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Les six glorieuses

Par Jérôme Prévot
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Publié le Mis à jour
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C’est un plaisir finalement très rare. En 111 ans de confrontations avec la Nouvelle-Zélande, la France n’a battu les All Blacks que six fois à domicile, dans cinq stades et dans cinq villes (si l’on dissocie Paris de Colombes). À noter que le dernier succès commence à dater : 17 ans... et cet exploit ne s’est jamais produit au Stade de France.

En 1954, à Colombes (3-0 pour la France)

Première victoire de l’Histoire face aux hommes en noir. Pourtant, sur le moment, cet exploit fut peu célébré, le Tournoi était alors bien plus important médiatiquement. Reconnaissons-le, ce succès fut aussi un coup de chance car les Néo-Zélandais monopolisèrent le ballon et gâchèrent un wagon d’occasions. à l’aile droite, un gamin de 19 ans, André Boniface, bien peu servi mais qui sauva un essai tout fait en subtilisant un ballon par-dessus la tête de son vis-à-vis Jarden qui avait tapé pour lui-même. C’est au capitaine Jean Prat que revint l’honneur de marquer le seul essai français sur une remise intérieur de Robert Beaulon, ce fut peut-être la seule action construite des Bleus. 27 mêlées contre cinq, trente-cinq touches contre dix pour les noirs. Une boutade reste liée à ce match : « La victoire d’un XV de France sans ballon. »

En 1973, au Parc des Princes (13-6)

Premier exploit dans ce nouveau stade parisien. Les All Blacks sortaient d’une longue tournée (trois mois et trente-deux matchs) et d’une partie mythique contre les Barbarians. Ils furent occis d’abord par un pack déchaîné, tiré vers le haut par la bravoure et les déboulés du deuxième ligne Elie Cester et du numéro 8 et capitaine Walter Spanghero. Mais ce succès reste attaché à une performance individuelle hallucinante, celle du demi de mêlée Max Barrau à l’origine des deux essais et de toutes les actions tranchantes des Français. Avec « Walter », il avait ciblé la lenteur de la troisième ligne adverse, l’entente 8-9 fut magnifique sur ces 80 minutes, marquées aussi par un jeu de déplacement intelligent de Romeu sous la pluie de la deuxième période. Barrau aurait mérité une carrière plus riche avec les Bleus s’il n’avait été victime d’un oukase fédéral. Le deuxième ligne Alain Estève aussi, il n’était pas tendre, tout le monde s’en souvient. Il était adroit et rapide, on l’oublie trop souvent. À la différence de 1954, ce succès fut abondamment salué par l’opinion publique.

En 1977, à Toulouse (18-13)

Curieuse victoire, pas célébrée à sa juste valeur à notre avis. Le XV de France de Jacques Fouroux sortait du Grand Chelem et on trouvait normal que cette équipe puisse dominer les All Blacks de Graham Mourie. Ceux-ci n’étaient pas, il est vrai, les plus forts de l’Histoire, mais tout de même… Le public de Toulouse se montra particulièrement méchant avec Jacques Fouroux en scandant le nom de son remplaçant, Richard Astre. Pourtant, sur le terrain, les Bleus furent bien les plus forts, 18-13 grâce à la botte de Jean-Pierre Romeu, 14 points, artisan d’une belle remontée en deuxième période, « gagnée » 12-0. Le pack de fer était amputé de Rives et de Bastiat, mais le débutant Jean-Luc Joinel et Alain Guilbert surent faire le boulot. Robert Paparemborde marqua le seul essai français grâce à une percée de Bertranne relayée par Skréla. Les Bleus furent puissants et durs dans les contacts au point de faire sortir deux adversaires. On se souvient aussi de ce match à cause des débuts d’un ailier de 24 ans, Guy Novès.

En 1986, à Nantes (19-3)

C’est le chef-d’œuvre de Fouroux sélectionneur. Déçu par la défaite du premier test, il fit vivre l’enfer à ses hommes pour préparer le second, des jours de dureté morale inédite comme s’il voulait les pousser à bout jusqu’à ce qu’ils explosent le jour J. C’est ce qui se passa exactement : les Bleus de Daniel Dubroca l’emportent 16 à 3 au terme d’un engagement féroce marqué par deux essais sans éclat de Denis Charvet et d’Alain Lorieux et quelques charges sabre au clair de Laurent Rodriguez. Les All Blacks et Wayne Shelford se plaignirent ensuite de coups défendus en dessous de la ceinture, ils leur servirent d’aiguillon pour la finale mondiale huit mois plus tard. Cette rencontre de folie marqua les débuts de deux joueurs assez différents, le pilier basque Pascal Ondarts et l’ouvreur parisien Franck Mesnel.

En 1995, à Toulouse (22-15)

Premier exploit du XV de France de l’ère professionnelle. Les Bleus commandés par Philippe Saint-André donnent une leçon à des All Blacks un peu « écrasés » par le phénomène Jonah Lomu, dont c’était la première visite en France. Ce match marque les grands débuts d’une certaine génération, celle des Fabien Pelous, Thomas Castaignède, Richard Dourthe et Philippe Carbonneau. La victoire fut d’autant plus marquante que les joueurs avaient fait un coup de force en boycottant une réception une réception d’avant-match à la mairie de Toulouse pour une histoire de primes. En s’imposant sur la pelouse, les joueurs légitiment leurs revendications. Gonflé ! On conserve quelques flashs de cet après-midi euphorique : une accélération plein champ de Sadourny et un essai final du capitaine en coin, au nez et à la barbe de Lomu.

En 2000, à Marseille (42-33)

Premier succès éclatant de l’ère Laporte. Un an après l’exploit du Mondial 1999, les Français récidivent au Stade Vélodrome au terme d’une course-poursuite exaltante riche de trois essais de chaque côté. Ce match s’est déroulé dans une ambiance survoltée à Marseille mais il a symbolisé la puissance du Stade Français de Max Guazzini, ils étaient sept au coup d’envoi dont la première ligne De Villiers-Landreau-Marconnet. Xavier Garbajosa marque d’entrée servi par Galthié petit côté. L’ailier toulousain tape à suivre pour lui-même avant d’aplatir, une première intervention électrique qui conduira les Bleus à mener 17-0 après dix minutes. Un délice souligné par les 27 points au pied de Christophe Lamaison (27 points dont deux drops), la force de Pelous, la classe de Magne et l’orgueil des All Blacks de Tana Umaga capables de reprendre le score en début de seconde période. Parmi les curiosités de cette rencontre : le retour du vétéran Sadourny (34 ans) à l’arrière à cause d’une cascade de blessure et l’entrée temporaire du Dacquois Mathieu Dourthe pour sa seule cape : fait unique.

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