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« Pas de fautes ! » : il y a 20 ans, la légendaire soufflante de Laporte aux Bleus

  • Une soufflante pour la légende
    Une soufflante pour la légende
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Le premier match de l’édition 2002 du Tournoi des 6 nations était déjà un France - Italie. Une rencontre qui sera la première étape vers le Grand Chelem et qui est rentrée dans l’histoire par une porte détournée.

Il y a 20 ans, quasiment jour pour jour, le match d’ouverture du Tournoi des 6 Nations était déjà un France - Italie et il allait rentrer dans les livres d’histoire de notre discipline. Le XV de France sortait d’une campagne automnale victorieuse face à l’Afrique du Sud, les champions du monde australiens et les Fidji. À sa tête, Bernard Laporte, en plein milieu de son premier mandat. Depuis un an, il avait fait de Fabien Galthié son capitaine.

Les Bleus étaient les grands favoris de ce 6 Nations. Le match face aux Italiens devait les lancer sur de bons rails. Sauf que rien ne se déroulera comme prévu... "La semaine de préparation avait été contrariée par les blessures. Fabien (Galthié) avait été contraint de renoncer, et j’avais dû lancer Fred (Michalak) à la mêlée à trois jours du match. Je perdais mon capitaine, et en plus Raphaël (Ibanez) et Fabien (Pelous) n’étaient pas à 100 % physiquement ; alors on les avait laissés sur le banc. Du coup, c’est Charly (Magne) qui avait récupéré le brassard. Un peu par défaut. Je venais de lancer à l’automne les jeunes Michalak, Jeanjean, Poitrenaud, Rougerie. L’équipe était très jeune et manquait de leadership." témoigne Laporte.

Galthié, victime d’une entorse d’un genou avec le Stade français avait effectivement déclaré forfait lors des premières heures du rassemblement des Bleus. Olivier Magne, avec ses 48 sélections d’alors et ses cinq partenaires de Clermont (Privat, Merceron, Bory, Marsh et Rougerie) dans le quinze de départ, semblait apporter le plus de garanties possible pour assumer ce capitanat de transition. "J’avais été étonné que Bernard pense à moi. Je n’avais pas cherché à être capitaine et je voulais rester le plus naturel possible". Finalement, ce n’était pas une bonne idée, d’ailleurs ce sera la seule fois en 90 sélections, que Magne aura à assumer cet honneur.

Les Bleus commençaient le match de manière très brouillonne. Surtout, ils tombaient rapidement dans le piège italien et perdaient le fil du match en première période par des chamailleries incessantes avec les avants. Les mêlées étaient chahutées. Les accrochages multiples. David Auradou était exclu dès la 23e minute. Peu après, la demi-heure de jeu, Olivier Magne marchait sur l’ailier Denis Dallan lors d’un regroupement. Réplique immédiate du pilier italien, Carlo Checchinato qui voulait jouer les justiciers et qui était exclu temporairement à son tour. Trois autres Italiens étaient sanctionnés d’un carton jaune. Et Magne écopait après la rencontre de trois semaines de suspension pour son mauvais geste.

Dire que le Tournoi des 6 Nations 2002 avait mal commencé pour l’équipe de France est un euphémisme. À la mi-temps du premier match face à l’Italie, les Bleus de Bernard Laporte étaient englués dans le piège tissé par les Transalpins. Le coup de gueule légendaire du manager des Bleus à la mi-temps a tout changé. David Auradou, Nicolas Jeanjean (en bas à droite) ou Olivier Magne (en haut) ont été transcendés. Photo Midi Olympique
Dire que le Tournoi des 6 Nations 2002 avait mal commencé pour l’équipe de France est un euphémisme. À la mi-temps du premier match face à l’Italie, les Bleus de Bernard Laporte étaient englués dans le piège tissé par les Transalpins. Le coup de gueule légendaire du manager des Bleus à la mi-temps a tout changé. David Auradou, Nicolas Jeanjean (en bas à droite) ou Olivier Magne (en haut) ont été transcendés. Photo Midi Olympique

