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Portrait de Pierre Bourgarit, talonneur à pleine vitesse

  • Pierre Bourgarit en action avec la Rochelle lors d'un match de Champions Cup face à Exeter
    Pierre Bourgarit en action avec la Rochelle lors d'un match de Champions Cup face à Exeter Icon Sport
Publié le Mis à jour
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Après une pemière saison exceptionnelle en Top 14, le talonneur rochelais a dû travailler pour gagner en régularité. Incontournable avec son club, le Gersois a été appelé pour la première fois par Fabien Galthié lors de la Coupe d’Automne des Nations. Il avait alors connu sa première titularisation en Bleu lors de la finale contre l’Angleterre.

«Bourgarit, il ne fait que marquer. C’est un escroc on le sait. Après les ballons portés, il ne fait que gameller. On verra s’il fait pareil en équipe de France.» Jérémy Sinzelle n’a pas manqué de souligner à sa manière le triplé inscrit par son talonneur en une mi-temps face à Bayonne. Si ça fait rire ses coéquipiers, cela n’amuse ni ses adversaires, ni ses concurrents pour une place chez les Bleus. Pierre Bourgarit est la sensation du classement des meilleurs marqueurs du championnat, derrière Matthis Lebel mais devant Cheslin Kolbe et Lester Etien.

La preuve en chiffre que le Rochelais, aujourd’hui âgé de 23 ans, est de nouveau sur la trajectoire fulgurante de ses débuts, celle qui lui avait permis de fêter une première sélection chez les Bleus lors de la tournée en Nouvelle-Zélande en 2018, après seulement une saison en Top 14. Une première cape où son explosivité et sa fraîcheur lui avaient permis de franchir la ligne d’en-but des All Blacks avant de voir cet essai refusé par la vidéo, ce qui avait attristé le sélectionneur Jacques Brunel : «C’est terrible. Vous vous rendez compte pour lui, qui jouait en Fédérale 1 la saison dernière. Il aurait pu marquer son premier essai international à Wellington pour sa première sélection. Je suis allé le voir pour lui dire que je lui accordais, moi, cet essai.» L’ancien Auscitain était alors la nouvelle bombe du Top 14, celui qui avait déposé quelques mois plus tôt Ma’a Nonu pour inscrire un essai de soixante-quinze mètres avec, en prime, une feinte de passe digne d’un trois-quarts centre.

Sans le savoir ni le vouloir, Pierre Bourgarit avait été propulsé tout en haut de l’affiche, alors que son manager de l’époque Patrice Collazo avait encore du mal à prononcer correctement son nom. «Ça fait un an que l’on oublie ce « r ». Mon surnom depuis toujours c’est Bourga, mais à La Rochelle, Patrice Collazo m’a toujours appelé Bouga», plaisantait le talonneur gersois au terme de cette première saison complètement folle. La suite n’a pas été aussi spectaculaire. Patrice Collazo est parti à Toulon et Jacques Brunel ne lui offrait qu’une seule sélection face à l’Angleterre à Twickenham lors du Tournoi 2019 avant de ne plus faire appel à ses services. «Tout est allé trop vite», reconnaît aujourd’hui Grégory Patat, l’entraîneur des avants rochelais qui était en charge des Espoirs maritimes lors de l’arrivée de Pierre Bourgarit au club : «Il avait 20 ans et il était prévu qu’il fasse une saison entière avec les Espoirs pour se préparer au niveau professionnel. Il n’a finalement fait que deux matchs avec les Espoirs avant de débuter avec les pros. Il y avait alors un peu de tension entre Patrice et d’autres talonneurs, donc Pierre a pu jouer régulièrement. Il avait déjà son talent, ses fulgurances et de nombreuses qualités à l’exception peut-être d’une certaine régularité dans les lancers, mais Patrice lui accordait toute sa confiance et il pouvait donc s’exprimer librement.»

