Abonnés

Portrait - Soane Toevalu, dernier solo à Offenbach

Par Rayane Beyly
  • Soane Toevalu, ancien joueur professionnel sacré champion de France de Pro D2 avec Toulon en 2008, vit une ultime saison à Offenbach, un club allemand
    Soane Toevalu, ancien joueur professionnel sacré champion de France de Pro D2 avec Toulon en 2008, vit une ultime saison à Offenbach, un club allemand Midi Olympique
Publié le Mis à jour
Partager :

À 40 ans, Soane Toevalu, ancien joueur professionnel sacré champion de France de Pro D2 avec Toulon en 2008, vit une ultime saison à Offenbach, un club allemand qu’il a rejoint il y a un an.

Ceux qui pensaient l’ancien rugbyman professionnel Soane Toevalu parti à la retraite sportive apprendront qu’il brûle encore ses dernières cartouches sur les terrains. Employé depuis quatre ans au sein d’une société française spécialisée dans le traitement du gasoil, Soane Toevalu joue en parallèle au BSC 1899 Offenbach Rugby, situé à Offenbach-sur-le-Main, à deux cents kilomètres de Strasbourg. Chaque week-end de match, l’ancien Toulonnais embarque pour un Marseille - Francfort en avion, à défaut de suivre les entraînements en semaine.

Tout est parti d’une proposition étonnante, il y a environ deux ans. L’enseigne où travaille le joueur dispose de partenariats avec des constructeurs automobiles. Un jour, le directeur commercial de l’un d’eux propose au colosse (1,92 m, 110 kg) d’échanger avec le président du club de rugby d’Offenbach, équipe de deuxième division allemande à l’époque. L’idée est étonnante. De son propre aveu, l’ancien troisième ligne accepte alors « par respect et politesse ». À ce moment-là, le rugby professionnel est déjà loin derrière lui. Quelque temps après son arrêt avec Béziers en 2015, suivi de piges au niveau fédéral à Hyères-Carqueiranne et La Valette-du-Var, rien ne le prédispose à rechausser les crampons.

Il se prend pourtant au jeu et s’essaie sur un match au printemps 2021. Le voici séduit par un rugby aux antipodes de ce qu’il a connu par le passé. Niveau de jeu, infrastructures et état d’esprit n’ont rien à voir avec ses expériences d’antan à Pau, Tarbes, Toulon ou Mont-de-Marsan. Là-bas, à Offenbach, en banlieue de Francfort, point de Philip Fitzgerald, Victor Matfield, Yoann Maestri ou autres grands noms aux côtés desquels il fut champion de France de Pro D2 avec le RCT en 2008. Place à un rugby hétérogène où la plupart des équipes ne sont pas professionnelles. « Il y a beaucoup de différences de niveaux dans le même championnat. J’avais envie de découvrir une autre culture, un autre rugby totalement différent de celui de la France. Il y a une équipe contre qui nous avons marqué cent points ! J’ai demandé qui c’était. On m’a répondu que c’était des jeunes qui font des études à Cologne et qui jouent vraiment par plaisir, dans un esprit universitaire », témoigne Soane Toevalu.

« Ca remet les pieds sur terre »

Face au déséquilibre sportif, son club a survolé la compétition et atteint sans difficulté la finale la saison passée. Pour le dernier rendez-vous disputé devant ses cousins Romain Taofifenua et Jocelino Suta, Soane a failli se faire surprendre contre une solide équipe de Munich. Peu habitués aux rencontres serrées, lui et ses coéquipiers n’étaient pas loin de tomber sur un os. Ils s’étaient finalement imposés de trois points, résultat synonyme de montée en Bundesliga, la plus haute division du pays. « Dix minutes de plus et nous perdions », admet, humblement, le joueur. Aujourd’hui, le BSC 1899 Offenbach Rugby occupe une place en milieu de tableau de la première division allemande.

