Champions Cup - Grégory Alldritt (La Rochelle) : l’homme sans limite

Que peut bien dire Ronan O’Gara à Gregory Alldritt lors du retour vidéo ? La question fait forcément sourire, et notamment le manager du Stade rochelais : "Un en-avant qu’il a fait sur un pick and go, mais ça devait être son frère car ce n’est pas Greg qui fait des en-avant comme ça." Mais la question mérite d’être posée tant le numéro 8 tricolore domine les débats depuis plusieurs semaines, tout en étant capable d’élever encore son niveau de jeu pour cette demi-finale de Champions Cup. Alors, l’ancien ouvreur du Munster a été plus sérieux pour évoquer la prestation de son capitaine au Matmut Atlantique : "Je suis très fier de l’évolution de Greg. Derrière le joueur, c’est intéressant de voir beaucoup d’intelligence, avec cette capacité à trouver les bons mots. J’ai remarqué qu’il était très serein avant le match, avec une faculté à se transformer au coup d’envoi. C’est un grand capitaine." Sur sa prestation personnelle, il n’y avait rien à dire, mis à part les félicitations d’usage. En effet, Grégory Alldritt a certainement confirmé qu’il était le meilleur numéro 8 du monde, comme l’avouait récemment le demi Tawera Kerr Barlow : "Grégory Alldritt était un espoir quand je suis arrivé et il est sans doute le meilleur numéro 8 au monde. C’est super de pouvoir assister à toute cette évolution." Même hommage de la part de Romain Sazy seulement quelques jours avant le rendez-vous en terres bordelaises, évoquant des "prédispositions monstrueuses" mais pas seulement : "Quand il est arrivé, il n’était pas à ce niveau-là. Aujourd’hui, il a explosé. Je pense que Greg a fait des sacrifices, il a beaucoup bossé. C’est quelqu’un d’hyper important pour l’équipe. Le club peut se bâtir sur quelqu’un comme lui."

Des statistiques phénoménales

Il est surtout la plaque tournante du système de jeu rochelais. Ses statistiques dans cette Champions Cup le démontrent. Les chiffres avant l’affrontement face aux Chiefs étaient déjà criants. L’ancien Auscitain avait effectué quarante-et-un picks and go pour un gain de quarante-deux mètres. C’était bien entendu le record de la compétition. C’était aussi tout simplement le joueur qui avait effectué le plus de courses avec le ballon (97), avec notamment 116 mètres gagnés après contact. Ne cherchez pas, c’est aussi un record. Et, ça ne sert à rien de maintenir le suspense : Grégory Alldritt a encore fait grimper ses statistiques, jouant quatorze ballons pour un gain de quarante-deux mètres. Et puis, il y a des choses que les chiffres ne peuvent pas dire. Tout d’abord, il a surclassé Sam Simmonds, son adversaire direct qui est pourtant lui aussi redouté sur toutes les pelouses d’Europe. Acteur majeur lors du sacre des Chiefs en 2020, ce dernier avait d’ailleurs à cœur de se mesurer au Rochelais, comme il l’avouait au moment d’évoquer ce déplacement en France : "C’est devenu l’un des meilleurs numéros 8 en Europe. Il est vraiment fort. Mais j’espère remporter la bataille face à lui ce week-end." Simmonds, le futur montpelliérain pensait avoir pris l’ascendant grâce à son essai tout en puissance sur une pénalité jouée à la main. Grégory Alldritt lui a répondu et de quelle manière, assurant le relais sur le premier essai de la Rochelle, puis en effectuant une passe quasiment aveugle et décisive sur le deuxième essai maritime inscrit par Ulupano Seuteni qui pouvait savourer en marchant dans l’en-but anglais.

"Ça ne nous suffit pas"

Plus personne n’arrête ne peut arrêter Grégory Alldritt, ni le Stade rochelais qui vient de signer son neuvième succès consécutif toutes compétitions confondues. "Je ne savais pour cette série, avouait après la rencontre le capitaine des Jaune et Noir. On ne regarde pas derrière. En étant qualifié pour cette finale à Dublin, nous avons atteint notre premier objectif mais il reste des matchs de championnat et nous voulons être bien placés en Top 14. Nous avons la chance d’avoir un groupe de quarante-cinq joueurs qui sont concernés. Il y a juste à voir la fierté et le bonheur de ceux qui étaient hors groupe aujourd’hui. Ça prouve que c’est quelque chose de sincère. On va profiter ce dimanche soir mais basculer dès mardi sur la rencontre face à Toulon. Nous avons la chance de basculer sur un match au Vélodrome en prime time. C’est tout ce que l’on aime. On joue au rugby pour vivre ces moments et jouer ces grands matchs. On ne va pas baisser la cadence, même s’il est certain que nous allons avoir cette finale dans un coin de la tête. Le club et le groupe grandissent d’année en année et pour être honnête, une finale de Champions Cup, ça ne nous suffit pas. Nous sommes très ambitieux et on vise très haut pour progresser chaque année." Il ne faut pas y voir de l’arrogance. Ce n’est pas le genre de l’homme. Simplement une soif de titre et de gloire. Et si le rugby français se félicite en toute logique des lauriers tressés à son copain Antoine Dupont depuis quelques années, Grégory Alldritt mériterait amplement d’être mis en avant avec des récompenses individuelles tant il fait briller le collectif rochelais. Ça tombe bien, il est en course pour le titre de joueur EPCR de l’année. Un triomphe à Dublin le 20 mai prochain face au Leinster viendrait certainement réparer l’oubli de la saison dernière alors que La Rochelle accrochait sa première étoile sur son maillot.