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XV de France - Fabien Galthié : « Cette tournée sera un nouvel incubateur »

  • Fabien Galthié évoque la tournée d'été qui attend les Bleus au Japon, sachant que 20 Bleus vont jouer avec les Barbarians britanniques.
    Fabien Galthié évoque la tournée d'été qui attend les Bleus au Japon, sachant que 20 Bleus vont jouer avec les Barbarians britanniques. Icon Sport - Baptiste Fernandez
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C’est un peu moins de trois mois après le grand chelem que Fabien Galthié, sélectionneur du XV de France, a choisi Midol pour sa rentrée médiatique, avant une tournée au Japon pour laquelle il précise sa stratégie et glisse les premiers noms. Un rendez-vous qui sera précédé d’un test des Barbarians britanniques, d’autant plus important que 20 Tricolores y prendront part…

On vous a quitté au mois de mars, après avoir conquis face à l’Angleterre le 10e grand chelem du rugby français. Comment avez-vous occupé le temps, depuis ?

Après le Tournoi, nous avons beaucoup échangé avec les clubs pour voir comment organiser notre calendrier. Il y a d’abord certains joueurs qui ne pourront pas participer à la tournée à cause de blessures, comme Willemse, Villière ou Barassi. Mais au-delà des blessures, il y a aussi des joueurs "premiums" qui vont avoir besoin de repos. Je pense par exemple à l’ossature des joueurs qui a participé au grand chelem et à notre série de 8 victoires. Par exemple, après en avoir discuté avec lui, nous allons laisser au repos un garçon comme Romain Taofifenua, bien que sa saison avec Lyon soit déjà terminée. D’autres au contraire étaient enthousiastes à l’idée d’enchaîner les Barbarians britanniques puis la tournée au Japon, comme Damian Penaud qui a été blessé sur cette fin de saison et a faim de rugby.

Puisque vous évoquez ce match avec les Barbarians, quand et comment les contacts se sont-ils noués ?

Les Barbarians m’avaient contacté au début du Tournoi. Je leur ai d’abord dit que je préférais attendre la fin de la compétition pour me décider. Là, le deal que j’ai passé avec eux était clair : d’abord, avoir l’accord de mon président, ensuite qu’une partie de mon staff m’accompagne (Thibaut Giroud, Laurent Labit, Karim Ghezal, William Servat, Shaun Edwards, un analyse vidéo et un sport-scientist), et enfin qu’une vingtaine de joueurs français fassent partie du groupe, en plus de 8 stars internationales. Le but était de nous permettre "d’entraîner à entraîner" avant le départ du XV de France pour le Japon, comme nous le faisons avant chaque échéance internationale. Comme camp de base, les Barbarians nous ont proposé Monaco, ce qui est d’autant plus génial que les moins de 20 ans français seront en stage à Nice. Cela nous permettra d’organiser une opposition avec eux, mardi. Ensuite, nous partirons pour Londres mercredi, où nous avons prévu un entraînement jeudi avec une équipe anglaise.

En termes de sélection, comment allez-vous procéder pour enchaîner ces deux échéances ?

Il faut d’abord savoir que tous les lundis, avec le comité de sélection, nous tenons à jour une liste d’environ 90 noms, que l’on ajuste en fonction des blessures ou des performances. Tous ces joueurs savent qu’ils peuvent être appelés pour nous rejoindre avec les Barbarians. Nous allons d’ailleurs nous réunir à Monaco dimanche soir pour appeler les joueurs la nuit suivant les barrages, avant de procéder de la même manière depuis Londres pour le groupe des 42 du XV de France, le 19 juin. Pendant ce temps l’autre partie du staff avec Raphaël Ibañez supervisera en direct les demi-finales, à Nice.

Au sujet des Barbarians, qui sont ces "stars" internationales, et participeront-elles au stage à Monaco ?

Les vingt français nous rejoindront à Monaco à partir de lundi. Pour les huit autres, ils peuvent venir comme nous rejoindre le jeudi à Londres, à leur guise. Tout ce que je peux vous dire, au sujet des étrangers, c’est qu’il y aura dans l’équipe George Kruis et Danny Care. Les autres seront communiqués dimanche.