Grégory Patat : «Tout le monde le voyait très haut et il devait assumer un nouveau statut. »

On pardonnait alors quelques mauvais lancers à ce débutant ultra prometteur. «Il est revenu de la tournée en Nouvelle-Zélande et le staff avait changé à La Rochelle. Il devait gagner en régularité mais aussi encore travailler physiquement. Tout avait été extraordinaire jusque-là et quand il a rencontré la première difficulté, qu’il a été confronté à plus de concurrence et qu’il a dû essuyer quelques échecs au niveau du lancer, il a eu du mal à le vivre car son socle n’était pas encore assez solide. Il n’avait pas tous les outils et avait dû mal à l’accepter. Tout le monde le voyait très haut et il devait assumer un nouveau statut. Il était en équipe de France donc l’œil de ses vis-à-vis avait changé. Il n’était plus le jeune qui arrivait là en toute innocence. Ses concurrents directs voulaient aussi le challenger. Il était attendu tous les week-ends.»

Les éloges laissent alors la place à de nouvelles exigences. Les encouragements bienveillants du début sont confrontés aux statistiques et à la régularité de son partenaire Jean-Charles Orioli. «C’était une pression supplémentaire pour Pierre, poursuit Patat, Jean-Charles est un lanceur reconnu avec une technique du lancer hors pair.» C’est d’autant plus dur à vivre pour Pierre Bourgarit qui marche à l’affectif depuis ses jeunes années gimontoises. Sa maman Michèle est la mieux placée pour en parler : «Pierre est très famille. Certes, il adore le rugby mais il doit se passer quelque chose en dehors du terrain. Quand il était à Gimont (en entente avec Mauvezin, N. D. L. R.), il ne voulait pas aller en sélection car ses copains n’y étaient pas. Il a eu du mal à quitter l’entente pour aller à Auch et ce sont encore ses copains qui ont dû le pousser. Cela a été pareil au moment de quitter Auch. La situation du club était mauvaise mais il a attendu le dernier moment pour s’engager ailleurs. Et si le FCAG n’avait pas coulé, il aurait fait au minimum une saison de plus à Auch.»

Julien Sarraute : «Il a besoin de se sentir bien dans un groupe car ce n’est pas une individualité mais un affectif.»

Julien Sarraute, qui l’a vu arriver comme aspirant au centre de formation du club auscitain, a aussi percé la personnalité de Pierre Bourgarit : «Il marche à la confiance. Il joue pour le plaisir et son moteur c’est l’amitié et la solidarité. Il a besoin de se sentir bien dans un groupe car ce n’est pas une individualité mais un affectif.»

Après avoir notamment vécu la phase finale 2019 comme remplaçant, Pierre Bourgarit est de nouveau le numéro un du poste à La Rochelle et il a été appelé pour la première fois par Fabien Galthié pour la finale de la Coupe d’Automne des Nations face à l’Angleterre. «C’est un poste où la France est riche, analyse Grégory Patat. On a pu voir les éclosions de Peato Mauvaka ou Teddy Baubigny mais j’étais persuadé qu’il méritait de retrouver les Bleus car il peut apporter quelque chose de différent avec son profil.»

De nouveau premier choix à son poste dans son club, Pierre Bourgarit évolue en pleine confiance avec onze titularisations en douze matchs de Top 14. «Il a beaucoup travaillé pour gagner en régularité au niveau du lancer. à ses débuts, il était capable d’en manquer des très faciles et ça n’arrive plus aujourd’hui. Surtout, il est capable de passer à autre chose après en avoir raté un. Il fait preuve aujourd’hui d’une plus grande maturité et je suis surpris par ses analyses de retour de match. Il a maintenant le recul nécessaire. Par le passé, il avait du mal à entendre les critiques et pouvait rapidement être perturbé par les éléments extérieurs. Il est maintenant capable d’encaisser et d’apporter des réponses. Et ce n’est pas anodin s’il marque des essais car il a aussi la maturité physique pour enchaîner les matchs.»

Pierre Bourgarit a maintenant digéré son ascension fulgurante et il peut retrouver les Bleus avec plus d’assurance même si la concurrence est forte avec Julien Marchand et Camille Chat. Il est en tout cas aujourd’hui mieux armé pour y faire face. Tout comme, il n’a pas été ébranlé par une accusation de racisme en début de saison pour avoir employé le mot tarzan sans y prêter d’arrière-pensée. «C’est lui qui a répondu sur les réseaux sociaux, constate Grégory Patat. Il s’est pris en main pour régler l’histoire. C’est un gage de maturité malgré son jeune âge.» Plus rien ne semble maintenant arrêter le «serial marqueur» rochelais.

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