L'édito du lundi : Cas de conscience
Samedi dernier à Dublin, les coups de boutoirs irlandais ont donc fait chuter Galthié et ses hommes de leur piédestal. Ceux que l’on croyait alors invincibles, destinés à la gloire, sont ainsi brutalement redescendus sur terre et se retrouvent désormais noyés sous un flot de critiques jusqu’ici contenu par les succès enchaînés. Logique, fondé et sûrement salvateur si l’on accepte de regarder la vérité en face, maintenant que cette drogue dure qu’est la victoire en a fini avec ses effets enchanteurs…
Désormais, il n’est plus temps de se bercer d’illusions, de céder à la béatitude et de tout voir en rose - ou bleu - autour de nous. Vous l’aurez lu, tout y passe sur le front de la critique : plan de jeu, conduite stratégique, préparation physique, coaching, sélection des hommes et leurs performances sur le terrain… Même le meilleur championnat du monde - notre cher Top 14 - n’a plus autant de supporters qu’au lendemain du Grand Chelem 2022, quand les Bleus marchaient sur le monde.
Depuis, la roue a tourné. Celui qui était porté aux nues pour sa capacité à préparer au mieux les internationaux, est cette fois accusé de trop les solliciter. La faute à ce calendrier qui déborde toujours ; la faute à cette économie ultra-dépendante du nombre de matchs à domicile ; la faute à cette concurrence endiablée qui transforme les terrains en champs de bataille(s).
Mais, ne nous leurrons pas. Au-delà du temps de jeu qui s’accumule dangereusement pour certains, vous aurez certainement perçu comme nous le contraste rugbystique saisissant entre un match du Tournoi joué sur la lame effilé de la très haute intensité et la réalité du Top 14 avec ses guerres de tranchées, déchets, mêlées chronophages et temps de jeu loin des standards internationaux. Samedi soir, le sommet entre Toulon et Toulouse fut ainsi très, très loin de tenir ses promesses. En guise de spectacle, il nous a tout juste offert une caricature aux traits profondément marqués.
Soyons lucides, ce n’est pas ce rugby trop restrictif et beaucoup trop approximatif qui prépare les internationaux français à rivaliser avec l’Irlande ; ni même avec cette Écosse qui ne s’avancera pas moins joueuse, dimanche au Stade de France. Ce ne sont pas ces combats sourds et lents qui feront grandir les Bleus et leur permettront d’aborder les prochains rendez-vous avec les repères de ceux qui pilotent régulièrement pied au plancher. Et plus que tout, ce n’est pas un tel rugby de peu qui remplira les stades du Top 14.
Heureusement, tout n’est pas à jeter et le talent de la génération Dupont reste immense. Alors, comme toujours, on croisera les doigts pour que la préparation estivale permette de gommer les différences avant la Coupe du monde et même de livrer la part de sublime qui habite ces Bleus quand ils sont frais, batteries chargées comme après la sortie du Covid.
Pour l’avenir, la prise de conscience et la révolution de palais qui devrait suivre, il faudra attendre certainement encore un bon moment. Mais ne désespérons pas : un jour ou l’autre les lignes finiront bien par bouger. Et l’ambition par s’imposer.
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