Dans un pays de football où les quatre étoiles mondiales de la Mannschaft sont reines, l’Ovalie reste au second plan. Si la sélection nationale à VII s’est fait son nid à l’échelle continentale, le rugby germanique est encore en sommeil. « Le peu de personnes qui suivent ce sport sont vraiment des gens passionnés. J’ai vu des stades dans des états jamais vus en France où tu te changes dans des endroits pourris. Ça te remet les pieds sur terre. C’est ça qui me plaît », confie le natif de Tarbes (Hautes-Pyrénées).

Le dépaysement n’est pas moins important lors de la préparation d’avant-match : « Il y a de la musique à fond dans les vestiaires, ça rigole, ça déconne. Tout l’inverse de ce qu’on apprend à l’école de rugby. Ça ne pose de problème à personne car l’entraîneur est australien et il a instauré une culture anglo-saxonne. » Autre scène que vous ne trouverez pas devant un match de Top 14, une cérémonie en l’honneur de l’homme au sifflet. Toevalu raconte : « À la fin du match, les deux équipes se mettent face à face, l’arbitre sur la ligne d’en-but. Ce dernier fait un débrief sur ce qu’il a vu. Tout le monde écoute. Ensuite, les deux capitaines parlent, on s’applaudit, et c’est super intéressant à voir. Il y a plus de respect envers l’arbitre qu’en France. »

Un dialogue établi avec le RCT

Pour faire évoluer le club centenaire depuis 2020 et, plus largement, le rugby en Allemagne, la présidence cherche à renforcer son attractivité auprès des joueurs étrangers. De jeunes pousses françaises en manque de temps de jeu sont dans le viseur du président d’Offenbach, Dominique Arnault. Le chef d’entreprise s’est rendu au Campus RCT courant août pour sonder l’atmosphère. « Je voudrais avoir une collaboration avec Toulon car ils ont un centre de formation extraordinaire. Si de jeunes Français veulent faire une année en Allemagne, on les recevra volontiers. De l’autre côté, le RCT m’a demandé si on pouvait détecter des jeunes allemands pour les amener à Toulon. Nous sommes prêts pour un échange réciproque. »

Avec un budget de 250 000 € par an, Offenbach a fort à faire avant de devenir un eldorado. En comparaison, le plus bas budget du Top 14 est de 17,7 millions d’euros cette saison. Le club rêve d’être un compromis pour les nombreux joueurs sans contrat. La route est encore longue. Mais un baroudeur nommé Toevalu l’a arpentée la saison passée et, preuve du succès, il aurait sans doute prolongé l’expérience si son corps lui avait permis : « Physiquement, je sature un peu. J’ai fait le tour. Cette saison sera ma dernière. Mais voir un niveau inférieur m’a fait vivre de belles choses. » Épilogue atypique d'une carrière plein remplie.

Digest

✭ Né le : 26 octobre 1982 à Tarbes (Hautes-Pyrénées)
✭Mensurations : 1,92 m, 110 kg
✭Surnom :  « Soso »
✭Poste : deuxième ou troisième ligne
✭Clubs successifs : Pau (2002-2004), Tarbes (2004-2005), Toulon (2005-2009), Mont-de-Marsan (2009-2011), Lourdes (2011-2012), Béziers (2012-2015), Carqueiranne-Hyères (2015-2019), La Valette-du-Var (2020), Offenbach (depuis 2021)
✭Sélections nationales : néant
✭ Palmarès : champion de France de Pro D2 (2008), champion d’Allemagne de D2  (2022)

Vous êtes hors-jeu !

Cet article est réservé aux abonnés.

Profitez de notre offre pour lire la suite.

Abonnement SANS ENGAGEMENT à partir de

0,99€ le premier mois

Je m'abonne
Voir les commentaires
Réagir
Vous avez droit à 3 commentaires par jour. Pour contribuer en illimité, abonnez vous. S'abonner

Souhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?