Octobre noir

  • 9th September 2020; Twickenham Stoop, London, England; Gallagher Premiership Rugby, London Irish versus Harlequins; General view of the inside of an empty The Stoop stadium captured from a remote camera 
By Icon Sport - --- - London Stadium - Londres (Angleterre)
    9th September 2020; Twickenham Stoop, London, England; Gallagher Premiership Rugby, London Irish versus Harlequins; General view of the inside of an empty The Stoop stadium captured from a remote camera By Icon Sport - --- - London Stadium - Londres (Angleterre) Actionplus / Icon Sport - Actionplus / Icon Sport
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L'édito de Léo Faure... Les portables n’en finissent plus de sonner. Et rien de bon à y entendre. - « Tu as vu, ils vont suspendre bientôt les compétitions amateurs ? » - « On reste en contact, mais au moins quatre matchs possiblement reportés ce week-end chez les pros. » - « Teddy Thomas forfait. Et Tolofua aussi ! ». Merci pour tout. On raccroche, on se pose cinq minutes et on débriefe. « Oh, les gars, pas un seul pour annoncer une bonne nouvelle ? » Si peu de choses émergent, réjouissantes, dans un monde où le lien social, le partage des émotions et des banalités les plus futiles sont devenus des ennemis à abattre. « Drôle de semaine » pense-t-on d’abord. Elle est en fait foutrement triste, dans une sémantique nettement plus appropriée.

Le contexte pèse sur toutes les strates de la société et le sport, qui craint pour la survie de son modèle, devient soudain une préoccupation lointaine. Sachez-le tout de même : dans le marasme qui se saisit de notre monde, les Bleus sont en course pour remporter un Tournoi qui ne leur a pas encore tourné le dos mathématiquement, au matin de la dernière journée. C’est suffisamment rare, dans l’histoire récente, pour faire de ce France-Irlande un rendez-vous dont on devrait se languir. Ça devrait l’être.

Rien n’y fait. Sans Hommes pour le regarder et le célébrer, sans cette proximité qui le rend utile, le sport n’a plus la même saveur. Sans plus personne pour le vivre comme un jeu, sans en faire son métier, le rugby retrouve l’ombre dans laquelle il s’est débattu pendant six mois. C’est reparti pour un tour. Démoralisant et pourtant légitime, au regard des intérêts supérieurs qui se jouent sur le front sanitaire.

Samedi, les Bleus joueront donc pour mieux qu’un titre de plus dans le Tournoi, dont ils comptent déjà 25 cocardes au revers de leur veston. Ils joueront pour l’exceptionnalité de leur cause : ces clubs amateurs mis en sommeil, et dont ils portaient déjà le nom incrusté dans le numéro de leurs maillots il y a six jours, face au pays de Galles. Ntamack sera tous les ouvreurs de France, de Carqueirane à Roubaix. Alldritt courra et chargera sur tous les stades de France, du plus râpeux synthétique de banlieue parisienne au plus délicieux champ de labour de la frontière basque.

Sans Castelnau-Magnoac, il n’y aurait jamais eu de Dupont. Pas de Fickou sans La-Seyne-sur-Mer, de Charles Ollivon sans Saint-Péé-sur-Nivelle ni d’Arthur Retière sans Nuits-Saint-Georges. Et puisque le rugby ne survit, pour quelques semaines de plus, que par le prisme d’un écran de télé et de ses meilleurs talents, leur investiture est plus grande encore. Gagner n’est plus une envie : c’est un devoir solidaire, pour remettre un peu de sourires là où la brume des restrictions sanitaires a tout noirci.

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