Will en sait des tonnes

Tracteur, mastodonte, poutre ou encore golgoth, colosse, géant… Depuis le début de sa carrière, la presse et les observateurs ont fait à peu près cent fois le tour des qualificatifs idoines pour imager la puissance dévastatrice de l’impressionnant gabarit (2,03 m, 140 kilos) de Will Skelton. Début avril, veille de quart de finale face à Sale, son coéquipier Uini Atonio en a soufflé un énième au travers d’une nouvelle métaphore créée de toutes pièces dont il est si friand.

« À Gloucester (une semaine plus tôt en 8e de finale, N.D.L.R.), Will a «transpaletté» deux, trois mecs et ça nous a fait du bien », s’amusait le pilier droit maritime pour conclure son concert de louanges adressé au deuxième ligne australien qui l’écoutait religieusement, en tentant de traduire. « Ce garçon a tout fait, avait entamé Atonio. Des demies, des quarts, il a été champion. Il a tellement d’expérience qu’on doit se nourrir de ça. Ça aide beaucoup d’avoir un mec comme ça dans l’équipe. Il parle de son expérience, de sa gestion de ce genre de matchs. Toutes les semaines, il continue à avancer, à nous faire avancer. Il marche sur l’eau. C’est un atout. Dans l’équipe, peu de monde a gagné des Champions Cup ou des Top 14. » Il est d’ailleurs le seul, concernant le premier trophée cité. Et même le seul de l’actuel effectif, avec Brice Dulin, à avoir pris part à une demi-finale dans cette compétition. C’était en 2019. L’année du sacre pour Skelton, sous le maillot des Saracens, après une finale disputée comme titulaire face au… Leinster.

Alors, inévitablement, à l’approche de ce rendez-vous aussi inédit qu’historique pour le club à la caravelle, l’international wallaby (18 sélections) pèse encore un peu plus de tout son poids. « Son expérience est hyper importante pour le groupe car il a gagné un titre. Il sait pourquoi c’est si spécial, appuie son manager Jono Gibbes, lui-même vainqueur de trois éditions comme entraîneur des avants du Leinster (2009, 2011, 2012). Will partage beaucoup, il discute. Il fait ça toute l’année, pas juste maintenant mais quand tu parles autour de la mentalité de gagner quelque chose, tu n’as pas besoin de convaincre un mec comme ça. Il est naturellement, convaincu. Il veut gagner. »

« L’impression qu’il joue avec des cadets »

« Nous avons les joueurs, à La Rochelle, pour gagner cette Champions Cup, clamait d’ailleurs le principal intéressé en décembre dernier, juste avant l’ouverture du tournoi qu’il considère comme la plus belle compétition de clubs au monde. Quand tu regardes l’équipe, on a plusieurs joueurs qui font que, sur un match, on peut battre n’importe qui. » Le Leinster est compris dedans, même si, pour rebondir sur cette expression, le quadruple champion d’Europe n’est, pour le coup, pas vraiment n’importe qui. Dimanche, à Deflandre, la province irlandaise disputera sa douzième demi-finale ! La veille de ses 29 ans, Skelton jouera, lui, son vingtième match en jaune et noir.

Jamais un élément maritime n’avait marqué le club d’une telle empreinte en aussi peu de temps. « Quand on l’a vu arriver en début de saison, on a compris pourquoi les Saracens étaient aussi forts et gagnaient autant de titres, admire Grégory Alldritt. Il nous a vraiment ramené une mentalité géniale. Sur le terrain, on voit à quel point il est important pour nous dans notre système. C’est un monstre. Franchement, on a l’impression qu’il joue avec des cadets à chaque fois, qu’il a été surclassé ou qu’il n’est pas à sa place. On est ravi de l’avoir avec nous et pas contre nous. » Le Leinster, forcément, un peu moins.