Abonnés

Yannick Bru : « C'est terrible d'affronter une équipe en colère »

  • Yannick Bru donne ses impressions sur les affiches des demi-finales de Top 14.
    Yannick Bru donne ses impressions sur les affiches des demi-finales de Top 14. Icon Sport
Publié le Mis à jour
Partager :

Fraîchement sacré champion de France de Pro D2 pour la deuxième fois en quatre ans, l’ancien entraîneur du Stade toulousain et des avants du XV de France dresse ici le rapport de force des demi-finales du Top 14 à venir. Pour lui, si Toulouse et l’UBB font figures de favoris, il souligne grandement le travail réalisé par Pierre-Henry Broncan à Castres et Philippe Saint-André à Montpellier.

 

D’abord, avez-vous été surpris de voir le Stade toulousain dominer aussi largement son match de barrage contre le Stade rochelais, fraîchement sacré champion d’Europe ?

À tout dire, je suis de ceux qui croient aux séries, à la psychologie du moment. La Rochelle s’était fait secouer deux fois l’an dernier et avait été privée de titre. Les Rochelais venaient de cocher une première case avec ce titre de Champion d’Europe. Je pensais vraiment que ça pouvait être leur année. Mais, je connais aussi bien la maison toulousaine. Je sais que ces trois dernières années, les Toulousains ont beaucoup travaillé sur leurs racines, leur histoire, leur identité. Et c’est toujours terrible d’affronter une équipe en colère. Cette équipe devait se sentir humiliée d’avoir été dépossédée de son titre de champion d’Europe. Elle avait pris une vraie rouste, une vraie leçon, en demi-finale contre le Leinster. Et je savais que cette équipe serait redoutable sur ce barrage. Comme elle le sera en demi-finale. Le Stade toulousain n’a pas explosé La Rochelle sur la stratégie, mais sur les duels, dans les collisions. Et ce n’est pas rien. Les Rochelais en ont perdu leur rugby, on avait l’impression qu’ils se jetaient le ballon et que personne ne voulait aller à l’affrontement. Quand le Stade toulousain crache du feu comme ça, c’est très compliqué de le battre.

Cette colère peut-elle perdurer ?

La motivation, elle était toute trouvée contre La Rochelle. Il y avait de la vexation et une question de prestige en jeu. Là, ce sera différent. C’est un derby, deux approches différentes. Du talent d’un côté avec une fierté incroyable, de l’autre un état d’esprit et une organisation défensive incroyable. Mais pas seulement. Castres, c’est bien plus. On ne termine pas premier du Top 14 simplement en étant vaillant. Ça, c’est un raccourci. Et il faut souligner ici le travail remarquable réalisé par Pierre-Henry Broncan. Cette demi-finale, j’en suis convaincu, va être un choc brutal. Pour moi, Toulouse est favori au regard du talent qui inonde cette équipe. Quand on a Antoine Dupont, c’est plus facile. Mais on ne peut pas s’arrêter à lui. J’ai été frappé par la colère des frères Arnold contre La Rochelle ou la prestation de Elstadt. Parce que le Stade toulousain, ce n’est pas que du talent. C’est avant tout des avants qui cognent fort. Mais si les deux équipes sont brutales, je pense que Toulouse a un peu plus de talent pour l’emporter.

Castres n’est-elle pas la pire opposition en termes de jeu pour le Stade toulousain ?

Non, j’ai plutôt le sentiment que ces deux demi-finales sont comme des jumelles siamoises. D’un côté, l’UBB a l’énergie et le talent me faisant penser au Stade toulousain ; de l’autre Montpellier est une équipe de guerriers, des vrais décathloniens très bien organisés en défense. Il y a d’ailleurs dans cette équipe montpelliéraine encore des racines sud-africaines avec un jeu au pied d’occupation très présent et un rideau défensif très dense. J’ai le sentiment qu’il y a vraiment le même rapport de force sur ces deux demi-finales.

À qui l’avantage alors ?

