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  • A peine élu à la tête de la LNR, René Bouscatel prend des décisions fortes.
    A peine élu à la tête de la LNR, René Bouscatel prend des décisions fortes. Icon Sport - Icon Sport
Publié le Mis à jour
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L'édito d'Emmanuel Massicard... Le rugby est-il de droite ou de gauche ? Question pour un champion. Depuis des lustres, elle vient régulièrement nourrir le philosophe en mal de sens qui approche notre monde du rugby. Depuis tout aussi loin, son interlocuteur botte en touche au lieu de répondre : « Les deux, mon capitaine. »
Alors, de droite ou de gauche ? Il penche clairement plus à droite que jamais depuis qu’il est devenu pro ; c’est ça mon analyse… Mais, avec un peu d’humour, je peux également botter vers la touche : « Tout dépend de quel côté va tourner la mêlée. Vers où l’équipe est à l’aise pour attaquer. » Autrement dit : « Choisis ton camp camarade, là où ça t’arrange… Le rugby, lui, ne choisira jamais ! » Parce qu’il s’affiche apolitique. Imprédictible et capable de rebondir jusqu’à l’un à l’autre. Sans couleur attitrée, il se targue de faire cohabiter les opposés sur le terrain comme dans les tribunes et ses coulisses.

N’empêche, il est un sport éminemment politique. Rapport à la stratégie, au combat, au pouvoir et à l’engagement… La liste des points d’accroche est longue. Sans avoir à parler des acteurs eux-mêmes, nombreux à avoir mêlé ou enchaîné vies sportives et politiques.
La dernière élection à la Ligue nationale de rugby, qui a opposé deux tendances marquées chez les présidents de clubs, témoigne de cette culture. Pour la première fois, il n’a plus été question d’union sacrée mais d’intérêts personnels divergents, de visions et de projets d’avenir qui s’opposent. Avec ce qu’il faut de division pour mieux gouverner.

Au cœur de la conquête du pouvoir qui a donc mené René Bouscatel sur le trône, tous les coups ont compté et chaque voix a imposé son lot de concessions. Le juste prix des votes ? À la gueule du client : une nouvelle fenêtre de « jokers » afin de se renforcer ou d’alléger ses finances ; huit qualifiés en Champions Cup ; la perspective du maintien dans l’élite professionnelle.
Si le premier comité directeur de la nouvelle gouvernance avait chassé l’idée d’une ProD2 élargie, le débat a finalement rejailli la semaine dernière. Les clubs en ont vivement débattu quand le président Bouscatel a rouvert le sujet…
L’issue reste à valider, mais on pourrait donc se diriger vers un Top 15 et une ProD2 à 17. Comptez 32 clubs pros et traduisez : Agen, qui n’a pas gagné un traître match, pourrait rester au sommet ; la ProD2 et la Nationale auraient leurs promus ; Soyaux serait maintenu, comme Provence, Rouen, Aurillac ou Valence…

Qu’importe si c’est au mépris de toute logique sportive, par le biais d’une réforme des règles du jeu en toute fin de saison. Qu’importe si nos calendriers dégueulent déjà et si les joueurs vont être soumis à un rythme plus infernal encore. Qu’importe si le niveau de jeu et la qualité du spectacle se trouvent impactés. Qu’importe si le message envoyé aux partenaires et au grand public est brouillé. Qu’importe si cette élite gonflée artificiellement ait à vivre la concurrence frontale du XV de France, minée par les doublons. Qu’importe s’il faudra dégraisser le Mammouth, dès la saison suivante.
Oui, qu’importe tout cela : la politique est toujours plus forte que la raison… Pas sûr pour autant que le rugby français en sorte grandi, à deux ans de la Coupe du monde.

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