fait les mecs en demi-finale contre les Blacks, c’est juste énorme. Fabuleux. Extraordinaire. Cette Coupe du monde, elle avait été quand même particulière... Il s’était passé beaucoup de choses. La tension était forte et j’avais craqué sur ce match contre les Fidji. En revanche, j’aimerais un jour qu’on m’explique comment j’ai pu écoper de sept semaines de suspension quand mon pote Fabien Pelous n’a pris que 24 heures. Je vous rappelle que j’avais filé un pseudo-coup de "pastèque" en m’écrasant sur l’épaule d’un joueur fidjien, quand "mon" Fabien avait passé le type à la machine à laver ! Ce n’était pas un rucking, ni un stamping. Il avait lui fait un "combo" ! La totale.

Avait-il un meilleur avocat devant la commission de discipline ?

Je pense surtout que cet enfoiré est un meilleur politique que moi (rires).

Avec le Stade toulousain, vous avez remporté six titres de champion de France et une Coupe d’Europe. Qu’en retenez-vous aujourd’hui ?

Uniquement le positif. À Toulouse, j’ai eu la chance de croiser la route de Robert Labatut et Daniel Santamans. Sans eux, il n’y aurait pas eu Christian Califano.

Pourquoi ?

Sans Robert Labatut, je n’aurais peut-être jamais joué au Stade toulousain.

Racontez-nous.

Quand j’ai quitté Toulon, j’ai choisi de signer dans un très beau petit club, à Bourges. Au bout de trois semaines d’entraînement, le président Monsieur Boudet m’appelle pour me dire qu’il a reçu un coup de téléphone du patron de la marque "Liberto", très en colère. Soi-disant, je serais descendu à Toulouse pour prendre 5 000 francs de vêtements dans une boutique et je n’aurais pas payé. Autant vous dire que je suis tombé des nues.

C’était faux ?

Bien sûr. Mais ça m’a fait fondre les plombs. À l’époque, il me manquait quand même quelques minutes de cuisson (rires). J’ai dit au président de Bourges que c’était faux et que ce mec j’allais le fendre en deux. Il m’a donné son numéro et je suis parti directement dans une cabine téléphonique. J’ai mis cinq francs dans la machine. Dès qu’il a décroché, je lui ai mis une séance "à la toulonnaise". Je lui ai dit de tout, que j’allais le crever, qu’il me faisait passer pour un voleur. Je vous passe les insultes et autres. Ça a duré dix minutes. À un moment, il me dit : "c’est bon, t’as fini ?" Du coup, surpris, je me dis que ce mec est vraiment dingue. En fait, c’était Robert Labatut qui cherchait à me contacter pour me recruter.

C’est incroyable cette histoire…

Je ne savais plus quoi dire… Je me suis retrouvé comme un con. Il m’a expliqué qu’il n’avait pas compris mon choix de partir de Toulon et qu’il voulait me rencontrer. On s’est vu deux, trois jours après et voilà comment j’ai atterri à Toulouse. C’était quand même un club qui me faisait rêver. C’était l’époque des Charvet, Cigagna, Portolan, des mecs que je badais ! Dans cette histoire, je tiens aussi à saluer l’élégance du président de Bourges.

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