Toulouse et l’UBB semblent mieux armées. Et ce serait sûrement l’affiche la plus colorée pour la finale. Mais attention, j’ai un immense respect pour ce que réalise Pierre-Henry Broncan avec Castres. On ne le souligne pas suffisamment, mais c’est extraordinaire ce qui a été fait. Tout comme la domination aussi de Montpellier cette saison. Quand on sait d’où ce club revient, il ne faut pas minimiser le travail de Philippe Saint-André et de son staff.

La fraîcheur aura-t-elle son importance ?

Personnellement, je préfère que mon équipe ait un week-end de repos avant les demi-finales. Je l’ai vécu cette saison avec Bayonne. Dans l’optique des 25 dernières minutes de ces deux demi-finales, c’est quand même un avantage de ne pas avoir joué le week-end dernier. Quand on a du temps pour l’analyse, pour faire de la récupération, c’est appréciable.

Vous avez parlé de la colère animant le Stade toulousain lors du barrage contre La Rochelle. Mais la tension apparue dans le vestiaire bordelais est-elle de nature à rendre l’UBB plus dangereuse ou est-ce un risque d’implosion ?

Je n’ai pas l’expérience de Christophe Urios qui a déjà réussi de très belles choses dans plusieurs clubs, avec des moyens parfois limités. C’est la marque d’un très grand manager. De l’extérieur, j’ai l’impression que Christophe écrit une nouvelle histoire chaque semaine pour préparer ses joueurs. Il a probablement agi en connaissance de cause parce qu’il sentait que c’était le chemin à explorer. C’est peut-être piégeux mais c’est fort. Ce qui est certain, c’est que pour passer d’une désillusion à une performance aboutie, il y a forcément une phase de reconstruction qui passe par la colère, puis une phase d’union sacrée. Je leur souhaite car ce serait dommage de gâcher ce qui a été fait, surtout quand on voit le talent qu’il y a dans cette équipe. S’autodétruire pour une question d’ego, ce serait malheureux. Franchement, je fais confiance à l’expérience de Christophe Urios qui n’a plus grand-chose à démontrer et au caractère des joueurs de cette équipe.

A contrario, le MHR est très discret depuis plusieurs semaines. Vous connaissez bien Philippe Saint-André pour avoir travaillé avec lui durant quatre ans à la tête du XV de France. Que prépare-t-il ?

Sa grosse force, c’est de bien connaître les hommes. Il a su reconstruire des fondations, un état d’esprit, choisir un bon staff. Son recrutement s’est révélé pertinent. Il a été cherché Mercer en troisième ligne centre qui apporte quelque chose de particulier, Garbisi à l’ouverture qui a su prendre les commandes. Il a aussi conservé des racines sud-africaines avec Serfontein au centre qui est le dépositaire de ce « made in Spingboks ». Montpellier, c’est vraiment ce frère siamois de Castres avec un état d’esprit fantastique, des joueurs ultra-responsabilisés. J’ai l’impression que Philippe a laissé le pouvoir aux joueurs dans un cadre très bien défini. Montpellier, c’est peut-être la meilleure colonne vertébrale de ces demi-finales.

Justement, l’absence de Cobus Reinach ne sera-t-elle pas préjudiciable ?

J’en ai peur… La qualité de son jeu pied ou la pression qu’il met sur l’adversaire feront défaut à Montpellier. Sans faire injure à celui qui sera amené à le remplacer, Montpellier a perdu gros. Mais attention quand même à cette équipe. Même si l’UBB et Toulouse sont favoris, ces deux formations vont devoir franchir les barbelés dressés par Castres et Montpellier.

Vous êtes hors-jeu !

Cet article est réservé aux abonnés.

Profitez de notre offre pour lire la suite.

Abonnement SANS ENGAGEMENT à partir de

0,99€ le premier mois

Je m'abonne
Voir les commentaires
Réagir
Vous avez droit à 3 commentaires par jour. Pour contribuer en illimité, abonnez vous. S'abonner

Souhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?