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Championnat de France Militaire : Un nouveau combat

Par midi olympique
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Publié le Mis à jour
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Pendant une semaine, nous avons suivi le Rugby Club Armée de Terre dans sa quête du championnat de France du côté de Marseille. Une aventure humaine formidable pour une bande de potes pas comme les autres.

Avant toute chose, les joueurs et le staff du Rugby Club Armée de Terre ont souhaité rendre un vibrant hommage aux deux légionnaires du deuxième régiment étranger d'infanterie de Nîmes qui ont perdu la vie lors d'un exercice dans la Marne.

Un apprentissage express

Dans l’ombre des demi-finalistes du Top 14, d’autres mettent de côté leur treillis-rangers pour enfiler shorts et crampons. Le championnat de France militaire du 29 mai au 2 juin. Bien moins long que celui des pros, mais tout aussi passionnant. Regroupant les meilleurs joueurs des corps de la défense (armée de terre, marine nationale, armée de l’air, gendarmerie), ce championnat va permettre de composer une équipe constituée des meilleurs éléments de chaque corps, une formation qui se battra sous la bannière du XV de la Défense. Cette équipe défendra le drapeau, lors de la prochaine Coupe du monde prévue au Japon en novembre 2019, où elle tentera de faire aussi mieux que la précédente édition où les Bleus étaient repartis de Londres avec la médaille de bronze aux dépens des Néo-Zélandais. Mais la détection c’est à Marseille que cela se passe. Et bien que trois jours peuvent paraître insuffisants, ces joueurs ont évolué ensemble lors d’un stage organisé à Marcoussis il y a de cela un mois et demi.

 

Un stage cela se prépare. Raison pour laquelle le staff composé du sergent-chef Romain M., du sergent Ben C., de l'adjudant Frederic B. et du sergent-chef Abi S. avaient prévu de se retrouver la veille de l’arrivée des joueurs le lundi 29 mai. Au programme : perception des premiers équipements, arrivée sur les lieux de rendez-vous des joueurs, vérification du planning de la semaine, tout est ficelé, et minuté.  Mais l’une des tâches indispensables, indissociables du statut de coach, reste la mise en place d’un projet à la fois efficace et cohérent pour amener les joueurs vers le titre. Et les discussions se veulent tardives. 00h30…1h00…1h30, les réflexions, les doutes, les ajustements, tout doit être réglé pour pouvoir présenter aux acteurs une direction à suivre qui se veut audible, compréhensible mais aussi et surtout applicable au terrain, car le papier (les diapositives ici, la technologie évoluante) c’est bien, mais le pré reste et restera le seul juge de paix des efforts réalisés en amont par le staff, en aval par les joueurs.

 

 Le projet de jeu reste le socle de toute équipe, outre les directives qui vont être données ce sont surtout les grands principes de jeu qui seront présentés à l’arrivée des joueurs. Dans le cas de l’armée de terre, comme dans beaucoup d’autres, le projet va devoir s’adapter en fonction des présences ou non de certains joueurs. Cette semaine, l’objectif est vraiment de sceller cette connexion entre avants et trois-quarts, dans les lancements, le maître mot c’est l’ambition. « Par rapport à une équipe comme celle des gendarmes, nous avons une grosse capacité à pouvoir jouer en première main, explique Romain M., l’entraîneur des trois-quarts, c’est pourquoi on va s’axer sur un jeu très ambitieux,  on possède une grosse quantité de joueurs qui ont fait la dernière Coupe du monde, on va mettre beaucoup de vitesse. » Par rapport à d’autres stages effectués notamment à Marcoussis, « Mimi » renchérit.  « Je crois que cela fait bien longtemps que nois n’avons pas eu un groupe aussi fort à la fois techniquement et physiquement » . Premières explications de texte mardi.

Un projet ambitieux...

 

Et pour une première prise de contact quoi de mieux que les abords du Vélodrome ? Lieu de rendez-vous des quatre équipes, le stade Delort constitue le cadre quasi-idéal pour jouer au rugby. Hormis les contraintes de déplacement entre les hôtels, tout est bien agencé pour que tout se passe sans accroc. Pour l’armée de terre, l’heure est encore aux préparations.  Trois heures auparavant, le staff terrien peaufine encore les derniers détails vis-à-vis de la présentation du projet qui sera délivré aux joueurs. Le programme quant à lui est comme toujours millimétré telle une horloge suisse. Cette année, ce sont les Marins qui organisent le championnat, dans la cité phocéenne, un signe qui paraît évident dans le sens où Marseille élue capitale du sport 2017 et vit rugby au rythme des demi-finales du Top 14.

