« Faire accepter son coming out reste une gageure »

  • Pro D2 - Jeremy Clamy-Edroux, pilier de Rouen
    Pro D2 - Jeremy Clamy-Edroux, pilier de Rouen Icon Sport - Maxime Le Pihif
Publié le Mis à jour
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En partenariat avec la LNR, l’association Ovale Citoyen a mis en place une cellule d’écoute et de conseil à destination des joueurs victimes de discriminations sexuelles.

« On n’est pas des PD ; sortez-vous les doigts ; vous allez jouer longtemps comme des tapettes ? » Qui n’a jamais entendu ce genre de propos dans un vestiaire ? À quelques minutes d’un coup d’envoi, à la mi-temps, ces paroles ne vous ont-elle jamais choquées. Et n’oublions pas le « arbitre enculé », qui rebondit de gradins en mains courantes depuis que les arbitres existent.
Pour vous, rien d’homophobe là-dedans, juste des mots dans un contexte. Mais avez-vous pensé que la personne présente à vos côtés sur le terrain pourrait être gay, lesbienne, trans ou bisexuel ? Ou que votre voisin(e) dans la tribune subit depuis toujours les mêmes propos et la même violence verbale ?
Le rugby n’est pas plus ou moins homophobe que les autres sports. Pourtant, un seul joueur professionnel a fait son coming out et une seule personne transgenre est aujourd’hui intégrée dans une équipe de haut niveau. Comme le montre une récente étude du cabinet Olivier Wyman, 87 % des rugbymen interrogés pensent qu’il n’est pas facile d’être joueur et homosexuel. Et 75 % d’entre eux qu’il serait difficile d’aborder le sujet.
Les instances (FFR et LNR) ont commencé à mettre à dix mètres ces préjugés. Mais au quotidien, qu’en est-il ? Assumer sa différence dans notre sport est-il si simple ? Dans l’ensemble des formations dispensées pour les éducateurs (ices et/ou entraîneurs(es), il n’existe aucun module de lutte contre les discriminations. Aucune formation sur l’acceptation de la différence. Au sein des centres de formation, le constat est identique.
Un club de sport ne se limite pas à la pratique. C’est le lieu où un(e) ado se construit. C’est là où elle (il) va passer le plus de temps hors du cercle familial et scolaire. Elle (il) doit pouvoir y assumer ce qu’elle (il) est. Dans notre sport, où le virilisme est souvent mis en avant comme la valeur cardinale, faire son coming out et le faire accepter par son équipe et ses éducateurs reste une gageure. C’est pourquoi nous avons décidé de créer une cellule d’écoute « Le Cri du Vestiaire ». Au travers cette cellule, nous serons un lieu d’accueil de la parole, de soutien, de conseil et d’information. Cet espace sécurisé et anonymisé servira à rompre l’isolement, à être aux côtés de ceux et celles qui en ressentiront le besoin. Nous serons aussi force de proposition auprès des clubs en proposant des formations, des sensibilisations et de la médiation si besoin.
Le rugby n’est bien sûr pas le seul sport concerné, tous les sports collectifs le sont. Ils se sont engagés à nos côtés : LNR, Ligue de football, Ligue de handball, Provale (union des joueurs et joueuses professionnels de rugby), UNFP (Union nationale des footballeurs professionnels), SNB (union des basketteurs pros), AJPH (Association des joueurs professionnels de handball), ministère des Sports, ministère chargé de l’Égalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l’égalité des chances. Et nous sommes très fiers que Midol s’associe à cette démarche de lutte contre les discriminations.

Par Lucas Puech (directeur lutte contre les discriminations à Ovale Citoyen) et Jérémy Clamy-Edroux (joueur de Rouen)

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