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PSG XIII : C’était trop beau pour être vrai

Par Rugbyrama
  • Au départ de cette folle aventure, il y eut Charles Biétry et Jacques Fouroux (en haut à droite). Ces deux hommes avaient construit une équipe à la hâte, recrutant les meilleurs éléments du championnat de France. Lors du premier match officiel face à Sheffield, Arnaud Cervello (en bas à droite) inscrira un doublé pour permettre aux Parisiens de l’emporter.
    Au départ de cette folle aventure, il y eut Charles Biétry et Jacques Fouroux (en haut à droite). Ces deux hommes avaient construit une équipe à la hâte, recrutant les meilleurs éléments du championnat de France. Lors du premier match officiel face à Sheffield, Arnaud Cervello (en bas à droite) inscrira un doublé pour permettre aux Parisiens de l’emporter. DR - DR
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Il y a vingt-cinq ans, le PSG XIII disputait le premier match de l’histoire de Super League dans un stade de Charléty presque comble. L’aventure parisienne aura connu un départ tonitruant avant de décliner. Retour sur cette épopée.

Mardi 26 mars 1996. À l’extrême sud de la capitale, à huit kilomètres du Parc des Princes, théâtre habituel des grands soirs du sport parisien, le stade Charléty s’apprête à vivre une soirée historique. Autour de l’enceinte, des dizaines de bus venus du sud de la France et une colonie anglaise regroupée derrière leurs drapeaux de l’Union Jack battent le pavé en direction de l’arène. Quelques instants plus tard, les tribunes du complexe sportif omnisports se garnissent. «18 000 personnes», annoncent les organisateurs. Dans les gradins, un homme apprécie le spectacle plus que les autres : Charles Biétry. Le charismatique dirigeant voit son projet se concrétiser, au-delà des attentes : son PSG va participer, en grande pompe, à l’inauguration de la Super League, nouvelle compétition internationale à XIII sortie de l’imaginaire du magnat Rupert Murdoch.

Trois mois plus tôt, le 23 décembre 1995, le touche-à-tout avait convoqué une conférence de presse pour annoncer la grande nouvelle, le Paris Saint-Germain allait posséder son équipe à XIII : «Il y avait la volonté de bâtir un grand club omnisports au PSG : nous avions du basket, du hand, du volley, du judo, du golf… J’ai toujours beaucoup aimé le rugby à XIII et cette section était bien plus rapide à monter qu’un club à XV. Le championnat était plus simple à intégrer et une ville comme Paris avait de quoi attirer les Anglais.» Les ambitions de Biétry et les desseins de Murdoch pointaient dans la même direction. En moins de cent jours, les dirigeants avaient dû trouver des hommes et un fonctionnement au niveau de la reine des compétitions treizistes de l’hémisphère Nord : «Nous avions réussi à monter une équipe très correcte en peu de temps.» Sous la houlette des architectes Pierre Chabaud et Jacques Fouroux, architectes d’une formation réunissant la crème de l’Hexagone, tous clubs confondus. «Elle avait été bâtie de toutes pièces avec les meilleurs Français et étrangers du championnat», explique Pascal Bomati, acteur de cette épopée et international à XV en devenir. «Il y avait eu des tests à passer et plusieurs phases de sélections à Toulouse.» L’ailier se souvient du frisson des premiers temps : «J’avais 22 anset je jouais au XIII catalan. Quand ça nous est tombé dessus, c’était tout ce que l’on rêvait : affronter les meilleurs et faire partie de la première équipe française de Super League. C’était un projet fou.»

«Un rêve qui se réalisait»

Une opportunité inespérée, dans la capitale, face à onze écuries anglaises de haut vol : «C’était une exposition incroyable et un formidable bol d’air pour notre sport. Le PSG, il y a vingt-cinq ans, avait déjà une grande notoriété. Il n’y avait pas mieux.» À l’époque, ces trois initiales occupaient le haut de l’affiche : à quelques encablures de Charléty, les Roche, Raï et Djorkaeff, champions de France de foot en titre, étaient sur le chemin d’un sacre européen en Coupe des Coupes. Les treizistes, aussi, partaient en quête de gloire continentale. Tout en sautant vers l’inconnu : «C’était la découverte d’un autre monde, d’une autre vie, poursuit l’ancien demi polyvalent Fabien Devecchi. On touchait le professionnalisme avec des entraînements presque quotidiens alors que nous étions pluriactifs à la base. Et puis jusqu’alors, le XIII était principalement implanté dans le Sud. C’était un défi de partir à la conquête de Paris.»

En ce 26 mars, premier jour de vérité, la réalité dépassa les prévisions les plus optimistes. «On ne s’attendait pas à jouer devant presque 18 000 personnes, c’était un rêve qui se réalisait», se remémore le capitaine en devenir de l’équipe de France à XIII. Pascal Bomati : «Ça m’avait surpris que ça parte sur les chapeaux de roues, avec une telle adhésion populaire.» «Pourtant, nous n’avions pas fait une pub démentielle», tempère Charles Biétry. La politique très attractive, avec des invitations par milliers, et la curiosité avaient contribué à ce succès. Le scénario avait été à la hauteur de l’événement, avec une partie indécise et un dénouement heureux pour le PSG XIII, vainqueur in extremis des Sheffield Eagles.

