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Le Roux : « Je me suis entraîné à plaquer les moutons dans la ferme de ma mère »

  • "Je me suis entraîné à plaquer les moutons dans la ferme de ma mère"
    "Je me suis entraîné à plaquer les moutons dans la ferme de ma mère"
Publié le Mis à jour
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Bloqué en Afrique dus Sud lors de l’instauration du confinement, Bernard Le Roux n’a repris le chemin du centre d’entraînement du Racing 92 que lundi dernier, son sourire XXL toujours solidement accroché à ses lèvres. Il a accepté de revenir sur cette période inédite, vécu dans la ferme familiale. Mais pas seulement. Le retrait de Jefferson Poirot, il en parle aussi très librement. S’il regrette le choix du pilier de l’UBB, il le comprend forcément.

Pourquoi n’avez-vous repris l’entraînement que lundi dernier ?

Je suis resté bloqué en Afrique du Sud. En fait, j’étais parti voir ma famille juste après le Tournoi des 6 Nations car j’avais une semaine de vacances. Et quand le confinement a été annoncé en France, j’étais chez ma mère, à la ferme. Ensuite, l’Afrique du Sud a également mis en place la même mesure. Il a été très compliqué de trouver un vol retour.

À ce point-là ?

Les trois premiers vols que j’avais réservés ont été annulés au dernier moment en raison de la fermeture des frontières. Pendant deux mois, j’ai cherché des solutions pour rentrer. Mais impossible. Avec d’autres joueurs sud-africains comme Kolbe, Etzebeth ou Elstadt, nous avons même essayé de voir s’il était possible d’affréter un vol privé mais c’était compliqué. Nous avions créé un groupe whatsapp pour échanger et trouver une solution. Finalement, nous avons fini par trouver un vol avec KLM la semaine dernière.

Comment avez-vous vécu cette période de confinement ?

Au début, ça a été un peu difficile car je n’avais fait ma valise que pour une semaine de vacances en Afrique du Sud. Finalement, j’y suis resté trois mois (rires). Plus sérieusement, cela faisait onze ans que je n’avais pas pu profiter autant de ma famille. Ma sœur, qui travaille en Chine s’est retrouvée dans la même situation que moi. C’était donc un vrai bonheur de passer autant de temps avec ma mère, ma sœur et mon frère. C’était chouette de se retrouver tous ensemble à la ferme. Nous n’avons pas vraiment souffert. Au contraire. J’ai joué à l’agriculteur, j’ai chassé, j’ai fait de la moto. J’avoue : je n’ai pas fait beaucoup de musculation mais je me suis pas mal entraîné. Je courrais cinq ou six fois par semaine. En plus, pour moi, j’ai profité de l’été en Afrique du Sud. D’habitude, quand j’y passe mes vacances, c’est l’hiver (rires).

Dans quel état physique vous trouvez-vous ?

J’ai dit hier (lundi) à "Toto" (Laurent Travers) que pour la première fois depuis onze ans je n’avais aucune douleur. Ni le dos, ni les genoux. Pas même un orteil. D’habitude, après quatre semaines de vacances, je reviens quand même avec quelques petits pépins toujours pas guéris. Là, pour une fois, rien du tout. Tous les voyants sont au vert. C’est le point positif de ce foutu virus, même si je sais que pour le pays c’est une période très difficile.

Le rugby vous a-t-il manqué ?

Ah oui ! L’ambiance avec les potes, toucher du ballon, discuter avec les uns et les autres. J’étais très heureux de remettre les pieds au Plessis (le centre d’entraînement du Racing 92). Mais j’ai quand même attrapé quelques moutons à la ferme pour ne pas perdre l’habitude du plaquage (rires). J’avoue quand même que ce n’est pas pareil… J’ai aussi regardé beaucoup de matchs, notamment ceux du Tournoi des 6 Nations. J’ai pris des notes sur les secteurs que l’on peut améliorer. J’ai commencé à m’intéresser aux nouvelles règles mises en place. Pour ça, je regarde les matchs de l’hémisphère Sud pour bien comprendre ce qu’attendent les arbitres et ne pas commettre de faute à la reprise.

Êtes-vous resté en contact avec le staff de l’équipe de France ?

J’ai vu Vlok Cillier (entraîneur du jeu au pied du XV de France, N.D.L.R.) en Afrique du Sud. J’ai eu aussi beaucoup d’échanges avec lolo (Laurent Labit), Karim (Ghezal). D’abord, pour prendre des nouvelles des uns et des autres. Mais aussi pour discuter des améliorations que l’on peut mettre en place.

