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Savare côté pile

Par Arnaud Beurdeley
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Publié le Mis à jour
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Il aura évité la descente au Stade français. Il lui aura aussi permis de gagner un titre de champion de France et un titre de champion d’Europe, version challenge. Et pourtant, on ne retient de lui que l’idée de la fusion...

Que retiendra-t-on des six années de Thomas Savare à la présidence du Stade français ? Se souviendra-t-on par exemple qu’en 2011, le club de la capitale aurait rejoint d’autres illustres grands noms du rugby français qui hantent les méandres des divisions fédérales si la famille Savare n’avait pas décidé de se porter candidate au sauvetage ? Et puis, comment occulter, durant cette période, ces quarante millions d’euros engloutis pour que vive un club plus que centenaire ? Il y a bien eu aussi ce titre de champion de France en 2015, véritable apogée d’une aventure improbable. Et puis, clin d’œil du destin, comme pour mieux clôturer un chapitre de cette histoire très romanesque, il y a eu cette victoire, vendredi dernier à Edimbourg en finale de Challenge Cup. Dans les fait, Thomas Savare restera donc, à jamais, comme le premier président à avoir offert un titre européen au Stade français.

Seulement voilà, la vindicte populaire, souvent dénuée de mémoire, est parfois cruelle. L’épisode tragi-comique de la fusion est passé par là. Thomas Savare a été qualifié de « fossoyeur », après avoir été accueilli en « sauveur ». Il a été attaqué, vilipendé, insulté. Sans jamais broncher, même au plus fort de la tempête. « J’ai eu peur pour lui, confie son épouse Sylvie. Au lendemain de l’annonce du projet, ça a été un assaut terrifiant. Il a été affecté car nos enfants n’ont pas été épargnés, mais il a traversé cette épreuve très dignement. » Il a notamment reconnu des erreurs de communication. A juste titre. Mais Thomas Savare n’est homme à s’épancher. Il est une bête de sang froid. « Son métier, c’est de fabriquer des billets de banque, dit souvent de lui son bras droit Pierre Arnald. Ça demande un peu de discrétion et de self-contrôle ». « Il a un petit côté très britannique, reprend encore son épouse, comme si rien ne pouvait l’atteindre. Il est très doué pour masquer ses émotions. Moi, ça fait trente ans que j’essaie de percer la carapace. » « Elle exagère un peu, sourit-il quand on lui rapporte les propos. C’est aussi un rôle de représentation, mais dans la sphère privée, je sais me lâcher. » En effet, Thomas Savare a souvent partagé les moments festifs avec ses joueurs. Dans la nuit de vendredi à samedi, accompagné de son épouse et de ses enfants (Louis, Daphnée et Pierre), il a honoré le premier trophée européen du club comme il se doit. Au passage, il a réglé personnellement l’addition d’un open-bar de plusieurs heures dans une discothèque d’Édimbourg, ouvert aux joueurs, administratif du club et même quelques supporters. Il est d’ailleurs probablement le président de Top 14 qui passe plus de temps à la bodega avec les aficionados, en toute simplicité autour d’une bière, que dans le salon présidentiel où les costards-cravate sont plus nombreux que les coupes à champagne.

Faute de modèle économique

Thomas Savare ne sera pas resté aussi longtemps au Stade français, quand bien même il a plusieurs fois répété qu’il était là « pour vingt ans ». Il va donc partir, lassé de ne pas trouver de « modèle économique » viable. Sa responsabilité est peut-être là. Ces dernières semaines, il a souvent dénoncé la surenchère des salaires menée par certains présidents. Las, il y a aussi contribué. Morné Steyn ou Will Genia ne sont pas venus à Paris pour visiter la Tour Eiffel...Et puis, lui et son équipe n’ont pas fidélisé un public en masse, dans une région certes aux multiples problématiques. Jean-Bouin n’a affiché guichets fermés qu’une seule fois durant sa présidence, c’était lors du dernier derby. Il en assume la responsabilité (lire l’interview ci-contre).

A la LNR dont il est membre du comité directeur, qu’il quittera prochainement, il laissera des regrets. Beaucoup avait justement apprécié la mesure avec laquelle il travaillait sur les dossiers. Savare a largement contribué à la cellule de réflexion menée à l’issue du fiasco du Mondial 2015. « C’est sûr que sa personnalité tranche par rapport aux autres nouveaux présidents comme Boudjellal, Lorenzetti ou Altrad. Lui faisait passer l’intérêt collectif avant l’intérêt individuel », a dernièrement ironisé une personnalité de l’institution. C’est aussi ce qu’il tente de réaliser pour le Stade français en ce moment, en s’assurant de l’avenir du club. Las, l’histoire se souviendra injustement de lui aussi pour avoir été l’instigateur d’une fusion avec le Racing 92.

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