La dictature des cul-bénits

  • 9th October 2019, Kumagaya, Japan;  Argentina players stand for the national anthem before the Pool C Argentina versus USA game at Kumagaya Rugby Stadium during the 2019 Rugby World Cup on October 9, 2019 in Kumagaya, Japan. 

Photo by Icon Sport - --- - Kumagaya Rugby Stadium - Kumagaya (Japon)
    9th October 2019, Kumagaya, Japan; Argentina players stand for the national anthem before the Pool C Argentina versus USA game at Kumagaya Rugby Stadium during the 2019 Rugby World Cup on October 9, 2019 in Kumagaya, Japan. Photo by Icon Sport - --- - Kumagaya Rugby Stadium - Kumagaya (Japon) Actionplus / Icon Sport - Actionplus / Icon Sport
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Peu avant que les Pumas ne soient secoués par les abjectes considérations raciales de Pablo Matera ou Guido Petti, l'équipe d'Argentine se retrouva malgré elle au cœur d'une polémique en tout point absurde : passé la disparition de Diego Maradona, une armée de peigne-culs reprocha donc aux gonzes de Mario Ledesma un hommage trop timide à l'idole, au cours de l'Argentine – All Blacks qui suivit sa mort. Sur les réseaux sociaux, le torrent de bouse prit même une telle ampleur qu'il contraignit la fédération argentine à se fendre d'un communiqué de presse péteux, où les caciques de la UAR regrettaient la timidité de leur chagrin. Mais dans quel siècle vit-on, nom de Dieu, pour devoir exposer sa douleur aux yeux du monde à grands coups de fadaises contrefaites (« RIP », légende !), au risque de se voir clouer au piloris par les bien-pensants de la planète, ces culs bénits du nouveau monde ? Que savait-on, au juste, des émotions diverses qui secouaient les Pumas au moment où le capitaine des All Blacks, Sam Cane, déposait à leurs pieds un maillot noir floqué du numéro 10 de Diegito ? Et finalement, les aurait-on préféré en veuves éplorées, à genoux, mains au ciel et le visage inondé de larmes ?

La pudeur, la décence, n'ont plus leur place à l'heure où il faut montrer et, surtout, faire savoir. La famille du rugby français, ostensiblement accablée par la disparition de Christophe Dominici et secouant l'univers numérique d'hommages divers et variés, eut elle-aussi belle mine, la semaine dernière, quand on sait aujourd'hui que ledit « Domi » est mort seul ou presque, et qu'une partie de ceux qui assurent à présent le pleurer en disaient pis que pendre au moment du feuilleton biterrois. Que n'a-t-on pas entendu, à l'époque où, au Midol, on suivait au jour le jour les rebondissements de la saga en question : « Comment pouvez-vous relayer les propos de « Domi » ? » nous disait celui-ci, parmi les plus accablés de la semaine dernière. « Comment pouvez-vous lui donner encore du crédit ? », nous demandait tel autre, aujourd'hui dans un état similaire de détresse. Ils étaient pourtant tous là, bougie à la main, hashtag en bandoulière, au soir où la police de la pensée leur demanda d'exposer leur douleur aux yeux du monde. Hé quoi ? Peu importe la sincérité des sentiments, ma bonne dame ; ce qui compte, c'est de pouvoir les étaler au maximum...

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