Guillon : « Ce qui m’intéresse, c’est de faire en sorte que l’ASM survive et il va falloir se bouger »

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    Jean-Michel Guillon Photo : ASM
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Nommé il y a huit jours à la présidence de Clermont, l’ancien DRH de Michelin a effectué sa traditionnelle présentation à la presse, le lendemain. Que faut-il en retenir ? Derrière le discours et la discrétion du personnage.
 

Difficile d’en savoir beaucoup plus, à ce stade, sur la personnalité de Jean-Michel Guillon qui, mercredi dernier, a officiellement succédé à éric de Cromières à la tête de l’ASM Clermont Auvergne. Il y a ce que donne internet et qui a déjà été dit partout : ancien « Directeur du personnel », comprenez DRH  de la maison mère Michelin, un temps dans les rails pour succéder au P.-D.G. Dominique Sénard (parti remplacer Carlos Ghosn à Renault). Finalement devancé par Florent Menegaux qui s’empressait de l’écarter, aussitôt nommé à la tête du géant du pneumatique. C’est la loi du genre, dans ces hautes sphères.
De DRH, Jean-Michel Guillon devenait donc en 2019 « directeur de l’innovation et des partenariats ». Un poste à échelle planétaire, toujours. Sur le papier, ça continue d’en jeter. Dans les plus hautes sphères d’une multinationale, ce reclassement s’apparentait toutefois à un déclassement, après avoir été directeur général exécutif et présidé au destin professionnel de 110 000 personnes, à travers 171 pays.

Que dire de plus, sur Jean-Michel Guillon ? Il est le père de trois enfants « âgés de 21 à 24 ans », a fait ses études de commerce à Nancy et n’a connu qu’une entreprise, Michelin. Comme une deuxième maison, à laquelle il fut fidèle pendant 37 ans.
Pour la marque de pneumatique français, il aura opéré en France, au Brésil, en Suède, en Allemage et aux États-Unis. « J’ai eu la chance de rencontrer mon épouse en Suède, elle est Suédoise. » Sa jeunesse s’est solidement formée aux voyages professionnels. Sa famille s’y est forgée.

Passés cet état de service assez superficiel, Jean-Michel Guillon dit ceci de lui, sur ses réseaux sociaux professionnels : « Quand j’ai rejoint le groupe Michelin en 1982, une phrase m’a beaucoup marqué : « Deviens qui tu es. » Cette promesse m’a inspiré tout au long de ma carrière chez Michelin, tout d’abord dans différentes fonctions commerciales occupées dans différents pays (France, Suède, Allemagne, états-Unis) et plus particulièrement dans mon rôle de Directeur du Personnel du Groupe. Le terme de « Personnel » au lieu de Ressources Humaines a lui aussi son importance. Il exprime et rappelle toute l’attention que nous portons chez Michelin aux personnes qui sont au cœur de la performance du Groupe. » Voilà pour le versant « communication ».

Délégation et institutions 

Pour le comprendre un peu plus, il y a ces mots. Jeudi dernier, au lendemain de sa nomination à la présidence de l’ASM, Jean-Michel Guillon était officiellement présenté à la presse. Un exercice collectif et préparé à la hâte, face à la quantité de demandes d’interview qui affluaient. Objectif du moment : se présenter en personne, bien sûr, mais distiller surtout les premiers éléments de langage. Instructif, quand on les lit plus attentivement.

Au jeu de l’analyse sémantique, on notera donc que Jean-Michel Guillon a déjà tracé plusieurs grandes lignes, dans un style direct et déterminé. Et établissant d’abord une forme d’urgence. « Dans le contexte actuel de l’économie du rugby, je ne suis pas sur les projets. Ce qui m’intéresse, c’est de faire en sorte que l’ASM survive et il va falloir se bouger. » Un vocabulaire sans ambage. Ensuite ? Il est question de délégation, son dada. « Jean-Michel Guillon a mis en œuvre une de mes volontés les plus chères : la responsabilisation des équipes » disait de lui Jean-Dominique Sénard, ancien P.-D.G. de Michelin (désormais celui de Renault) au moment de remettre à Guillon le prix de « DRH de l’année 2018 », attribué par Le Figaro.

Cette croyance en « la responsabilisation des équipes », Guillon compte bien l’exporter dans les murs de l’ASMCA, dont il était administrateur de la SASP depuis un an. « Ce qui m’intéresse dans le contact avec les personnes et les joueurs, c’est comment aider le collectif et Franck (Azéma). […] Le patron du sportif, ce n’est pas moi. C’est lui. » Ou encore : « Mon rôle c’est de créer les conditions de cette performance sur le terrain. » Rien de franchement nouveau, dans l’univers clermontois. Éric de Cromières, actif sur le front de la Ligue, laissait largement de la place à ses collaborateurs pour s’exprimer en interne. Il traçait les grandes lignes de sa politique, portait quelques projets personnellement mais, dans la grande majorité, il ne mettait pas le nez dans les dossiers sportifs. À tour de rôle ou en collaboration, ce sont Jean-Marc Lhermet, Neil McIlroy et Franck Azéma qui tenaient ces responsabilités, larges, du projet de jeu au recrutement en passant par la gestion des prolongations de contrat.
Cette situation ne devrait donc pas évoluer. Guillon, quant à lui, devrait rapidement fixer un cap pour le club à long terme. Avant d’enfiler son costume de président du côté des institutions. « Il faut que ce club ait sa voix, comme elle l’avait avec Éric, dans un contexte national et international pour que le rugby et ses valeurs vivent. » C’est ici, plus sûrement, que Jean-Michel Guillon sera le plus rapidement actif. Laissant les affaires internes administratives à la charge de Jean-Luc Loignon (directeur administratif) et sportives à Franck Azéma (directeur sportif), il portera la voix de l’ASM au niveau institutionnel. Un mode de fonctionnement qu’avait épousé éric de Cromières et plus encore René Fontès, que l’on savait peu présent au club, au quotidien, mais qui avait en revanche pris un rôle central à la LNR.

Plus « Fontès » que « Cromières » 

Reste ses principes de communication. Jean-Michel Guillon sera-t-il un nouveau « Cromières », ou plutôt un nouveau « Fontès » ? Il cingle : « Certains m’ont déjà comparé avec les anciens présidents mais cela m’intéresse peu. » Au fil de son premier discours, le nouveau président de l’ASM donnait pourtant suffisamment d’indices pour se faire une idée. « Je serai dans la continuité d’Éric mais en termes de personnalité, je suis complètement différent et je l’assume. » Plus extraverti et avenant que son prédécesseur René Fontès, éric de Cromières ne faisait pas d’ingérence dans le sportif mais ne se gênait pas pour le commenter. Et le critiquer, ouvertement, quand il le jugeait nécessaire. La chose médiatique, disons-le clairement, ne provoquait pas chez lui l’aversion qu’elle déclenchait chez René Fontès. Guillon, à ce sujet, se situe plutôt dans cette distance et une certaine tiédeur. « Un président doit avoir une certaine distance avec ses joueurs. Ce n’est pas un copain, il faut trouver l’équilibre. […] Je ne suis pas celui qui sortira régulièrement dans les médias. Chacun doit être à sa place.

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