Ne craignez-vous pas que cette période marque un coup d’arrêt dans le renouveau du XV de France ?

Je ne crois pas. Tous les pays, toutes les équipes ont été logées à la même enseigne. Et nous avons la chance d’avoir un super groupe avec beaucoup de jeunes mecs très motivés, très ambitieux. Personne ne fait le beau, personne n’a la grosse tête. Nous avons les pieds sur terre, nous savons par exemple que nous avons tous fait une erreur contre l’écosse lors du Tournoi des 6 Nations. Mais, j’ai le sentiment que tout se passe. Et il n’y a aucune raison, si on continue à travailler comme on l’a fait, que ça ne continue pas.

Avez-vous envie de conclure le Tournoi des 6 Nations à l’automne prochain ?

Bien sûr. Depuis que je suis en équipe de France, c’est la première fois qu’on fait un si bon Tournoi. J’espère qu’on va aller au bout.

Comprenez-vous la décision de Jefferson Poirot qui a décidé de stopper sa carrière internationale, notamment pour passer plus de temps en famille ?

D’un côté, je comprends très bien. L’équipe de France, c’est beaucoup de voyages, de pression, de sacrifices. De l’autre, je comprends moins le choix de Jeff. Pour moi, le maillot bleu est très important. Mais c’est sa décision et je la respecte. Je la regrette car c’est un excellent joueur, un super mec que j’adore. Il était un de nos leaders en équipe de France. Il va nous manquer.

Est-ce si difficile à vivre ?

C’est parfois compliqué, frustrant, mais ça fait partie du job. J’ai une petite fille de quatorze mois et pour la première fois, grâce au confinement, j’ai vraiment pu en profiter pleinement. Entre le Tournoi des 6 Nations, la Coupe du monde et sa préparation, je ne l’avais pas vu pendant presque huit mois. J’ai raté beaucoup de choses durant cette période, notamment son premier anniversaire. J’ai donc un peu rattrapé le temps perdu.

Allez-vous essayer de le convaincre de changer d’avis ?

J’aimerais bien qu’il revienne sur sa décision. C’est sans doute trop tôt mais c’est quand même un joueur important dans notre groupe. Je pensais même qu’il serait notre nouveau capitaine après le Mondial. Vraiment, il va nous manquer.

Comment s’est déroulée votre reprise au Racing 92 ?

Dès que je suis rentré, je suis allé faire la prise de sang, le test nasal pour le Covid 19 et toute une batterie de tests. La bonne nouvelle, c’est que nous sommes tous négatifs. C’était donc une reprise tranquille avec un peu de footing, un peu de musculation.

Comment avez-vous vécu l’arrêt des compétitions ?

Je comprends que l’intérêt du pays prime sur le sport. La santé des gens, c’était le plus important. Mais j’ai été très déçu de ne pas pouvoir aller au bout de la compétition, notamment en Coupe d’Europe. J’espère vraiment que nous allons pouvoir disputer la phase finale de la Champions Cup, même si certains joueurs ne peuvent pas la jouer avec nous. C’est vraiment regrettable car ils ont fait le boulot pour y être mais entre-temps, ils auront changé de club.

Avez-vous le sentiment, vous qui avez franchi la trentaine, d’avoir perdu du temps ?

Au contraire, j’ai le sentiment que ça m’a offert deux années de plus. Je ne me suis jamais senti aussi bien physiquement. Je suis frais, je n’ai pas de douleur. Et puis, j’aime voir le côté positif des choses. Mon objectif, c’est de faire la Coupe du monde 2023 en France. Cette période d’inactivité est peut-être une aubaine pour l’atteindre.

Vous portez les couleurs du Racing 92 depuis 2009. Comptez-vous y finir votre carrière ?

C’est mon rêve ! Je suis sous contrat jusqu’en 2022 mais j’espère bien pouvoir en signer un dernier et terminer ma carrière sous les couleurs du Racing. Ce club, c’est ma deuxième famille. Je m’y sens bien. Je le dois à Pierre Berbizier. C’est lui qui m’a fait venir. Au départ, je ne devais rester que trois mois. Finalement, ça fait onze ans que je suis là… Et pas une seule seconde, je n’ai eu à regretter mon choix.

"Pour la première fois depuis onze ans je n’ai aucune douleur. Ni le dos, ni les genoux. Pas même un orteil. D’habitude, après quatre semaines de vacances, je reviens quand même avec quelques petits pépins toujours pas guéris (...) C’est le point positif de ce foutu virus."

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