Jules Plisson : entre espoir et désespoir
Jules Plisson - Ouvreur du Stade français Gravement blessé à l’épaule gauche vendredi soir, l’international a fait une croix sur les phases finales avec son club. Mais veut encore croire à la Coupe du monde. Il va s’en donner les moyens. La balle est dans le camp de Philippe Saint-André.
Ses larmes, vendredi soir sur la pelouse du stade Jean-Bouin, ont ému le monde du rugby. Jules Plisson, 23 ans, avait deux objectifs depuis le début de saison : réussir à se qualifier enfin pour les phases finales du Top 14 avec le Stade français et convaincre le sélectionneur du XV de France, Philippe Saint-André, de l’emmener en Angleterre en septembre pour y disputer la Coupe du monde. Deux objectifs, deux rêves de gamins pour l’enfant de Boulogne-Billancourt. Le premier s’est éteint dans les secondes qui ont suivi le plaquage sur Corey Flynn. Un plaquage sur lequel l’ouvreur parisien perd ses appuis, le talonneur néo-zélandais l’enterre alors, lui et ses illusions. L’épaule gauche en vrac, totalement sortie de son logement. « Le Docteur Savigny me l’a remise sur le terrain, raconte Plisson. Autant vous dire que j’ai «douillé» sur le coup. Je lui ai tout de suite demandé si c’était grave, il m’a repondu que c’était un peu emmerdant. Je lui ai demandé pour combien de temps j’en aurais, il m’a répondu : « On en reparlera plus tard, mais là, ta saison est finie. » Des propos exempts de toute ambiguïté. Il est comme ça, Alexis Savigny. Pas vraiment le genre de toubib à prendre des précautions oratoires. Avec lui, le patient sait à quoi s’en tenir. Que ça plaise ou non. Et Plisson a fondu en larmes. « Ça fait cinq ans que j’attends de pouvoir jouer des phases finales avec mon club, se lamente-t-il. Je n’ai jamais été aussi proche, je ne me suis jamais senti aussi bien dans mon corps et dans mon rugby. Sur le coup, toute la pression que j’avais depuis le début de la saison est retombée. J’ai eu l’impression que tous mes efforts n’avaient servi à rien, que tout s’était envolé sur ce foutu plaquage. »
Pascal Papé a bien essayé de le consoler. En vain. D’autres ont été touchés par les images du jeune Plisson. Dans le milieu du rugby, le garçon est apprécié. En témoignent les nombreux appels téléphoniques ou SMS reçus. En vrac : Maxime Mermoz, Sébastien Tillous-Borde, Fulgence Ouedraogo, Philippe Sella. À l’issue de la rencontre, Maxime Médard est venu le soutenir. Thierry Dusautoir, le capitaine du XV de France, aussi. Même le président de la FFR Pierre Camou s’est fendu d’un coup de fil au Parisien depuis Casablanca où il se repose quelques jours. À croire que le rugby français compte sur le demi d’ouverture parisien…
Le choix de l’opération
Vendredi soir, il ne s’est d’ailleurs pas attardé à la réception d’après-match. « Franchement, je n’avais pas vraiment faim. Tout le monde venait vers moi pour me consoler ou pour me poser des questions sur ma blessure. Ça m’a un peu saoulé, j’ai préféré rentrer chez moi, au calme. » Ses potes Raphaël Lakafia et Jonathan Danty sont passés le voir, quelques bières à la main histoire de noyer le chagrin du jeune Plisson. Même là, il n’avait pas vraiment le cœur à profiter. Surtout, il n’a pas une minute à perdre. La Coupe du monde est en ligne de mire. Pour mettre toutes les chances de son côté, le Docteur Savigny a activé son réseau et fait accélérer les « process ». Habituellement, les examens attendent le lundi matin. Pas cette fois. « Samedi matin, ma mère est passée me chercher pour aller à la clinique du sport », raconte encore l’ouvreur du Stade français. Le professeur Fontès a retardé son départ en week-end pour recevoir le joueur sitôt les résultats de l’IRM connus. Ensemble, ils ont fait le choix de l’opération. « Soit je prenais l’opération immédiatement, soit je tentais la rééducation pendant deux mois et demi pour reprendre avec le risque d’une rechute. Si j’avais été en fin de carrière, j’aurais sûrement essayé d’éviter l’opération mais la question ne s’est pas posée. Je sais que mon épaule sera encore plus solide qu’avant. »
Force est maintenant de s’interroger. Jules Plisson sera prêt à rejouer au rugby dans trois mois, soit à la fin du mois de juillet, au plus tard au début du mois d’août. Un mois après le début de la préparation, un mois et demi avant le début du Mondial. Philippe Saint-André et ses adjoints prendront-ils le risque de le retenir ? D’autres l’ont fait par le passé… La discussion est engagée au sein du staff. Plisson plaide évidemment pour sa paroisse : « J’ai encore envie d’y croire. Si je suis sérieux et si tout se passe bien pour mon opération et ma rééducation, je me dis que je peux même arriver avec beaucoup de fraîcheur. J’ai d’ailleurs dit à Patrice (Lagisquet, N.D.L.R.), lorsqu’il m’a appelé, qu’il pouvait compter sur moi pour faire les efforts nécessaires afin de revenir à mon meilleur niveau. »
Collaboration entre les équipes médicales
Aujourd’hui lundi, Jules Plisson avait rendez-vous avec Romain Teulet pour un entraînement spécifique face aux perches. Il y a encore quelques mois, l’ouvreur du Stade français n’avait pas été recensé parmi les joueurs à suivre par l’entraîneur du jeu au pied au sein du staff tricolore. En deux matchs dans le dernier Tournoi des 6 Nations, Plisson était revenu en grâce. Il était même devenu un choix prioritaire pour Philippe Saint-André et Patrice Lagisquet dans la perspective de la Coupe du monde en Angleterre. Seulement, aujourd’hui, Plisson ne butera pas avec Romain Teulet. Rendez-vous logiquement annulé. En lieu et place, il sera dans le cabinet de l’anesthésiste en charge de l’endormir mercredi à la clinique du sport à Paris avant l’opération réalisée par le professeur Fontès. La suite, Plisson ne la connaît pas encore précisément. Il espère qu’un protocole de rééducation sera mis en place entre le staff médical du Stade français et celui du XV de France. Le Docteur Savigny, médecin du Stade français, et le Docteur Grisoli ont échangé par téléphone. Et tout laisse à penser que les deux staffs vont collaborer pour permettre à Plisson de postuler parmi les 36 joueurs présélectionnés pour la préparation du Mondial, liste communiquée le 19 mai.
Christian Ramos, le psychologue du XV de France a, lui, confirmé son rendez-vous de ce lundi avec l’ouvreur stadiste. La rencontre avait été calée avant sa blessure. Les deux hommes devaient échanger dans le cadre du travail spécifique du buteur. À la place, le « psy » va probablement écouter la détresse de Plisson qui reconnaît volontiers être « à fleur de peau » depuis vendredi soir. « J’espère que ça ira mieux après l’opération, souffle-t-il. Parce que depuis vendredi, je suis au fond du seau. » Et Jules Plisson de conclure : « Je vais rater les phases finales avec mon club, mais je vais tout faire pour ne pas rater le Coupe du monde. » Premier élément de réponse, le 19 mai.
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