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Impossible n'est plus français : les Bleus en quête d'exploit à Brisbane

Par Vincent BISSONNET
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    Impossible n'est plus français : les Bleus en quête d'exploit à Brisbane France Rugby
Publié le Mis à jour
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Cette tournée n’a rien pour plaire et a tout pour être une galère, sur le papier. Tout, vraiment ? Non, ce serait mésestimer le réservoir du XV de France. Et si, pour une fois, la surprise était bonne ?

À l’autre bout du monde, les Bleus pensaient avoir déjà éprouvé toutes les tempêtes possibles et imaginables, l’été venu : une lutte ouverte en 1961 entre un sélectionneur et un capitaine, une crise diplomatique sur un coin de table basse en 2009, un décès accidentel en 1990 ou encore l’outrage d’un doublé de fannys en 2003 et 2004, parmi tant de désillusions tristement mémorables. Au chapitre des galères diverses et variées des stages d’été, cette édition 2021 a déjà trouvé sa place… avant le coup d’envoi du premier match.

Même en 1949, pour la première tournée de l’histoire du XV de France dans l’hémisphère Sud, le voyage n’avait pas dû atteindre un tel niveau de bordel organisationnel. Début juin, à moins d’un mois du départ, personne n’était encore en mesure de garantir la tenue de la triple confrontation, les bulletins de santé et les directives gouvernementales se répondant au coup par coup ; la liste des appelés, bricolée au fil de la cascade des forfaits et des phases finales, a contraint l’encadrement à intégrer 55 % de bizuths et à confier le capitanat à un soldat à huit sélections ; les trois tests ont dû être regroupés en dix jours, avec un lever de rideau le mercredi – un temps pressenti à huis clos, finalement ouvert au public – et un deuxième rendez-vous le mardi d’après ; le premier match, programmé à Sydney, a été délocalisé à Brisbane à la va-vite ; la quatorzaine de rigueur a rendu la préparation inédite ; et pour compléter le tableau, cette zizanie arrive au terme de la saison la plus longue de l’histoire de l’humanité, qui aurait raisonnablement pu se passer d’une virée australe.

Le bilan de tout ça ? On se retrouve avec une sélection B confrontée à une programmation casse-gueule et un adversaire dont le grand public ne connaît presque rien, si ce n’est le visage éternellement juvénile de O’Connor, les boucles blondes de l’hyperactif Hooper ou la carrure du revenant Timani.

Souvenez-vous de la "french farce"

Alors, quoi ? On passe notre chemin et on n’allume même pas la télé, mercredi midi ? Que nenni, braves gens ! Malgré tous ses défauts et manquements, la trilogie au pays des kangourous mérite toute notre attention. Ce qui est rare devient cher, déjà : les Tricolores ne se sont plus rendus dans l’autre hémisphère depuis trois ans et n’y retourneront pas avant l’été 2024, après avoir visité le Japon l’été prochain et disputé la Coupe du monde dans l’Hexagone.

Parmi les quarante et un joueurs sur place, maintes curiosités vaudront aussi le coup d’œil. Qui, aujourd’hui, ne brûle pas d’envie de voir Louis Carbonel et Baptiste Couilloud pour la première fois à la baguette de la sélection ? Comment ne pas piaffer d’impatience à l’idée de voir les si prometteurs Jaminet et Barlot se frotter déjà au plus haut niveau ? Comment ne pas croire, encore et toujours, en l’éclosion de Sekou Macalou ? Et quid d’Anthony Jelonch ? Le néo-Toulousain peut-il se hisser à la hauteur de Charles Ollivon en tant que troisième ligne mais aussi comme capitaine ? Pour ces questions appelant des réponses, au moins, les plus fervents supporters des Bleu-Blanc-Rouge auront tout intérêt à manger devant leur écran de télé, mercredi midi.

Et puis, qui sait si de ce grand n’importe quoi général ne peut pas émerger l’improbable exploit ? Avec son réservoir sans fond de ressources et de talents, le rugby français nouvelle génération paraît en mesure de rivaliser avec quiconque, même sans ses porte-drapeaux, les Dupont, Ntamack, Ollivon, Marchand et autres Alldritt. Comme une preuve vaut mieux qu’un long argumentaire, souvenez-vous de la finale de la Coupe d’automne des Nations en décembre dernier, disputée sans les cadres des onze premiers mois de 2020, confinés par convention.

Avant de se rendre à Twickenham pour défier le XV de la Rose, nos voisins d’outre-Manche parlaient d’une farce de sélection française. La parodie aurait dû tourner à la comédie dramatique… au détriment d’Eddie Jones et de ses boys. Emmenés par les novices Moefana, Pesenti, Kolingar et autres Geraci, les petits Frenchies avaient largement rivalisé avec les vice-champions du monde. Et auraient à coup sûr mérité de l’emporter, au bout de la prolongation. Pourquoi, alors, ne croirait-on pas aujourd’hui en Jelonch, Danty, Villière, Penaud et consorts à l’heure d’en découdre avec des Australiens à la croisée des chemins, entre deux époques ? La France n’a jamais autant mérité sa réputation de nation imprévisible, bien au-delà de la glorieuse incertitude que l’on prête au sport. Elle n’avait plus été autant crainte dans les tropiques depuis un temps où les tournées se chiffraient en francs.

Contre toute logique, cette troupe disparate en âge, en profils et en expérience internationale peut tout à fait réussir là où tant d’autres ont déçu. Depuis 2007, les Bleus ont gagné seulement trois de leurs vingt-cinq tests d’été : en Nouvelle-Zélande en 2009 (22-27) et en Argentine en 2012 et 2016 (10-49 et 0-27). Les pensionnaires de ce drôle de camp d’été ont tout à gagner et rien ne pourra raisonnablement leur être reproché. Avec une victoire, ils marqueraient les esprits ; avec deux, ils entreraient dans l’histoire. Les appelés sont amenés à jouer les alchimistes. Parviendront-ils à transformer cette tournée en bois en occasion en or ? Impossible n’est plus français, qu’on se le dise.

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