 

Pour autant, ce championnat rassemblant tant de défenseurs de la nation, n’est pas sans rappeler le danger qui règne et les violences dont sont parfois victimes les militaires, les pompiers ou encore les gendarmes. En réponse à cette problématique, l’organisation a décidé de mettre en place un dispositif de sécurité durant tout le long de la compétition. Pendant les matchs, la police municipale, la police nationale, et des soldats en opération Sentinelle seront détachés pour assurer la sécurité de leurs « frères d’armes ».

 

Place au jeu et donc à ce fameux projet. Dans les principes, vidéos à l’appui, la priorité est donné à un jeu libéré axé large-large. Il faut dire que les joueurs  ont un vécu commun puisque ce ne sont pas moins de sept joueurs qui ont participé à la dernière Coupe du Monde et la totalité (hormis un ou deux hommes retenus en mission extérieure) étaient du stage de Marcoussis, l’antre des équipes de France. La formule est claire, dans la forme de jeu courante, le staff souhaite fonctionner par cellules de trois avants juxtaposés avec un trois quart positionné quant à lui dans leurs dos pour se proposer et créer de facto une double menace, ce trois quart qui aura d’ailleurs la priorité du choix : jouer avec les avants, directement avec lui dans le dos des avants, ou alors en utilisant l’avant situé à l’axe de la cellule comme de pivot pour stopper temporairement la défense.  L’idée générale, si l’on considère le fait que l’équipe Armée de Terre possède une ligne rapide et douée de ses mains, est de se donner un maximum de temps et d’espaces en prenant un surplus de profondeur et d’être constamment en lecture. Une lecture qui permet d’enclencher la deuxième phase c’est-à-dire attaquer les intervalles et d’évoluer avec cette continuité dans le jeu. En somme, un jeu qui ne se base absolument pas sur l’affrontement frontal. S’en suivit une mise en place un peu improvisée d’une demi-heure sur du gravier, bien loin du confort que peuvent offrir les pelouses de Fédérale 1 ou 2. Le but étant d’être fin prêt pour la demi-finale prévue à 15h45 face à la gendarmerie. Une rencontre à laquelle Ben Coulon aurait pu assister si ses problèmes physiques l’avaient laissé tranquille, mais de sa position de coach cela lui permet « d’avoir une approche bien différente des rencontres, pour moi qui avait l’habitude de prononcer les discours motivateurs d’avant–match , aujourd’hui j’ai plus tendance à m’effacer au profit du capitaine, je prends la parole deux minutes et je m’en vais. ».

 

...mais pas récompensé

 

Place au jeu. Et si il n’y a pas un véritable « enjeu » au sens premier du terme, la pression est un élement que les joueurs savent et doivent maîtriser. La semaine est dense avec deux matchs prévus avec la demi-finale du mardi et la finale et la petite finale le jeudi. C’est notamment l’une des raisons pour lesquelles le staff a beaucoup insisté sur la notion de « répétition d’efforts lucides ». Et tant est si bien que la rencontre ne dure « que » deux fois 30 minutes, la chaleur ambiante est lourde, voire même pesante, pour les corps et les esprits. L’armée de terre se présentait comme légitime favorite de cet affrontement face aux gendarmes au vu des derniers exploits notamment contre la Marine. D’ailleurs pourquoi battre la Marine représente un exploit ? Pour la simple et bonne raison que la majeure partie des membres qui compose cette équipe est formée par des jeunes issus du centre de formation du RCT. Ceci explique peut-être cela. C’est donc en novembre dernier que les Terriens s’étaient imposés pour la première fois en 8 ans face aux marins. Une éternité. Enorgueillis par une confiance presque naturelle au moment d’aborder l’obstacle des gendarmes, la Terre s’est clairement effondrée.
Bien qu’ayant pris le score d’entrée avec deux pénalités, les troupes du capitaine Guillaume D., ont par la suite joué en reculant. Encaissant un premier essai dès la 27ème minute. Puis un second essai casquette à la sirène de la première mi-temps. Dur. Trop dur même pour une équipe qui n’a que deux entraînements dont un sur du gravier. Elle s’est malheureusement perdue dans les fondamentaux. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. 11 en-avants, 3 touches seulement récupérées sur leur propre lancer, sur 8, et une seulement gagnée sur lancer adverse. Et tant est si bien que la discipline fut au rendez-vous avec 6 pénalités concédées pour 13 côté gendarmes, la dynamique ne pouvait s’inverser. Score final : 31-6 pour la Gendarmerie.

