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Portrait de Gaël Dréan (Toulon) : Lorient express

  • On le présente volontiers comme la version bretonne de Gabin Villière : mais qui est l’électrique Gaël Dréan ?
    On le présente volontiers comme la version bretonne de Gabin Villière : mais qui est l’électrique Gaël Dréan ? Icon Sport
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Gaël Dréan – Ailier de Toulon. On le présente volontiers comme la version bretonne de Gabin Villière : mais qui est l’électrique Gaël Dréan (qui aura 22 ans le 22 octobre), révélation du début de saison à Toulon ? Retour sur une ascension encore plus surprenante que celle de son alter ego normand.

La Bretagne, ça nous gagne. Depuis l’été, un vent de fraîcheur venu de l’Ouest souffle sur la France du sport. Et plus précisément en provenance de Lorient, ville de 50 000 âmes. L’équipe de foot locale tutoie les sommets de la Ligue 1 : les surprenants « Merlus » pointent à la deuxième place du championnat, un point derrière le PSG et devant l’OM ou Monaco. La cité du Morbihan s’est trouvé un autre ambassadeur, tout aussi inattendu et détonant : d’une rade à l’autre, Gaël Dréan s’affirme comme la révélation du début de saison en Top 14 du côté de Toulon.

Michel Dréan (père de Gaël Dréan) : "Son gabarit l’a longtemps pénalisé. Il n’a jamais été retenu en sélection de Bretagne parce qu’il était trop petit."

En seulement trois apparitions, le gamin de l’an 2000 a obtenu ses premières lettres de noblesse, à coups de crochets et d’accélérations : avec deux essais, cinq franchissements ou encore onze défenseurs battus, ses 190 premières minutes dans l’élite ont épaté tout le monde, adversaires, supporters et observateurs. Même Michel Dréan, son père, s’avoue agréablement surpris : « Il est sur une dynamique incroyable. Lui, le premier, est étonné par sa trajectoire. » Et cet ancien footballeur de troisième division, vice-champion du monde avec l’équipe de France universitaire au début des années 80, de retisser le fil d’une histoire aussi déroutante que ne l’est son sujet : « Rien ne le prédestinait à ça. » Si ce n’est quelques aptitudes naturelles : « Je le revois tout petit sur le trampoline. Il avait une telle puissance dans les jambes. Il a toujours été très en avance d’un point de vue moteur. » Au sein d’une famille sportive, où le papa a longtemps été abonné au FC Lorient, un heureux hasard va conduire à une révélation : « Il venait de démarrer le CP quand, un jour, où on est tombé sur une simple animation de rugby organisée par le club de Lorient. Il a tout de suite accroché, comme ses deux frères. » Une passion venait de naître. La destinée, elle, n’est pas apparue aussi rapidement : « Gaël a eu un cheminement particulier. Son gabarit l’a longtemps pénalisé. Il n’a jamais été retenu en sélection de Bretagne parce qu’il était trop petit. Puis, entre cadets et juniors, il s’est métamorphosé : il est passé de plus petit de l’équipe à un athlète d’1,84 m avec un potentiel que l’on ne soupçonnait pas malgré ses qualités de vitesse et son agilité. »

« Une trajectoire impossible à prédire »

À l’été 2019, au moment où Cheslin Kolbe s’apprête à monter sur le toit du monde et où un certain Gabin Villière rejoint Toulon, Gaël Dréan, 18 ans, commence à s’émanciper à sa manière en quittant le Rugby Union Pays De Lorient. Direction Plouzané, en Fédérale 3, à 120 km au nord. « Le RUPL était encore un club récent qui partait du plus bas niveau en seniors, raconte Adrien Leroy, entraîneur de Plouzané. Gaël est arrivé avec trois ou quatre potes. Le contact s’était noué par des groupes d’étudiants qui faisaient remonter les infos sur des gars qui pouvaient être intéressés par venir. » À l’époque, le Lorientais n’est donc qu’un jeune joueur comme les autres. Avec un ou deux petits trucs en plus, tout de même : « Il était impossible de prédire une trajectoire comme la sienne. Mais, dès le premier entraînement, on a vu qu’il allait vite, qu’il était en forme et qu’il rivalisait avec les plus gros gabarits. Le moment où on s’est dit qu’il avait effectivement quelque chose, c’est lors de son premier match officiel à La Baule : il avait intercepté un ballon dans nos 22 mètres et avait marqué. » Le premier de ses dix-huit essais lors de cette saison. La seule passée en Fédérale 3 : « Même si l’on aurait aimé le garder un an de plus, il était logique qu’il parte à Rennes. Pour connaître ce niveau, je le voyais largement évoluer au sein d’une équipe de Fédérale 1. » Les entraîneurs du REC ne le voyaient peut-être pas si haut si vite : « Eux, ils prenaient un joueur qui a du potentiel mais ils ne se disaient pas qu’il allait jouer en première directement », rapporte Adrien Leroy. « Le Rec l’avait approché pour intégrer les espoirs », confirme Michel Dréan. Après les premières séances, les entraîneurs Kévin Courties et Vincent Bréhonnet se laissent tenter et le propulsent dans le XV départ. Comme à Plouzané, son fils va saisir la première occasion, au premier match : « Au bout de trois minutes, l’arrière de Périgueux tergiverse sur un ballon et Gaël arrive comme une bombe et marque. »

Le roi des premières fois

La belle petite histoire commence dès lors à devenir sérieuse : « Lorient a été très important dans sa construction mais son passage à Rennes a été une révélation. Il avait montré des qualités de vitesse en Fédérale 3 mais on ne soupçonnait pas cette faculté à passer les paliers aussi rapidement. » Le petit Lorientais en qui pas grand monde ne croyait devient un des meilleurs finisseurs de l’élite amateur avec quatorze essais sur la saison 2021-2022.

