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Clerc: « Il faudra du temps»

Par Claire Huitel
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    Clerc: « Il faudra du temps»
Publié le Mis à jour
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L’ailier toulousain Vincent Clerc explique sa vision du rugby féminin et lance des pistes quant à son développement.

Quelle est votre vision du rugby féminin ?

Elle est plutôt bonne. Il y a quelques années, nous avions, nous les rugbymen, une vision un peu faussée de la pratique féminine. Mais cela a changé depuis qu’elle est plus médiatisée. La Coupe du monde de l’an dernier, retransmise à la télé, a mis les filles en avant. Nous avons pu voir qu’elles prennent beaucoup de plaisir, dans un jeu où l’aspect physique, les impacts, sont moins importants mais où la vitesse d’exécution, la technique et le mouvement sont très présents. C’est un rugby beaucoup plus aéré. Du coup, nous avons pris beaucoup de plaisir à les regarder jouer. Je pense aussi que le rugby à VII et les moyens mis en place par la Fédération pour son développement, en vue des jeux Olympiques, ont permis de donner une réelle existence à ce sport. Après, nous regardons déjà beaucoup de rugby et, vu que la médiatisation est plus restreinte, on n’a du mal à les suivre au quotidien. En revanche, dès qu’il y a des compétitions importantes, notamment celles du XV de France, nous les encourageons.

Est-ce que, selon vous, le monde du rugby (dirigeants, joueurs, supporters, médias) est encore machiste ?

Un peu, oui. En tant que joueur, nous avons une image très positive des filles car nous avons eu la chance de les côtoyer à Marcoussis avec l’équipe de France. Les Bleues ont souvent fait des matchs en lever ou baisser de rideaux lors de rencontres internationales. Nous avons donc une meilleure vision, beaucoup moins emprise de clichés comme cela peut être le cas pour d’autres personnes. Nous nous sommes rendu compte que les filles pouvaient jouer au rugby sans perdre leur féminité. Après, il faudra du temps, un peu comme pour le football féminin qui a rencontré un franc succès ces derniers temps, et encore plus en cette année de Coupe du monde. De toute façon, c’est la médiatisation qui change beaucoup de choses. Grâce à elle, le rugby masculin a beaucoup évolué depuis une quinzaine d’années. Il s’est professionnalisé, a changé d’image grâce à une plus large diffusion.

Quels sont vos échanges, au Stade toulousain, avec la section féminine ?

Il n’y a, pour le moment, pas vraiment d’échanges. On se croise, mais c’est tout. La plus grande différence est que nous sommes professionnels, nos entraînements se déroulent la journée ; elles ont une activité à côté et s’entraînent le soir. Elles cumulent travail et passion. Mais je pense qu’il faudrait que les choses évoluent. Ce serait très ludique d’organiser des oppositions avec le groupe féminin, de se rencontrer pour des exercices de préparation physique. Il me semble qu’on pourrait leur apporter notre expérience, notamment si nos coachs les dirigeaient sur certains entraînements par exemple. Surtout, cela nous permettrait de sentir que l’on appartient à un même club. Notre rôle pourrait aussi être, à travers l’organisation d’opérations marketing, de les aider à promouvoir le rugby féminin.

Les clubs professionnels doivent-ils aider leur section féminine à se développer ?

C’est une question compliquée. Tout d’abord, les clubs professionnels pourraient-ils compter un nombre suffisant de licenciées pour monter une équipe à XV ou vaudrait-il mieux développer le VII, discipline dans laquelle s’illustre notamment la sœur de Luke McAlister (Kayla, demi d’ouverture de la Nouvelle-Zélande, N.D.L.R.) ? Cela coûterait moins cher, et le VII féminin bénéficie d’une bonne image.

« J’achéterais à ma fille toutes les protections possibles »

Après, c’est difficile de répondre économiquement à cette question. Mais ce qui est sûr, c’est que pour que ce sport évolue, il faudra mettre des moyens afin que les joueuses puissent se consacrer uniquement au rugby. Les partenaires pourraient représenter une solution, avec une étape où des entreprises accompagneraient les joueuses, en leur adaptant leur emploi du temps car les filles doivent jouer plus.

Après la vision du sportif du haut niveau, quelle est celle de l’homme ? Si votre fille, Éloïse, vous demandait de jouer au rugby, que lui diriez-vous ?

(Rires) Je ne sais pas. Ça reste un sport de contact. Quand on est parent, on a peur que son enfant se fasse mal et je pense que j’aurais très peur pour elle si je devais la regarder jouer au bord d’un terrain. Même ma mère a encore peur quand elle vient me voir jouer. Pour autant, je veux qu’elle fasse ce qu’elle aime et, si c’est le rugby qu’elle choisit, je mettrai mes angoisses de côté et je lui achèterais toutes les protections possibles ! Pour le moment, elle n’a pas trop envie de me plaquer dans le jardin, donc j’ai un peu de temps devant moi…

Et si vous aviez un fils, réagiriez-vous de la même façon ?

Pour être honnête, pas tout à fait. Je pense qu’on a un peu moins peur si c’est un garçon, ils paraissent moins fragiles. Mais je ne pousserais jamais mes enfants à faire du rugby. Je les pousserai à faire ce qu’ils veulent, que ce soit du sport ou autre chose. Qu’ils s’épanouissent dans leur propre passion.

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