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« Trouver un rugby plus équilibré »

Par Léo Faure
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Au sortir du match gagné face au pays de Galles en clôture du Tournoi des 6 Nations, Guy Novès est revenu sur le match, plus généralement sur le Tournoi et sur sa situation à la tête du XV de France.

Que retirez-vous de ce Tournoi ?

J’en retire surtout un bilan rugbystique, secteur par secteur. Ceux sur lesquels nous avons été performants mais surtout ceux sur lesquels il nous faut absolument progresser. Les rucks, en premier lieu. C’est une évidence. C’est un secteur que nous avions déjà évoqué en novembre mais ce fut encore problématique. Surtout au début. Dans la deuxième moitié du Tournoi, c’était mieux. Face au pays de Galles, j’ai trouvé des comportements plus justes, des attitudes plus conformes au très haut niveau et, au final, des ballons récupérés. Dans le secteur aérien, je dirais que nous sommes à mi-chemin. Il y a eu des choses géniales, d’autres beaucoup moins acceptables. Notre secteur stable, c’est la conquête directe. Que ce soit en touche ou en mêlée, nous avons été globalement dominateurs. La défense, enfin, est une satisfaction. Notre ligne a été tout de même hyper bien gardée. Même en Irlande et en Angleterre, les adversaires ont dû s’employer pour nous marquer des essais. La globalité du bilan, c’est qu’on progresse. C’est ce qui me satisfait. 

Il y a eu, en revanche, beaucoup d’imprécisions dans votre animation offensive…

Parce qu’il y a trop de laxisme. Pourtant, sur les vingt premières minutes face au pays de Galles, nous avons prouvé que nous étions capables de bien faire. Mais ensuite, on lâche des ballons trop facilement. Que ce soit à la main ou au pied. Pour ce dernier point, ce n’était pas la priorité du début de mandat. Il y a du boulot, clairement. Le jeu au pied entrera vite dans notre processus de construction. 

À ce titre, votre défaite en Irlande a semblé marquer un tournant sur vos intentions offensives. Contraint ?

J’avais prévenu dès le départ qu’on réviserait le projet de jeu, en avançant dans le mandat. Qu’il y aurait des ajustements. En cours de Tournoi, on a effectivement demandé aux joueurs d’utiliser plus de jeu au pied que lors de la première année. Même si nous ne l’avons pas toujours bien fait. L’exemple de François Trinh-Duc est parlant, en première période : il prend un jeu au pied de pression. C’est le bon choix, au bon endroit entre les deux joueurs du fond de terrain gallois. Mais il est mal réalisé, avec le ballon qui sort en ballon mort. Le boulot, il est là. Avec le temps, il faut que nous arrivions à trouver un rugby plus équilibré. On a déjà entamé ce travail de mutation avec une plus grande alternance. On utilise plus cette arme du jeu au pied, avec des transversales pour nos ailiers ou du jeu par-dessus, qui amène notre premier essai face aux Gallois. Mais je le répète, ce n’était pas la priorité du début de mandat, qui était plus tourné vers une volonté de beaucoup jouer. Y compris depuis notre camp. Aujourd’hui, on est aussi capable de proposer d’autres choses, comme du travail dans l’axe. Ça va dans le bon sens. Il faut poursuivre. 

Vous avez choisi de stabiliser une équipe…

(il coupe) Il faut comprendre le processus de construction. La première année, il a fallu évaluer un certain nombre de joueurs. Aujourd’hui, on commence à trouver des hommes qui nous correspondent. Dès lors, la continuité devient un maître mot de notre projet. C’est une envie partagée par tout le staff. Les joueurs avec lesquels on travaille, on considère qu’ils ont du talent. S’ils se trompent, dès lors, c’est par défaut de maturité. Le seul moyen d’y remédier, c’est de leur donner de la confiance et du temps de jeu. Et ne surtout pas les juger sur un seul match. //

Personnellement, votre troisième place dans ce Tournoi a-t-elle une valeur ?