 

Damian Penaud sera avec nous avec les Barbarians, tout comme Jean-Baptiste Gros, Dylan Cretin et Charles Ollivon qui sera le capitaine. Par contre, il est trop tôt pour dire s'il le sera aussi pour notre tournée

Quid des joueurs français ?

Nous avons un peu plus de certitudes (sourire). En plus de Damian Penaud, je peux déjà vous dire que nous pourrons compter sur Jean-Baptiste Gros, Dylan Cretin, et Charles Ollivon qui sera le capitaine. Tous ces joueurs affronteront l’Angleterre dimanche 19 à Twickenham, avant de rentrer sur Paris pour trois jours de travail lundi, mardi et mercredi avec le groupe des 42. Ensuite, nous décollerons pour le Japon mercredi soir.

Cette semaine avec les Barbarians est-elle dissociable de votre préparation pour le Japon, au final ?

Les Barbarians Britanniques, c’est d’abord une institution à respecter, avec des règles de conduite que nous allons expliquer aux joueurs mais aussi un jeu offensif, aventureux, ambitieux. Là encore, on va être dans le merveilleux. On va essayer de sensibiliser nos joueurs français à cette culture, on a déjà préparé quelques petits montages autour des images de l’essai de Gareth Edwards en 1973 contre les Blacks. Cet état d’esprit demeure un terreau fertile à l’expression des talents, c’est pourquoi on espère qu’il va nous permettre d’affiner notre projet de jeu. On a débriefé la version 6 qui était celle du Tournoi, et désormais on va se projeter sur la V7. Au final, dans ces conditions de travail, on se rapproche plus ou moins de ce que nous avons connu l’été dernier en Australie. On attend de cette tournée au Japon qu’elle soit un nouvel incubateur, un révélateur de talents, et cela commencera effectivement dès notre rassemblement à Monaco.

Ce signifie-t-il que tous les joueurs appelés avec les Baa-Baas sont assurés de partir au Japon ?

Pas forcément, c’est le lot des squads "à tiroir". Cette liste dépendra étroitement des résultats des demi-finales, puisqu’il est convenu que nous partirons sans les finalistes. Les joueurs seront prévenus en amont, mais la liste définitive ne sera annoncée que le dimanche 19 après le match des Barbarians Britanniques, pour tenir compte d’éventuelles blessures. Globalement, les joueurs qui seront avec nous en Angleterre seront de la liste du XV de France, mais on ne s’interdit pas qu’en fonction des résultats des phases finales, certains Barbarians ne partent pas au Japon.

On va d'abord se donner le temps de se rassembler à 42 avec les Bleus pour désigner notre capitaine au Japon, ce sera une de nos discussions

Vous disiez avoir choisi de ne pas sélectionner de finalistes pour cette tournée. Pourquoi, au juste ?

On aurait pu prendre des finalistes et les exempter de premier test, bien sûr… Mais pour l’avoir vécu comme joueur, je sais qu’après une finale gagnée ou perdue, il faut une quinzaine de jours pour se rétablir physiquement et psychiquement, afin de jouer un match de haut niveau. Et je ne parle même pas d’autres données comme le voyage ou le décalage horaire… On n’allait pas prolonger leur saison de trois semaines pour un seul test.

Vous disiez aussi avoir nommé Charles Ollivon capitaine des Barbarians. Difficile donc d’imaginer qu’il ne sera pas aussi celui des Bleus au Japon…

Là encore, pas forcément, ce sera une de nos discussions. Nous aurons 20 joueurs français disponibles à partir de ce week-end, alors il fallait décider vite, mais d’autres nous rejoindront après. Le capitanat, ce n’est pas quelque chose qui se décide individuellement. Il y avait un groupe de cinq leaders autour d’Antoine Dupont pendant le Tournoi, alors on va se donner le temps de se rassembler à 42 avec les Bleus pour désigner notre capitaine pour la tournée. On tient vraiment beaucoup à ce chiffre de 42, c’est vraiment la base de notre projet. (mystérieux) Parce qu’il nous permet facilement d’alléger le groupe d’un tiers en passant de 42 à 28, mais pas que…

 

XV de France - Fabien Galthié, sélectionneur du XV de France.
XV de France - Fabien Galthié, sélectionneur du XV de France. Icon Sport - Hugo Pfeiffer

 

Justement, pour composer un groupe de 42 en se privant des joueurs "premiums", les nouveaux venus seront nombreux. Avez-vous déjà des noms à suggérer ?

