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Portrait - Patrick Buisson (FFR), politiquement correct

  • Qui est Patrick Buisson, l’homme dont le nom pourrait être soumis au référendum des clubs entre le 23 et 27 janvier ?
    Qui est Patrick Buisson, l’homme dont le nom pourrait être soumis au référendum des clubs entre le 23 et 27 janvier ? Midi Olympique - Patrick Derewiany
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Qui est Patrick Buisson, l’homme dont le nom pourrait être soumis au référendum des clubs entre le 23 et 27 janvier ? Rien d’autre qu’un pur passionné auteur d’un véritable Tour de France du rugby amateur en marge d’une riche carrière professionnelle, élu fédéral depuis 15 ans, qui a patiemment construit son parcours avec le souci de placer l’intérêt général avant le sien.

Réputé comme le loup blanc au sein des arcanes fédérales et des clubs de rugby amateur mais parfaitement inconnu du grand public, qui donc est Patrick Buisson, pressenti depuis de longues semaines pour occuper le fauteuil de président délégué de la FFR ? Le simple fait de poser la question pourrait titiller certaines susceptibilités… Pourtant, même les plus proches de l’actuel vice-président de la FFR en charge du rugby amateur, conviennent de sa pertinence. "Ce n’est absolument pas étonnant que le grand public n’ait jamais entendu parler de lui car s’il est renommé dans le milieu, c’est parce que c’est avant tout un travailleur de l’ombre, qui s’est construit dans la discrétion" explique Franck Séropian, président d’Uzès. Né et formé au rugby à Vienne (Isère) en 1955 dans le sillage de son père Denis, ancien joueur du vénérable CSV de l’époque Georges Brun, Patrick Buisson a ainsi effectué toutes ses classes au sein du club de la sous-préfecture iséroise, de 6 à 18 ans, avant de s’exiler une saison à Ampuis où son paternel venait de prendre en mains l’entraînement, puis de voler de ses propres ailes…

C’est ainsi qu’après avoir tenté sa chance pendant une saison à Grenoble en 1976-1977 (sans grand succès malgré quelques matchs dans l’équipe première coachée par Jean Liénard), le jeune demi de mêlée entreprit un drôle de tour de France, au hasard de ses affectations professionnelles dans le milieu de l’informatique : à Capbreton, puis du côté de Saint-Germain-en-Laye et Saint-Cyr-l’École en région parisienne, avant de regagner le sud de la France au milieu des années 90. "Je suis arrivé à la présidence d’Uzès à ce moment-là, à la suite de Claude Atcher, se souvient Séropian. À cette époque, son papa Denis Buisson s’occupait de l’école de rugby d’Uzès et comme Patrick était venu travailler sur Nîmes, il l’avait débauché. Personne ne le connaissait, alors on lui avait confié l’entraînement des juniors. C’était un peu un cadeau empoisonné, car cette équipe ne comptait même pas une vingtaine d’éléments. Personne ne pensait qu’il parviendrait à garder une équipe jusqu’au bout et, pourtant, il avait réussi à terminer la saison ! Ça m’avait marqué. Je m’étais dit : "Lui, il est fort…" Petit à petit, Patrick s’est investi au sein du club, jusqu’à le coprésider avec moi. On a fait un bon bout de chemin ensemble et on a même fait monter Uzès en Fédérale 2 en 1999 ! Pour un petit village, c’était de la science-fiction, et ça lui doit beaucoup, car c’est quelqu’un qui connaît parfaitement le rugby. De par ses relations, il arrivait toujours à trouver le bon joueur, le bon coach…"

L’informatique comme porte d’entrée à la vie d’élu local puis fédéral

Un profil taillé, à l’évidence, pour un tout autre destin… C’est ainsi que Patrick Buisson se tourna progressivement vers la vie d’élu, intégrant tout d’abord le comité de Provence dont il grimpa progressivement les échelons. "Un soir, en discutant avec le président Gilbert Chevrier, on évoquait le fait de moderniser le comité, de lui créer un site Internet, se remémore Pierre Taindjis, son ancien compagnon d’armes au comité de Provence, désormais revenu au comité départemental des Bouches-du-Rhône. C’est dire si ça remonte… À l’époque, Gilbert m’avait répondu qu’il n’y connaissait rien… Je lui ai dit qu’il n’avait pas besoin de s’y connaître, parce qu’il avait quelqu’un du métier au comité ! C’est ainsi que Patrick a été nommé responsable de je-ne-sais quelle commission, et l’aventure est partie de là. Au comité, il est devenu secrétaire général, puis président. Ensuite, il est parti à la Fédé en 2008 pour s’occuper également de la transition numérique, dans l’équipe de Pierre Camou." Un destin fédéral dans lequel Patrick Buisson a trouvé son compte puisqu’il termine actuellement son quatrième mandat, passant en cours de route des équipes Camou à celles de Laporte, au tout début de la croisade menée par l’ancien sélectionneur du XV de France. "Quand Patrick s’engage dans quelque chose, c’est parce qu’il y croit profondément, pas parce que cela correspond à son intérêt personnel, souligne Taindjis. Sinon, il aurait fait une tout autre carrière depuis longtemps… Par exemple, quand il s’est lancé avec Bernard Laporte, il a immédiatement démissionné de son poste de président du comité de Provence, alors que rien ne l’y obligeait. Il l’a simplement fait pour les autres, en disant : "Si ça ne doit pas marcher pour moi, les clubs du comité ne doivent pas payer les pots cassés". C’est dire son sens de l’intérêt général…"