Je suis surtout content pour le grand public. Ça valide notre progression. (il marque une pause) Disons que ça parle à ceux qui ne voient pas les matchs, ou qui les survolent. Moi, je regarde les matchs. Je m’attarde plutôt sur les évaluations des secteurs de jeu. Qu’on gagne ou qu’on perde. // Cela ne vous donne-t-il pas un peu de confort ? On a que ce qu’on mérite, dans la vie. J’imagine qu’on mérite donc cette troisième place. On aurait même pu finir deuxième, mais je tiens à féliciter les Irlandais qui ont battu les Anglais. Au final, on boucle avec trois victoires et deux défaites, dont une concédée à dix minutes de la fin à Twickenham. Je me dis qu’on n’est pas aussi mauvais que tout ce que j’ai pu entendre… 

Vous vous êtes beaucoup exprimé sur le jugement négatif de votre équipe…

(il coupe) Parce qu’on a trop exagéré l’évaluation négative de mon équipe après le match en Italie. C’était trop sévère et pas toujours justifié, sur un terrain où tout le monde n’a pas pris le bonus. Pourtant, nous concernant, on a parlé de « match pauvre et triste ». Sur les résultats et la manière, je n’ai pourtant pas la sensation qu’on soit plus mauvais que l’Irlande, le pays de Galles ou l’Écosse. Notre place me semble justifiée. Il ne me semble pas, d’ailleurs, qu’on ait été surclassé par qui que ce soit depuis un moment. Que ce soit l’Argentine, l’Australie, la Nouvelle-Zélande, l’Angleterre… L’équipe de France est à ce niveau. 

Pour la première fois, votre équipe a aussi dû faire face à la pression du résultat. L’avez-vous ressentie ?

De la part de la direction fédérale, il n’y a jamais eu de pression. Ils ne nous ont jamais imposé d’objectifs comptables. De la part des éléments extérieurs, c’est différent. Yannick Bru, qui est avec l’équipe de France depuis six ans, en parlerait mieux que moi : en France, on aime bien taper sur l’équipe nationale. Peut-être que certains s’attendaient à ce qu’on gagne tout, tout de suite. Ça, c’est de l’utopie. Ça n’existe pas. Cette vision est fausse, pénible et rajoute de la pression à de jeunes joueurs qui auraient surtout besoin de confiance. Je rappelle aussi que nous sommes repartis sur un projet très différent du précédent. Il nous faut du temps. Et je rappelle enfin que nous n’aurons validé la mi-mandat qu’en novembre prochain, après les test-matchs… 

La prochaine étape, c’est l’annonce de la prochaine liste de joueurs « Elite ». Que faut-il en attendre ?

Franchement, c’est très loin. D’ici là, il y a beaucoup de choses à gérer. Le suivi des joueurs et des blessés, le tirage au sort de la prochaine Coupe du monde au Japon, des réunions de World Rugby…

Des discussions sont en cours pour élargir cette liste. Combien souhaiteriez-vous de joueurs ?

Je pense qu’avoir une quarantaine de joueurs à Marcoussis, ça serait indispensable. Aujourd’hui, on est encore sur le fil du rasoir. On ne peut pas faire d’opposition réelle parce qu’on a peur de péter des joueurs. Pourtant, ce n’est pas suffisant de s’entraîner à vide, ou avec des boucliers, quand on prépare ce type de matchs. Les entraînements à vitesse réelle nous manquent. Avec quarante joueurs, ça serait différent. Quitte à avoir un comportement intelligent avec les clubs pour leur renvoyer des joueurs non utilisés.

Est-ce réaliste ?

Les grands clubs travaillent avec trois équipes à l’entraînement. Si les Anglais font des listes de 45 joueurs, ce n’est pas non plus un hasard. Et visiblement, cela ne marche pas trop mal.

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