 

 

Pour le staff c’est un vrai coup derrière la tête. Peu après le match, Ben C. faisait son mea culpa : « au nom du staff je tenais à m’excuser, on a peut-être trop privilégié le projet de jeu, et on ne s’est pas assez recentré sur le pourquoi du rugby à savoir les fondamentaux, donc pour cela je tenais vraiment à m’excuser ». Les joueurs tombent de haut, ce qui peut paraître logique dans le sens où les gendarmes devaient ne représenter qu’une simple entrée en matière avant d’aller affronter les marins en finale de ce championnat de France. Car de leur côté les marins ont fait le job. Une victoire nette et sans bavure 29 à 0 face à une armée de l’air qui n’a rien lâché.

Le temps de la révolte

 

On gagne ensemble, on perd ensemble, si la formule est vue et revue elle reste véridique. Pour ces soldats habitués aux terrains hostiles, l’unité fait la force. La force d’un groupe qui va vite devoir relever la tête pour terminer cette semaine de championnat de France sur une bonne note face à l’armée de l’air. C'est en haut de la tribune du virage nord de ce stade Delort que Fred B., décide d'organiser un conciliabule. Les regards se cherchent, encore sous le coup de la colère et de la frustration, chacun est invité à livrer ses impressions sur la rencontre. Tout de suite le soldat Anael L. crève l'abcès : « On s'est mentis à nous mêmes, on s'est perdus dans nos fondamentaux, le projet de jeu est cohérent mais derrière on a oublié là ou le rugby se construisait. La conquête, touches, mêlées, rien n'allait. » Les mots sont durs, mais efficaces, il s'agit de faire table rase et de passer à la prochaine étape : ce match pour la troisième place.

 

Le lendemain c’est récupération ! Passage obligatoire, à Marseille c’est plage du Prado que cela se passe, aérer les têtes, aérer les esprits, tel est l’objectif du jour :  « C’est vraiment une journée importante, explique Léa Malet, la kiné, on a que 24 heures pour régler les soucis physiques, musculaires notamment donc c’est vrai que c’est assez court oui. ». Dans ce groupe, certains vivent leurs derniers moments rugby avec leurs frères d’armes comme le troisieme ligne le sergent Loïc B. « Je pense que ça sera l’un de mes derniers stages confie-t-il l’’air un peu défait, mon corps petit à petit commence à me dire stop. En Angleterre quand on a joué la Police l’épaule, là ici c’est la cheville qui couine, c’est compliqué ». D’autres, comme le caporal chef Juanito T., sentent l’âge avancé mais conservent néanmoins leur soif de vaincre : « J’ai 36 ans, mais j’ai envie de terminer sur un titre ! ». 

L'après-midi est consacré au handi-sport. En tant que modèles d'exemplarité, les joueurs des quatres corps ont donc été convié à une initiation à ce que l'on appelle le "quad rugby". Sorte de savant mélange entre la dextérité du basket-ball et a rudesse des contactst entre les fauteuils. Pour continuer, l'ensemble des joueurs fût convié à accompagner les jeunes de l'école de rugby pour après-midi d'échange, de partage et d'amitié entre deux mondes diamètralement opposés, mais qui s'unissent sous une seule et même passion : le ballon ovale.

 

Pour valider ce nouvel état d’esprit, il fallait disposer de l’armée de l’air. Si le match démarrait sous les meilleurs hospices avec un essai du sergent chef Ludovic B. Chaque erreur se paye cash, raison pour laquelle après un quart d’heure de jeu, les terriens sont menés 10 à 7. Mais le match, dénué d’un certain enjeu si ce n’est celui de terminer sur podium, est très ouvert chaque équipe n’hésitant pas à se rendre coup pour coup. Progressivement, l’Armée de Terre va prendre le dessus, en tenant beaucoup plus la balle et en occupant parfaitement le camp des Aériens. Devant à la pause de 4 points, l’armée de terre va accélérer et passer plus de 30 points à l’armée de l’air. Une belle manière de conclure ce stage Marseillais.

Quant aux vainqueurs, une fois de plus la Marine Nationale, ils ont dû bataillé jusqu'en prolongation pour s'offrir le titre grâce à leur nombre d'essais marqués, les deux équipes s'étant quittées sur le score nul de 25 partout.

Les joueurs de l'armée de terre se retrouveront ainsi dans un mois du côté de Besançon pour un nouveau stage qui sera cette fois-ci plus axé sur la detection de nouveaux acteur et aui se concluera avec un match de gala au profit des blessés de l'armée de Terre face à l'équipe de Besançon évoluant en Fédérale 3. Ensuite c'est en Aôut, que le XV de la Défense quant à lui s'envolera pour un séjour de 10 jours en Nouvelle-Zélande pour une tournée qui s'annonce des plus enrichissantes rugbystiquement parlant.

Enzo Contreras

 

 

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