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Le poids des maux

Par midi olympique
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Et si nous devions repenser le système depuis son origine et engager une révolution des esprits chez les éducateurs ? Jugez par vous même.

La formation made in France est sujette à caution. Elle s’invite avec insistance dans les vifs débats provoqués par les infortunes de notre XV national. Les avis divergent mais il est reproché à nos jeunes produits un retard à la compréhension du jeu et un déficit fort préjudiciable de technique individuelle. Une photo, saisissante, soumise à notre jugement et un témoignage glaçant nous ont brutalement renvoyé à la source de nos maux. La photo d’abord qui montre deux coéquipiers minimes d’un club aquitain, l’un, à l’époque, de 14 ans et 3 mois, l’autre de 13 ans et 6 mois, affichant des différences de morphologie spectaculaires. Le plus costaud dépassait les 110 kg, le plus frêle pesait moins de 50 kg. Pédiatre au CHU de Bordeaux, ancien joueur et président de club, le Docteur Jean Sarlangue s’alarme de cette situation et prend clairement position : « Ceci illustre les différences génétiques mais aussi les différences de vitesse de maturation à cet âge. Le rugby est un sport de combat où les duels individuels sont importants, dans les autres sports de combat : judo, karaté, boxe, les adversaires « tirent » par catégorie de poids. Le deuxième problème, plus subtil mais au moins aussi important est celui de la formation. Souvent, les joueurs, les parents et même l’éducateur vont encourager le plus costaud à utiliser en priorité sa masse physique sans faire l’effort de développer aussi son habileté (skills), sa vision du jeu… ce qui lui manquera lorsqu’il sera, après « sélection », confronté à d’autres aussi costauds que lui… » C’est donc quand les forces physiques s’équilibrent que ces lacunes se font les plus criardes et préjudiciables. « Il suffit de voir le nombre d’en-avant que commettent les joueurs de l’équipe de France », constate le Docteur Sarlangue qui défend son credo : « Il est absurde de faire jouer les gosses qui ont un gabarit sur leur gabarit, comme c’est le cas dans la majorité des tournois, parce qu’un jour ils vont tomber sur plus gros qu’eux et surtout plus habile des mains et plus agile gestuellement. Il faut insister sur l’apprentissage des fondamentaux, d’autant que le gabarit n’est pas figé. »

«Pourquoi j’arrête...»

Chez les plus jeunes, cette recherche inappropriée de la performance au détriment du jeu et du plaisir peut provoquer quelques dégâts. Le témoignage - sous couvert d’anonymat - d’un cadet qui évoluait dans l’association d’un club professionnel du Sud-Ouest et qui a pris cette année la décision d’arrêter le rugby est édifiant. « On nous demande des résultats, les gabarits changent pour que tout le monde soit plus costaud et l’équipe plus rude à jouer. Dans mon cas, moins avantagé que d’autres physiquement et ne souhaitant pas prendre de produits pour m’endurcir et prendre deux têtes, j’ai eu quatre blessures en l’espace d’un an Cela fait presque deux ans que j’hésite à arrêter (...) mais ce que l’on me demandait de faire ne me convenait plus (...). Les zones de déblayage sur les rucks deviennent de plus en plus violentes. Il faut réglementer pour éviter les K.-O. (...) J’ai vu des entraîneurs, une heure et demi avant le match, remplir des bouteilles avec des protéines. Pour les joueurs cela semblait normal. Aujourd’hui le rugby ce n’est pas une histoire de savoir jouer ou pas, c’est une histoire de physique. J’ai des amis qui se sont fait opérer du dos, épaule, genou, rotule… » Est-il nécessaire d’en rajouter ?

Par Gérard Piffeteau

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