Un baptême comme une formidable promesse. L’illusion n’allait pas durer, malheureusement, même si l’objectif initial de l’an I avait été atteint, avec le maintien. «Les résultats ont été mitigés, souffle Pascal Bomati. La première année, l’équipe termine avant-dernière sur douze, avec deux ou trois victoires, un match nul et pas mal de défaites. Mais on attirait tout de même 8 000 à 10 000 spectateurs par match.» Pour Charles Biétry, le classement sportif passe presque au second plan, avec le recul : «L’équipe jouait bien et on avait une belle image, c’était la petite différence avec le PSG foot. Il y avait les bons côtés du XIII et pas les mauvais aspects, les bagarres, tout ça. Ça donnait de superbes rencontres.» Même avec la meilleure des volontés, le système avait rapidement atteint ses limites. «Nous étions à cheval entre l’amateurisme et le professionnel, explique Fabien Devecchi. Tous les joueurs avaient un travail à côté et nous habitions dans le Sud pour la plupart.» En restant attaché à leur club d’élite le reste de l’année. Bonjour le casse-tête : «On multipliait les allers-retours dès le milieu de semaine pour s’entraîner, nous dormions à l’hôtel à côté de Charléty ou bien nous allions directement en Angleterre, confirme Pascal Bomati. Tout ça rendait l’organisation délicate et a dû coûter cher.»

«La situation nous a échappé»

Au terme de la première saison, la section tente de se réinventer pour perdurer. «Alors qu’il y avait une majorité de joueurs français, nous n’étions plus que trois la seconde année, reprend le demi. La Fédération anglaise avait repris la main pour des raisons économiques, de logement, de transports…» Charles Biétry va plus loin : «Si nous n’avions misé que sur des Français, nous n’aurions pas eu le niveau de la Super League. Nous avions été obligés de recruter ailleurs au bout d’un moment.» Mais lentement, la flamme s’est éteinte : «Il y avait un staff australien, de nombreux Australiens et des Néo-Zélandais de grande qualité, décrit Devecchi. L’identité de cette équipe s’était perdue.» Si les résultats ont stagné tant bien que mal, les affluences ont, elles, baissé : «Il y avait peu de victoires et il n’y avait plus vraiment d’attache avec la France.»

PSG XIII
PSG XIII DR - DR

Ce plan B a finalement précipité la chute du projet, beau sur le papier mais en avance sur son temps : «Un jour, je me suis rendu compte qu’il fallait des permis de séjour en très bonne règle pour les étrangers et que ce n’était pas le cas pour tous, raconte Biétry. Il ne fallait pas juste une carte de séjour mais un permis de travail. Nous n’étions pas en conformité avec la loi et nous allions avoir des problèmes si l’on continuait comme ça. Il a donc été décidé d’arrêter. Le système n’était pas viable.» L’aventure aura duré un peu plus d’un an, laissant derrière elle une nostalgie teintée d’amertume : «C’est dommage car nous étions tous emballés, souffle Fabien Devecchi. L’aventure était superbe mais ça n’a pas tenu. Certains sont ensuite repartis dans le Sud, d’autres ont tenté leur chance à l’étranger.» «Est-ce que le costume était trop grand ? Ça avait, en tout cas, été monté de toutes pièces, sans trop de recul», déplore Pascal Bomati, passé à XV du côté de Brive, au terme de la première année. «Je crois que la marche était très haute. Les Anglais étaient professionnels depuis dix ans. C’était trop dur de rivaliser, on partait de loin.»

Vingt-quatre ans après cette fin, la nostalgie de Charles Biétry comporte une part d’amertume : «J’étais très heureux de faire ça. C’était un très beau projet qui me laisse des regrets. Quand je vois comment cela avait été bien accueilli à Paris… Je regrette que l’on n’ait pas réussi à être plus vigilant sur les conditions d’accueil des joueurs. Si ça avait été la seule section, on y serait arrivé. Mais il fallait gérer sept équipes professionnelles et plus de mille gamins. La situation nous a échappé.» À la tête du PSG Omnisports de 1992 à 1998, l’ancien journaliste et gardien de but aura connu bien plus de réussites que de déceptions : «C’était un des très bons moments de ma vie. Nous avions eu des résultats exceptionnels : on a eu Douillet et Bouras champions olympiques de judo, un champion du monde de boxe, un titre de champion en basket, ce qui n’était jamais arrivé, idem au volley et en hand…»

La section XIII du PSG, un rêve d’enfant ou presque, aura connu son soir de gloire, le 23 mars 1996, avant de décliner jusqu’à l’oubli. Charles Biétry et sa passion ovale auront tout de même fini par emporter une petite victoire, par la suite. Comme un clin d’œil du destin : «Je me dis que j’ai pris un peu ma revanche sur les institutions en amenant le XIII sur beIN Sports par la suite.» Afin de promouvoir les Dragons catalans, version sudiste et moderne de son PSG.

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