De la causerie au slogan publicitaire

À la pause, la France menait 19 à 12. La mi-temps allait devenir mythique. "Avec Jacques Brunel, toute la semaine, on leur avait rabâché de ne pas tomber dans le piège des Italiens. Et en première mi-temps, on y va les deux pieds droits devant ! David Auradou dégoupille, et même "Charly" ! Je suis remonté et quand je débarque dans le vestiaire, tout le monde regarde ses pieds. Personne ose croiser mon regard. Alors, je pique ma colère", s’est remémoré Laporte en début de semaine.

Ce qu’il ne savait pas, c’est qu’il était filmé. Dans son dos se trouvait, un cameraman de France 2, qui captait toute la scène. Elle sera diffusée le lendemain de la rencontre : "Bon, maintenant on va s’y filer un peu. D’accord ? On va mettre un peu de rythme. Sur les touches, sur les mêlées. On va y aller les premiers ? Et ça va redémarrer là… Et ça va redémarrer. Et on va les respecter. On ne va pas faire de faute. C’est clair ça ? Je ne sais même pas de quoi on peut parler. Du jeu ? On n’a rien fait. Vous voulez qu’on parle de quoi ? Des touches, des mêlées ? Je ne sais pas, dites-moi !" Quelques instants plus tard, Laporte renchérissait de plus belle sur ce qui va devenir un slogan publicitaire. Il hurlait : "Pas de faute, compris ? Pas de faute."

Pour la première fois, une de ses colères -qui n’avaient plus de secret pour le monde du rugby- allait dépasser le cadre du vestiaire. 20 ans après, les images de cette scène sont toujours accessibles facilement sur YouTube. Et les "victimes" n’ont rien oublié.

Une soufflante pour la légende
Une soufflante pour la légende

"Je ne me souviens plus trop de la rencontre, mais c’est clair que Bernard nous avait bien secoués. Une belle soufflante, oui. Jusqu’alors, j’avais juste entendu parler de ses coups de gueule. Mais c’était la première que j’y assistais en live. Je me rappelle parfaitement que j’étais assis à côté de Nicolas Jeanjean. On ne mouftait pas", témoigne Frédéric Michalak, qui reconnaît aussi l’effet salvateur. "Bernard pouvait avoir le sang chaud. Il n’était pas content de notre engagement et nous la fait savoir. Il a voulu nous piquer", poursuit Magne. Seulement, ni Bernard Laporte, ni la FFR n’avaient été prévenus de la diffusion de ces images ; le secret du vestiaire était percé quasiment pour la première fois. Le sélectionneur n’avait pas apprécié et il l’avait fait savoir. "Oui, je n’étais pas content. Je pense d’ailleurs toujours que cela aurait dû rester entre nous. Ce sont des moments qui doivent rester entre un coach et ses joueurs. C’est vrai que la semaine suivante, je m’étais plaint avec véhémence. D’ailleurs, cela ne s’est plus jamais reproduit et aujourd’hui quand il y a des caméras dans le vestiaire, il n’y a plus le son".

Ce coup de gueule lui sera pourtant profitable. Quelques mois plus tard, la marque de pâtes alimentaires, Lustucru, lui demandait de rejouer la scène pour un spot publicitaire vantant les mérites de ses produits. La pub fera son petit effet. L’un de ses adjoints chargé des trois-quarts, Bernard Viviès, s’en servira même pour prévenir les joueurs. "Attention les gars, sinon Bernard va nous faire une Lustucru !"

Dernier clin d’œil : pour finir le Tournoi, Raphaël Ibanez (capitaine par intérim lors du deuxième match) et Fabien Galthié reviendront aux affaires. Et les Bleus remporteront le septième Grand Chelem de leur histoire.

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