6 Nations Féminin - Audrey Forlani, de "tricarde" à capitaine

Trente et un ans, 57 sélections, le grand chelem 2018 : Audrey Forlani avait le CV pour devenir capitaine des Bleues. Deuxième ligne besogneuse, dure au mal, utile en touche, friande des départs au ras, elle avait également le profil. Parmi les "mamans" du vestiaire de Blagnac, club le plus représenté en Bleu, elle était également capitaine lors de la dernière finale d’Élite 1. Ce n’est pas la plus bavarde, ni la plus exubérante, loin de là, mais physiquement elle en impose, et son exemplarité conforte sa stature.

Pourquoi ce choix est surprenant ? Parce qu’elle n’était pas convoquée pour la dernière compétition majeure. Et pas n’importe laquelle, c’était pour la Coupe du monde de Nouvelle-Zélande. Barrée au poste de 5 par Madoussou Fall, le nouveau perce-muraille des "Humbles et Affamées" (leur credo) et doublée par la Toulousain Céline Ferer en 4, elle perd sa place de titulaire. De là à la voir exclue du groupe… Mais le goût de l’ex-sélectionneur Thomas Darracq pour la sélection de jeunes éléments comme Feleu ou Escudero l’explique.

Elle revient de loin

Celle qui a commencé le rugby à Beaumont-de-Lomagne (Tarn-et-Garonne) avait pourtant travaillé très dur pour retrouver son niveau pour le Mondial. Elle y était parvenue après avoir passé une longue année à l’infirmerie. Touchée dans un premier temps au psoas, son retour sur les terrains fut douloureux et montrait que le problème n’avait pas complètement été traité. Après plusieurs tests, les médecins sont allés jusqu’à déclencher des percussions dans la tête de sa rotule afin de la briser pour qu’elle se reforme complètement. Elle nous confiait en fin de saison 2021, lors de sa reprise : "Ça n’a pas toujours été évident. Ce rythme de se soigner, reprendre, avoir encore des douleurs, se soigner, reprendre… À un moment, j’ai songé à arrêter. Heureusement mon entourage m’a soutenu." Et il a bien fait ! Deux ans plus tard, Forlani sera le fer de lance des Bleues, avec une quête en tête, remporter un second grand chelem et enfin faire tomber l’Angleterre. La mission a déjà commencé puisque, pendant que ses partenaires poursuivent leur semaine d’entraînement entre Blagnac et Toulouse, elle s’est envolée pour Londres pour la journée de présentation du Tournoi.

Cette mission, pour le moment, ne lui est confiée qu’à court terme. "Son capitanat est pour les 6 Nations, nous confirmait le sélectionneur-entraîneur David Ortiz. On veut construire ce capitanat en vue de la prochaine Coupe du monde et cela prendra un an, un an et demi car on veut y travailler avec le groupe. Audrey nous paraissait être le profil idéal pour ce Tournoi : par rapport à ce qu’elle représente, à sa résilience qui est une valeur que l’on souhaite vraiment mettre en avant dans cette équipe, à ce qu’elle a vécu et où elle en est maintenant, à ses performances en club, ainsi qu’au fait qu’elle est déjà capitaine dans son club. On a fait le tour des profils et le sien se dégageait. Dans nos critères, la notion d’expérience était très importante. Certes, c’est une nouvelle page mais cela nous paraissait difficile de confier ce rôle à une jeune. Cela ne veut pas dire que dans un ou deux ans, une jeune sera capitaine ou l’inverse…" On en est pas encore là. D’ici là, les Bleues ont un Tournoi à gagner.