Au niveau du pack, le pilier bayonnais Matis Perchaud est dans les radars. On peut aussi parler de Christopher Tolofua qui est bien revenu avec Toulon, mais aussi de Sipili Falatea ou de l’Oyonnaxien Thomas Laclayat, qui a explosé aux yeux de tout le monde avec sa percée de 50 mètres contre Bayonne mais qu’on suit depuis un certain temps déjà. Il y a aussi Pierre Bochaton, Bastien Vergnes-Taillefer, Matthias Haddad, Jordan Joseph qu’on a déjà vus dans nos rassemblements… Derrière, Pierre-Louis Barassi est forfait, comme Antoine Frisch (centre de Bristol en partance pour le Munster, N.D.L.R.) dont on regrette qu’il se soit blessé à l’épaule, car nous suivons son parcours de près. On regarde également attentivement le retour d’Arthur Vincent, mais aussi le comportement de Virimi Vakatawa et Yoram Moefana qui vont s’affronter dimanche. On regarde aussi Max Spring et Nolann Le Garrec, le Bayonnais Rémy Baget, le Montois Léo Coly… On ne s’interdit pas également de regarder chez les moins de 20 ans qui seront en stage à Nice, notamment leurs centres Émilien Gailleton et Louis Le Brun, ou encore l’ailier Enzo Reybier.

Pierre-Henry Broncan est le leader d'une nouvelle génération de techniciens qui est pour beaucoup dans la qualité actuelle du rugby français

Parlons de votre futur adversaire japonais, qu’on a perdu de vue depuis la Coupe du monde 2019…

Depuis cette Coupe du monde, c’est vrai que les Japonais ont peu joué, à cause du covid ou pour d’autres raisons. Ils ont un championnat qui n’intéresse pas encore les joueurs français - même si je sais qu’un garçon comme Yannick Youyoutte y a évolué quelques mois dans le cadre d’un échange entre Toulouse et les Yamaha Jubilo - mais pourrait le faire très rapidement, car les saisons y sont très courtes, très intenses, et le jeu très rapide. Ce sont des conditions idéales pour se préparer au très haut niveau. Concernant l’équipe nationale, on la regarde comme une sélection qui est en progression constante et fait partie du Tiers 1. Parce qu’elle a atteint les quarts de finale de la dernière Coupe du monde face aux futurs vainqueurs, mais aussi parce qu’elle a contraint le XV de France au match nul à l’Arena, lors de sa dernière confrontation avec les Bleus (23-23 en 2017, N.D.L.R.).

Même si l’ossature sera différente des 8 derniers matchs, le XV de France peut battre un record historique de victoires consécutives au Japon…

Comme vous l’avez dit, ce sera une autre équipe… Mais on a le droit d’être ambitieux. Nous, le staff, nous savons ce que nous sommes capables de faire. Maintenant, c’est aux joueurs de le décider. Avant de partir en Australie l’an dernier, il me semble que notre tournée avait suscité un certain discrédit, et les joueurs se sont finalement rendus compte sur le terrain que rien n’était impossible. Nous croyons en eux, alors j’espère qu’ils prendront très vite conscience de ce qu’ils peuvent réussir.

Le parcours d’un Jaminet peut servir d’exemple…

Il n’y a pas eu que Jaminet en Australie ! Des Villière, Jelonch, Woki, Gros, Barlot, Danty, Vincent, et j’en oublie… Tous ces joueurs étaient avec nous l’été dernier, et il n’y a aucune raison pour que dans un an, je ne vous cite pas autant de noms qui auront gagné leur place avec nous pendant cette tournée au Japon.

