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Le rugby est-il hors de prix ?

Par Léo Faure
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    Le rugby est-il hors de prix ?
Publié le Mis à jour
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Le rugby est devenu le « spectacle » le plus cher de tous les sports collectifs à force de hausses régulières des tarifs. En développant des offres « premium » pour attirer un public plus fortuné, les clubs de Top 14 réduisent l’offre de base et se coupent de leur public historique. Désormais diffusé intégralement en direct, depuis 2007 via les différents canaux du groupe Canal +, le Top 14 connaît des affluences au stade qui souffrent de cette concurrence. Et les recettes de billetterie trinquent. Un jeu dangereux...

Par Léo FAURE

leo.faure@midi-olympique.fr

L’argent ne fait peut-être plus le bonheur des Toulousains, cette saison, mais il participe tout de même grandement à la réussite des Clermontois, Racingmen, Montpelliérains et, bien évidemment, des Toulonnais depuis plusieurs saisons. En la matière, il n’y a guère meilleure vache à lait que le bon client, qui s’assoit inlassablement en tribune. Exagéré ? À peine. Assumant environ 20 % du budget des clubs de Top 14, la billetterie est un poste majeur, après le partenariat privé. Les droits télés ? Vaste fumisterie. Il y a encore peu, il était de coutume de justifier les augmentations régulières des tarifs au stade par l’absence d’un jackpot des droits télés, versés par le diffuseur Canal +. L’exemple récent prouve qu’il n’en est rien. Lors des dernières renégociations, le rugby a plus que doublé le versement des dits droits télés (de 31,7 millions d’euros à 72 millions d’euros par saison). Sans répercussion sur la billetterie : le rugby continue d’afficher la tarification la plus élevée des sports collectifs. À l’intersaison, le prix des abonnements s’est stabilisé dans le meilleur des cas et a augmenté dans six cas (Brive, La Rochelle, Lyon, Racing-Metro, Oyonnax, Toulon).

Les affluences en stagnation

Sur les cinq dernières années, le problème devient majeur. Des 4,9 % de hausse constatée sur les abonnements à Clermont depuis 2013, jusqu’aux 30 % de hausse pratiquée à Oyonnax depuis sa montée en Top 14, le processus se prolonge et devient contre-productif. Chiffre des affluences à l’appui : il y a neuf ans pour la création du Top 14, l’affluence moyenne dans les stades, hors délocalisations, était de 8 423 spectateurs. Un chiffre qui a rapidement progressé, sous l’explosion des diffusions télévisuelles et d’un recrutement toujours plus ambitieux, faisant du rugby le sport «à la mode». En 2010-2011, les affluences atteignaient 12 612 (en moyenne après sept journées de championnat). Problème : le rugby stagne désormais et, après les sept premières journées de cette saison 2014-2015, affiche des chiffres en légère baisse : 12 434 spectateurs ont, en moyenne, rempli les gradins des stades de Top 14 chaque week-end. «Selon moi, la Ligue est en train d’obtenir ce qu’elle voulait. Le Top 14 était parti sur un élan extraordinaire mais, depuis deux ans, on pond des règlements avec pour seul but d’avoir plus de Jiff sur la feuille et des joueurs moins payés. On s’étouffe tout seul. Il ne faut pas s’étonner d’une certaine désaffection car on arrive de plus en plus difficilement à convaincre les stars du Sud, ceux qui remplissent les stades, de venir», regrette Mourad Boudjellal, dont l’équipe assure, partout où elle passe, parmi les plus belles affluences de la saison. Un président souvent qualifié de « nouveau riche » du rugby et qui, paradoxalement, éprouve une certaine nostalgie comptable des temps passés. Il en profite pour égratigner son ennemi préféré du moment : le Racing-Metro de Jacky Lorenzetti, club qui peine encore à fédérer un public large (8 355 spectateurs en moyenne cette saison). «Les clubs qui peuvent engendrer une forte billetterie ont été remplacés dans le haut du tableau ou en Top 14 par des clubs sans engouement mais avec de gros investisseurs. Si Perpignan était toujours en Top 14 et présent dans le dernier carré, les résultats seraient meilleurs au niveau des entrées payées pour tout le monde. À la place, on trouve le Racing, dont le parcours passionne beaucoup moins.»

Bordeaux-Bègles, le contre-exemple

Face à cette litanie d’illustrations négatives, il reste des raisons d’espérer. L’exemple de Bordeaux-Bègles vaut le détour. Il démontre les possibilités dont dispose ce sport, pour peu qu’il s’en donne les moyens. Osant le pari de Chaban-Delmas dès le Pro D2, l’UBB s’y est progressivement installé, au profit de la construction d’un nouveau stade pour le football (Bordeaux-Lac) mais aussi du succès de ses «délocalisations». Aujourd’hui, à l’UBB, «Chaban» est la norme, «Moga» l’exception. Une réussite que le club est allé chercher en pratiquant une politique tarifaire inverse à celle de ses concurrents : des prix bas, que ce soit pour les abonnements ou les places à l’unité, et la volonté de maintenir cette aspect. «Il y a trois raisons à cela, justifie le président Laurent Marti. Notre club grandit mais n’est pas encore grand et a encore besoin de fidéliser du public, via des opérations de séduction pour faire venir les gens au stade. Deuxièmement, nous disposons d’un stade Chaban-Delmas à 33000 places et, tant qu’il sera dans cette configuration, nous pourrons proposer des offres plus «sociales». Enfin, c’est notre conception du rugby : un sport festif et qui doit s’apprécier en famille.» Résultat : l’UBB caracole en tête des affluences du Top 14 et participe à tirer l’image du rugby vers le haut. Preuve en est, un succès n’est pas nécessairement pécuniaire.

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