La réforme des compétitions, son cheval de bataille

Cette droiture, pour ne pas dire cette forme de désintéressement, elles sont évidemment les principaux atouts de Patrick Buisson à l’heure de potentiellement affronter un référendum des clubs tout sauf acquis. Car depuis de longues années, c’est bien par sa faculté à dégager des consensus tout en maintenant une certaine fermeté dans ses positions que brille ce Gardois d’adoption, lui permettant de faire passer les réformes les plus fortes comme la récente réforme de la pyramide des compétitions. "J’ai appris à le connaître au travers l’UCRAF (le syndicat des clubs de rugby amateur, NDLR) que je préside, souligne Jean-Claude Mercier, coprésident de Périgueux. Depuis sa prise de fonction en tant que vice-président en charge du rugby amateur, j’ai découvert quelqu’un avec qui il est agréable de travailler, quelqu’un de confiance qui sait associer les gens dans ses réflexions. Mieux, c’est quelqu’un qui est capable de prendre des décisions, même si elles sont impopulaires. S’il sait très bien arrondir les angles parce qu’il a une énorme capacité d’écoute, il ne déroge pas à ses convictions."

Des propos étayés par Jean-Pierre Grand, actuel président de Gruissan. "J’ai été élu en Occitanie dans l’équipe d’Alain Doucet, et à ce titre, je représentais la Ligue à la CNDCF (commission nationale des clubs de divisions fédérales). Ma mission, c’était de représenter tous les clubs de Fédérale de la Ligue mais je n’avais pas beaucoup d’expérience dans le domaine, et pour cela Patrick Buisson m’a énormément accompagné. C’est ce qui m’a marqué au premier abord chez lui : cette gentillesse, cette humilité. Pour la réforme des compétitions amateurs dont tout le monde se félicite aujourd’hui, il a parcouru des milliers de kilomètres à la rencontre des clubs. Pas grand monde n’y croyait au départ, et pourtant, il a réussi à faire passer cette réforme parce qu’il n’a pas seulement des idées pour avoir des idées : elles correspondent aux besoins du rugby français. C’est pour cela que son prochain combat réside dans la réforme des compétitions de jeunes. Parce qu’il sait que la prochaine Coupe du monde va générer un afflux de licenciés, qu’il faudra accueillir dans de bonnes conditions."

Capacité d’écoute et force de conviction

Un risque politique évident, puisqu’il s’agit là rien moins que de s’exposer potentiellement à un vote des clubs tout en portant une mesure impopulaire auprès de ces derniers, sommés (pour faire court) de se remettre au travail au niveau de la formation plutôt que de céder à la facilité des ententes… "C’est peut-être un risque, mais s’il porte cette réforme, c’est qu’il sait où il veut aller, juge Taindjis. La principale qualité de Patrick, c’est l’écoute. Sur un sujet compliqué, il ne donne jamais de réponse tout de suite. Il emmagasine les avis et, à partir de là, il est capable de faire évoluer sa réflexion avant de trancher. Mais attention, quand il a pris sa décision, il l’a prise, et peu importe si elle est impopulaire. Ça reste un vrai demi de mêlée et s’il a choisi le côté fermé, c’est côté fermé, point. Et en plus, ce n’est pas quelqu’un qui bottera en touche." "Non seulement il connaît le rugby français de A à Z de par son parcours qui l’a vu évoluer un peu partout, mais c’est surtout un visionnaire hors pair, complète Séropian. Il sait écouter, mais quand il veut faire quelque chose, il sait aussi expliquer, et surtout aller jusqu’au bout de ses idées. Au club ou au comité de Provence, il s’est régulièrement mis en porte-à-faux avec des gens, tout comme à la FFR d’ailleurs."

Une force de caractère propre aux gens simples, de ceux qui vivent sans ostentation et droit dans leurs bottes. Retraité depuis 10 ans, marié avec Béatrice depuis 1979, père de deux enfants (Éric et Marine) et heureux grand-père de trois petites-filles, incarne aujourd’hui une figure loin du bling-bling et des coups de sang, mais rassurante pour ses interlocuteurs, sérieux sans pour autant se prendre au sérieux. "Il sait être rigoureux, mais aussi se lâcher et être convivial quand il faut, s’amuse Séropian. Lorsqu’il était président à mes côtés, sa santé m’étonnait. Il était capable de faire la fiesta très tard puis d’enchaîner le lendemain comme si de rien n’était." "À l’époque, avec la dizaine de dirigeants qui composaient le noyau dur du comité de Provence, on déjeunait ensemble une fois par semaine, sans chichis, s’esclaffe Taindjis. Ces repas du jeudi midi, c’était devenu une institution à son image : c’était très convivial mais malgré tout, ça bossait sérieusement." Ce qu’on est susceptible d’attendre, en somme, d’un président délégué de la FFR ? "À l’UCRAF, nous sommes prêts à travailler avec tout le monde, quelle que soit l’équipe, parce qu’on ne fait pas de politique, souffle Jean-Claude Mercier. Mais si ça devait être avec lui, ce ne serait pas un mauvais choix, parce qu’un homme de consensus comme lui ferait très bien l’affaire." Une assertion qu’on pourrait très vite juger sur pièce, sous réserve évidemment de l’aval du bureau fédéral et surtout du très attendu référendum des clubs…

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