Deux clubs français ont été sacrés champions d’Europe, quelques mois après votre grand chelem. La dynamique semble fabuleuse…

Je veux d’abord féliciter la Rochelle, et remercier Ronan O’Gara qui a eu spontanément des mots très gentils à notre égard. J’en profite aussi pour remercier Didier Lacroix, qui fait partie de cette mouvance de jeunes présidents, anciens joueurs, dont on sent qu’ils comprennent les enjeux alors que nos intérêts sont parfois contradictoires. Une de nos grandes réussites du moment, c’est cela : malgré nos contraintes, tout le monde prend la même direction. Vous savez à quel point je suis attaché à la notion d’expérience collective, d’autant que nous sommes partis à notre prise de fonction d’une équipe à 24 ans et 8 sélections de moyenne. Entre la tournée en Argentine qui a été annulée, celle en Australie où nous avons laissé 35 joueurs à la maison et celle de cet été où nous allons faire la même chose, ce sont presque dix matchs qui vont nous manquer dans la construction de notre projet. Mais entre trois matchs de plus avec nous et cinq semaines de repos pour les vainqueurs du Grand Chelem, il était préférable de privilégier les cinq semaines de repos… Tout le monde y met du sien. L’important, c’est que chacun fasse des efforts, de façon à trouver une nouvelle solution à chaque nouveau problème. Même si je ne désespère pas qu’on arrive un jour à trouver un fonctionnement qui ne pose plus de problèmes à personne…

On l’a vu au travers des noms que vous nous avez cité, le XV de France semble plus ouvert que jamais aux clubs de Pro D2. Pourquoi ?

Ce phénomène va aller croissant. Avec la Nationale et désormais la Nationale 2, toutes les divisions professionnelles ont désormais un réservoir naturel pour faire incuber et émerger des talents. Je crois qu’il y avait voilà quelques saisons un goulet d’étranglement dans l’accès au plus haut niveau, qui est en train d’exploser. C’est tout le rugby français qui va en profiter, et il faut ici renvoyer l’ascenseur à notre président Bernard Laporte, qui y est pour beaucoup. Avant, nous n’avions que le Top 14 et la Pro D2. Aujourd’hui, on compte pratiquement trente clubs pros en plus. Pour le maillage du territoire et la détection des talents, disposer d’entités à Angoulême, Cognac, Suresnes, Massy, Chambéry, Aubenas, Rennes ou que sais-je encore, c’est tout bonus.

En Top 14, les barrages opposeront quatre des plus gros pourvoyeurs du XV de France, devancés par Montpellier et Castres. Cela vous a-t-il surpris ?

Il y a une forme de logique à voir ces clubs se retrouver. C’est vrai que les barrages vont voir s’affronter quatre clubs qui sont parmi nos gros pourvoyeurs, ce n’est probablement pas un hasard non plus. Mais pour parler de Castres, je vois tout sauf un accident, et il faut féliciter son staff pour la qualité de son travail. On parle souvent de Pierre-Henry Broncan comme d’un passionné, mais ce n’est pas que ça. J’échange beaucoup avec lui, et je le vois comme le leader d’une nouvelle génération de techniciens qui est pour beaucoup dans la qualité actuelle du rugby français.

On vous suit…

Je pourrais parler du travail de Pierre Mignoni et de Julien Puricelli à Lyon, bien sûr, qui ont été récompensés par le titre en Challenge Cup. Mais aussi du boulot de garçons comme Fred Charrier ou Julien Laïrle à Bordeaux, des Bouilhou, Poitrenaud ou Thuéry à Toulouse… Il y a aussi de jeunes entraîneurs de qualité en Pro D2 comme à Bayonne, avec un Antoine Battut qui a très vite sauté le pas, mais aussi Rémi Tales et Julien Tastet à Mont-de-Marsan, Julien Sarraute et son staff à Colomiers… Attention, je n’ai évidemment rien contre des garçons comme Jono Gibbes ou Ronan O’Gara avec qui nous entretenons d’ailleurs d’excellentes relations, mais il est vrai que cette éclosion d’une nouvelle génération de techniciens français est quelque chose que l’on voit d’un très bon œil, car elle doit permettre à des garçons de progresser à tous les niveaux. Et pourquoi pas de découvrir de nouveaux parcours comme ceux des Villière, Bouthier, Hounkpatin, Jaminet… Pour l’avenir de notre rugby, on ne peut que s’en féliciter.

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