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Marcos Kremer n'a rien oublié

  • Marcos Kremer (Stade français) lors d'un entraînement avec ses nouveaux coéquipiers
    Marcos Kremer (Stade français) lors d'un entraînement avec ses nouveaux coéquipiers Icon Sport - Icon Sport
Publié le Mis à jour
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Il y a deux ans, Marcos Kremer a traversé un drame personnel avant de s'installer, quelques temps plus tard, comme l'un des meilleurs rugbymen argentins. Aujourd'hui, il revient pour nous sur les grandes étapes de sa vie d'homme, l'écroulement des Jaguares et ce transfert à Paris qu'il n'avait pas vraiment anticipé...

Crise économique oblige, le mercato du Top 14 fut cette année plutôt calme. En tout état de cause, cinq stars du Sud ont seulement débarqué cet été dans le championnat de France : Will Skelton à La Rochelle, Guido Petti à Bordeaux, Kurtley Beale dans les Hauts de Seine, Kotaro Matsushima à Clermont-Ferrand et donc Marcos Kremer, dans la capitale. Lui ? Fort comme Hercule (2m et 115 kg), très percutant balle en mains et doté d'un plaquage détonant, il compte à 23 ans vingt-huit sélections chez les Pumas, une participation à la Coupe du monde et une finale de Super Rugby, disputée l'an passé avec les Jaguares. Considéré comme l'un des plus grands espoirs du rugby argentin, Marcos Kremer n'aurait ainsi pas dû quitter l'Argentine aussi vite. Il explique : « Je n'avais pas prévu, dans mon plan de carrière, de quitter l'Argentine aussi jeune. Je savais que je goûterai un jour à une expérience à l'étranger mais je pensais que ça arriverait quand j'aurai 26 ou 27 ans, pas avant... »

Comment a-t-il réagi, dès lors, le jour où la fédération argentine lui a annoncé que l'aventure des Jaguares était terminée jusqu'à nouvel ordre, en raison de la pandémie ? « Ce fut un choc, poursuit-il. Très vite, les dirigeants nous ont aussi dit que si nous voulions jouer au rugby à l'étranger, cela serait bénéfique car la UAR (la fédération argentine) était alors confrontée à de très gros problèmes financiers. En clair, tous les contrats n'auraient pas pu être honorés en intégralité. » Alors ? « On nous a conseillés de ne pas tourner le dos aux offres des clubs étrangers ; le but était que nous puissions nous maintenir à un bon niveau et être compétitifs, le jour où les Pumas auraient besoin de nous. » Et c'est pour quand, alors ? « On verra. Les Pumas restent en tout cas la priorité, pour moi. […] Représenter mon pays fut la plus belle chose qui me soit arrivée ces dernières années : je veux faire partie de la prochaine liste de Mario Ledesma et je veux participer au prochain Rugby Championship à l'automne, s'il est maintenu ».

A Paris depuis le 7 juillet dernier, le flanker des Pumas est naturellement toujours empreint d'une pointe de nostalgie lorsqu'il pense au pays. « Même si certains d'entre-nous ont eu la chance de partir, cette situation reste globalement très triste pour le rugby argentin : tout le travail réalisé depuis 2016 (date où les Jaguares ont intégré le Super Rugby) a en quelque sorte été jeté par la fenêtre. […] C'est dommage car nos progrès étaient réels, constants : nous rivalisions enfin avec les meilleures provinces de la planète. » Mais l'Argentine, aussi indissociable soit-elle encore de ses pensées, a également de quoi le convaincre que son choix de rejoindre à Paris Gonzalo Quesada, avec lequel il entretient « une relation très forte », était le bon. « Le fait de pouvoir rejouer au rugby à mon arrivée ici fut une vraie libération. Au pays, j'avais en effet passé 110 jours en quarantaine. Je n'avais le droit de sortir que pour faire les courses ou aller à la pharmacie. Mais par chance, j'avais là-bas un petit jardin où j'ai pu installer une toute petite salle de gym. Je ne voulais pas que mon corps se ramollisse. » Toujours contraints par le plus long confinement du monde (six mois, tout de même...), les Pumas ont néanmoins repris l'entraînement voici quinze jours. Kremer enchaîne. « Ils ont été placés dans une bulle sanitaire et ont repris l'entraînement avec contacts, à Buenos Aires. Ils ne sortent de l'hôtel que pour aller s'entraîner ; ils ne voient quasiment personne. » Malgré tout, six Pumas ont récemment été déclarés positifs au Covid. « Oui, mais ça va passer. J'espère que la bulle protégera les autres. L'Afrique du Sud, l'Australie et les All Blacks ont repris de façon normale avec leurs provinces. Les Pumas, eux, n'auront que peu de temps pour être compétitifs. »

Kremer : « Quand tu tombes, relève toi tout de suite »

Marcos Kremer, arrivé au rugby sur le tard (« Je suis le premier rugbyman de ma famille. Mon père était basketteur et j'ai découvert le rugby à 14 ans, par l'intermédiaire d'un copain du collège et après avoir fait du foot, du hand, de la natation... »), a lui-aussi été touché par le Covid 19, peu après qu'un cluster se soit déclaré au Stade français, début août. Pas de quoi le traumatiser, semble-t-il : « Oui, j'ai attrapé la maladie mais je n'ai pas eu le moindre symptôme. J'ai même continué à m'entraîner seul dans mon coin pour ne pas perdre le rythme. Aujourd'hui, je suis négatif et prêt à découvrir le Top 14, un championnat qui me correspondra ». En quel sens ? « Nico (Sanchez) et Pablo (Matera) m'ont dit que les défenses y étaient plus agressives, plus hermétiques qu'en Super Rugby. Ça me plait » En bonus, Marcos Kremer aura aussi le bonheur de croiser Eben Etzebeth, qu'il a récemment décrit dans une interview à ESPN comme l'adversaire « le plus dur » qu'il ait jamais croisé sur un terrain. Il se marre : « C'est vrai, j'ai dit ça ! Mais aussi dur soit Eben Etzebeth, il ne sera jamais aussi méchant que Tomas Lavanini ! »

Affable et attachant, Marcos Kremer, qui formera avec Sekou Macalou et Pablo Matera une des plus belles troisième-ligne du championnat (la plus belle, vous dites?), a aussi vécu un drame : il y a deux ans, alors qu'il était en tournée en Europe avec les Pumas, sa petite amie Sofia, alors étudiante en médecine, perdait donc la vie des suites d'une leucémie. Elle avait seulement 23 ans : « Ce passage de ma vie ne me quittera jamais, conclut-il à présent. Je n'oublierai jamais Sofia mais je veux désormais aller de l'avant et relever les défis que me propose le rugby. Ça me tient occupé, en fait. Ça m'empêche de ressasser le passé. Et vous savez, le rugby m'a appris une chose : quand tu tombes, relèves toi tout de suite. »

Digest

  • Né le 30 juillet 1997 à Concordia (Argentine)
  • Taille : 2m
  • Poids : 115 kg
  • Poste : deuxième ligne ou flanker
  • Clubs successifs : Concordia (2011-2014), Atletico de Rosario (2014-2016), Jaguares (2016-2019), Stade français (depuis 2020)
  • Sélections : 28
  • Points en sélection : 5 (un essai)
  • Première sélection : 10 septembre 2016 à Hamilton face à la Nouvelle-Zélande (57-22)

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