Michel Dréan (père de Gaël Dréan) : « Quand Laurent Emmanuelli a pris contact avec lui, ça a été la grosse surprise. Il s’était quasiment engagé avec un club de Pro D2. »

Et un champion de France de Fédérale 1 en sus. France 7 mais aussi Vannes et Grenoble le suivent de près. Il est sur le point de signer avec le RC Vannes, à 50 km du bercail, quand un coup de fil inattendu lui offre une autre opportunité, à 900 km. « Quand Laurent Emmanuelli a pris contact avec lui, ça a été la grosse surprise. Il s’était quasiment engagé avec un club de Pro D2. Puis il y a eu les conversations avec Azéma et Mignoni. Ils l’ont appelé, l’ont rassuré et l’ont convaincu. » « Honnêtement, je n’étais pas très chaud au début, reconnaît aujourd’hui l’intéressé. C’était une grosse marche. Au début, je la trouvais un peu trop grande, je me disais que si c’était pour jouer avec les espoirs, il valait mieux continuer à faire étape par étape. […] Même si j’ai mis du temps à me l’avouer, peut-être par peur du changement total, je savais que j’allais dire oui à Toulon. » Quitte à devoir aménager sa licence de Staps. « Je suis reconnaissant envers le RCT et ses entraîneurs, reprend Michel Dréan. C’est le seul club de Top 14 qui a cru en lui. » Le mérite de sa réussite en revient avant tout à son fils : « Il a consenti un énorme travail pour parvenir à l’athlète qu’il est : il a fait beaucoup d’efforts en musculation, en travail athlétique… Il s’est construit dans l’adversité. Là où on ne l’attendait pas, il a fait la démonstration qu’il avait le potentiel. Mais il n’y a pas d’idée de revanche derrière tout ça. Ce qui le caractérise, c’est sa très grosse détermination et sa capacité à assumer ses choix. » Sa manière de marquer les esprits d’entrée est aussi un de ses traits les plus remarquables. Comme avec Plouzané, comme avec Rennes, l’ailier a frappé dès sa première apparition en rouge et noir, face à Clermont.

Comment ne pas déjà voir à travers lui une version bretonne du Normand Gabin Villière ? Le parallèle est des plus tentants, évidemment. Le Breton a d’ailleurs réalisé des débuts encore plus convaincants en rouge et noir, l’ancien Rouennais ayant dû attendre sa dixième feuille de match en Top 14 pour ouvrir son compteur d’essai, après avoir déjà frappé en Challenge. « Villière est l’exemple à suivre, affirme son papa. Il s’est aussi construit sans centre de formation, en dehors des réseaux traditionnels et est parvenu au plus haut niveau… » Jusqu’en équipe de France. Et si, en l’absence du natif de Vire, actuellement blessé, Gaël Dréan devenait le nouvel Ovni des Bleus cet automne ? Qui sait, après tout ? Avec le Lorientais, ce qui paraissait impensable encore peu n’est plus impossible.

Digest :

Né le : 22 octobre 2000 à Lorient (Morbihan)

Mensurations : 1,84 m, 84 kg

Poste : ailier

Clubs successifs : Lorient (2008-2019), Plouzané (2019-2020), Rennes (2020-2022), Toulon (2022-).

Palmarès : champion de France de Fédérale 1 (2022).

Le VII, l’autre tremplin

Dans la surprenante ascension de Gaël Dréan, le rugby à 7 occupe une place cruciale. La discipline a été un véritable tremplin : l’an passé, pour la première édition de L’InExtenso Supersevens, le Lorientais, repéré grâce à ses performances au niveau amateur, avait été sacré champion de France sous les couleurs des Barbarians. En finale, fort d’une pointe de vitesse à 36 km/h, il avait notamment inscrit une merveille d’essai en solitaire. « Son passage par le 7 est intéressant, jugeait, cet été, son entraîneur Franck Azéma. Ce qui est bon dans cette école, c’est qu’il y a beaucoup de prise de responsabilités, ainsi que l’obligation d’être précis dans chaque attitude, avec ou sans ballon. » Les entraîneurs de France 7 avaient listé son nom sur leurs tablettes. À défaut d’avoir obtenu sa signature, ils l’ont déjà retenu pour des étapes européennes. De là à lui imaginer un futur dans la discipline, alors que les JO de 2024 se profilent à l’horizon ? Son profil serait en tout cas des plus intéressants : « On ne va pas le couper du 7, assure Azéma. C’est aussi quelque chose qui lui a permis de se révéler, de progresser. » V. B.

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