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Commotions : Comment éviter le pire ?

Par Jérémy Fadat
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Publié le Mis à jour
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Au-delà des fins de match à suspense, s’il est une chose qui a marqué les phases finales de Top 14, c’est bien la violence des chocs et la recrudescence des protocoles commotion. Ce grand nombre de contacts rudes oblige aujourd’hui le rugby à trouver des solutions adaptées.

Attention, sujet sensible. Depuis des années, nombreux sont les différents acteurs à s’alarmer et à prévenir le risque qui guette le rugby. Les chocs sont de plus en plus violents et les commotions cérébrales se multiplient. Certes, la prise de conscience est effective et plusieurs mesures, à commencer par la mise en place de protocoles commotion systématiques à chaque suspicion, sont venues s’ajouter aux divers règlements pour tenter de protéger les joueurs. Ce qui n’empêche en rien de s’émouvoir d’un fléau qui gagne toujours du terrain sur les pelouses du championnat de France. À l’issue de cette saison 2016-2017, 95 commotions ont par exemple été répertoriées en Top 14 contre 70 lors de l’exercice précédent. Cela pour plus de 200 protocoles effectués… Bien sûr, il y a deux façons de voir les choses, dont l’une consiste à se féliciter de la prise en charge des joueurs visés. Le deuxième ligne international Yoann Maestri prend la parole : « Il y a quelque temps encore, on n’y faisait pas attention… Il fut une époque où on glorifiait presque les joueurs qui revenaient sur le terrain après avoir été touchés ! C’était une autre extrémité. À Toulouse, ces derniers temps, nous avons connu des cas où des joueurs se relevaient, titubaient, et repartaient jouer. Au moins, désormais, on ne prend plus de risque avec la santé des joueurs. »

Seulement voilà, l’actualité rattrape encore ce sport et, en ce sens, les phases finales, où des médecins indépendants étaient missionnés, ont été éloquentes. Voire même carrément inquiétantes. Jugez plutôt : des barrages au Stade de France, pas moins de dix-neuf protocoles commotion ont été demandés en cinq rencontres (soit une moyenne de 3,8 par match), dont cinq sur la seule finale entre Clermont et Toulon. Des chiffres aussi impressionnants qu’effrayants. Même chez les professionnels. Le flanker des Bleus, Yacouba Camara, qui a observé ces terribles luttes à distance, réagit : « La finale, c’était violent, très violent. En ce qui me concerne, ce genre de rugby n’est pas ma qualité première, mais dans le jeu moderne, il faut pouvoir répondre à tous les types d’affrontement. Ce qui est frappant sur les demi-finales et la finale, c’est que c’est finalement la maîtrise de cette violence qui peut faire basculer les matchs, comme sur les cartons rouges ou jaunes. » Maestri reprend : « C’est sûr que ces matchs étaient costauds, très costauds. Parce que c’est le moment décisif de la saison, où l’on sait qu’on n’a plus de match derrière, et où l’on s’engage plus encore dans un contexte de tension beaucoup plus perceptible. Cela peut paraître impressionnant, bien sûr. Ça l’est à mon sens d’autant plus qu’on met beaucoup le doigt là-dessus en ce moment. »

 

43 % des retraités de NFL sont touchés

Les explications de cette recrudescence ? Elles sont simples. Des corps toujours plus développés et musclés, avec des troisième ligne ou trois-quarts centre dont le poids moyen a augmenté de près de vingt kilos en moins de vingt ans. Des joueurs de mieux en mieux entraînés depuis le passage au professionnalisme dont la puissance et surtout l’explosivité sont démesurés, ce qui rend les collisions extrêmement brutales. Aussi un jeu d’affrontement direct parfois privilégié dans notre Top 14, où il convient de marquer physiquement l’adversaire avant de prendre le dessus. Le problème ? C’est que l’identification des facteurs s’avèrent aujourd’hui bien maigres face à la portée du danger. Et si ce désastre finissait par tuer notre sport ? La question est volontairement provocatrice mais, si l’on veut éviter d’en arriver aux dérives connues par le football américain - 43 % des retraités du championnat américain (NFL) montrent des signes de commotions cérébrales - qui a trop longtemps fermé les yeux et dont les dirigeants se retrouvent à gérer une catastrophe et à verser des centaines millions de dollars aux anciens joueurs, le rugby doit agir et ne pas craindre d’ouvrir encore le débat pour trouver de nouvelles solutions. Aussi pour sensibiliser son secteur amateur puisque plus de 1 500 suspicions de commotions ont été notés sur le rugby fédéral la saison passée. Lors de sa dernière assemblée générale, la FFR s’est d’ailleurs déjà emparée de ce sujet. Elle va notamment mettre en place une commission fédérale de suivi dans le rugby professionnel, ainsi qu’un suivi des commotions cérébrales dans le rugby fédéral. Mais, au-delà, elle va lancer l’expérimentation d’un carton bleu émis par l’arbitre en Fédérale 1 et en Top 8 féminin, comme cela avait été testé dans des championnats locaux en Australie (ce carton bleu pourra rendre définitive la sortie d’un joueur qui présente des signes de commotion). Il faudra pourtant aller plus loin encore. Dans la réglementation ? Dans la gestion des plages de repos ? Dans la philosophie générale du jeu ? Toutes les pistes sont désormais à explorer.

 

Par Jérémy Fadat (avec Nicolas Zanardi)

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