L'édito : une star, pour quoi faire ?

Par Léo FAURE
  • Ce mercredi, la Section paloise a officialisé l'arrivée de Sam Whitelock après la Coupe du monde
    Ce mercredi, la Section paloise a officialisé l'arrivée de Sam Whitelock après la Coupe du monde Icon Sport - Hugo Pfeiffer
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C’est toujours chouette, d’annoncer une star à l’arrivage. Ça fait riche, ça pose beau sur la photo et ça attire, paraît-il, du beau monde au stade. Et puis, ça fait gagner. Pas vrai ? Non, pas toujours vrai. C’est ici que Pau devrait se méfier. Et se construire.

Ce mercredi, le club béarnais a donc officialisé ce qui n’avait jusqu’ici que peu fuité : l’arrivée prochaine de Sam Whitelock, au crépuscule de la Coupe du monde. Le genre de mec dont on ne débat même plus du statut de légende : joueur le plus capé de l’histoire des All Blacks (143 sélections), régulièrement capitaine, deux fois champion du monde (2011, 2015), quatre fois vainqueur du Super Rugby. On s’incline. Bienvenue en France, cher Sam. Hâte de vous rencontrer sur nos pelouses.

La qualité de l’homme et du joueur n’est certainement pas en doute. À 34 ans et au rythme moyen de 8 matchs de club par saison, depuis la dernière Coupe du monde 2019 au Japon, rien n’indique un état d’usure trop avancé, ni une possible démotivation. Nous ne lui ferons certainement pas ce procès d’intention. Pas à un tel monstre de ce jeu.

Le problème est donc ailleurs. Ce n’est pas celui de l’homme, mais celui du projet. Si la venue de Whitelock a tous les traits du super coup pour la Section, elle recèle également une part de péril. Celui de penser qu’une star fait une équipe, ce qui est évidemment faux. Ce qui a pu parfois piéger le club béarnais, ces dernières saisons.

Dans un passé récent, la Section arrivée en Top 14 à grands coups de pétrodollars (2016) clamait de grandes et belles ambitions. Conrad Smith et Colin Slade, deux all blacks champions du monde dont une (autre) légende, incarnaient cette politique désireuse et dépensière. Ça avait de la gueule, déjà.

D’autres recrutements de cet acabit suivront. Pour quel résultat ? Huitième au mieux, douzième au pire depuis sept saisons que les Béarnais sont de retour en élite. Ce qui assure le maintien sans en passer par des barrages, même si cela fut parfois validé à la dernière journée de la phase régulière. Mais cela ne permet pas plus. Ce qui, jusqu’à plus ample informé, ressemble à un succès très relatif.

D’autres modèles donnent d’autres résultats, et parfois meilleurs. Prenez le voisin bayonnais, par exemple, surprenant huitième de ce Top 14 malgré son statut de promu et un budget inférieur. C’est que derrière un effectif savamment pensé et construit, il y a tout un projet de club qui s’enclenche.

Prenez également le Stade rochelais. Autour d’un ou deux grands noms, le club maritime bâtit surtout un collectif et un projet clairement posé, revendiqué. Avec le recrutement de joueurs qui lui correspondent. Danty ou Dulin étaient en perte de vitesse, lorsqu’ils avaient rejoint la côte charentaise. Atonio, Botia, Bourdeau et Wardi venaient du Pro D2, Bourgarit et Alldritt de Fédérale 1. Ça claque moins sur la photo, c’est clair. Pourtant, tous sont aujourd’hui double champions d’Europe.

C’est la tendance des années 2020 et un modèle qui marche, c’est désormais établi. Fini le temps du "tout pour les stars" et la course à l’armement qui avait conduit à l’hégémonie toulonnaise sur la scène européenne. L’air du temps est à la cohérence. Et Pau, qui a sans nul doute réussi un des plus beaux recrutements de la saison à venir, devra s’en souvenir. Pour ne pas s’en contenter.

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