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Par Marc Duzan
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Publié le Mis à jour
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À Lille, les Tricolores affronteront des Pumas revanchards. L’occasion, pour le XV de France, de faire provisoirement taire le flot de critiques s’abattant justement sur lui depuis des lunes…

On a tous envie de mourir en entendant Jean-Baptiste Elissalde, Mathieu Bastareaud ou Guilhem Guirado répéter en boucle, et sans y croire une seconde, qu’ils vont « se remettre au travail », « faire le dos rond » et « ne retenir que le positif » d’une cinquième défaite consécutive. On a tous envie de mourir quand la perspective du « match piège » face aux Pumas sera immanquablement suivie de celle du « match bide » face aux Fidji, ses 25 000 spectateurs payants et son audimat extatique. On a tous envie de faire le grand saut en songeant que, passé cette défaite inaugurale face à des Springboks qui n’avaient jamais semblé aussi friables, rien ne saurait vraiment changer l’horizon tristounet du rugby français jusqu’au prochain Tournoi des 6 Nations. Alors, quitte à vivre son dernier jour, pourquoi ne pas céder maintenant aux élans populistes les plus primaires ? Pourquoi ne pas lancer dès aujourd’hui la génération des Bleuets champions du monde ?

Ici, la réponse claque encore comme une gifle et l’on est, sur ce point au moins, plutôt raccord avec Jacques Brunel : céder aux sirènes de l’électoralisme pour envoyer des moussaillons immatures au casse-pipe serait à bien des titres inconséquent. À ce sujet, écoutez plutôt ce que racontait Arthur Iturria, dimanche dernier : « À leur âge, j’étais à des années-lumière de pouvoir survivre à un test-match d’une telle intensité. J’ai observé de près le dernier Barbarians - Tonga (à Bordeaux, cinq Bleuets étaient titulaires : Joseph, Carbonel, Ntamack, Barassi et Laporte, N.D.L.R.) et dans l’intensité, ce fut très difficile pour nos jeunes. Sans être méchant, les lancer dans le grand bain les desservirait plutôt qu’autre chose. » Une fois que l’on a compris que Jacques Brunel a hélas sélectionné les meilleurs joueurs français du moment et que tout élan de démagogie serait à bien des titres suicidaire, on a du mal à imaginer ce XV de France autrement que fidèle à lui-même face à l’Argentine, son futur adversaire au Mondial : brouillonnasse balle en mains, courageux en diable, excellent pour faire déjouer l’adversaire mais bel et bien incapable d’imposer un jeu léché, construit ou abouti. « Nous avons eu quinze jours pour préparer la tournée, plaidait Baptiste Serin samedi soir. Nous n’avons pu faire que du bricolage ». Le serpent se mord la queue et, quand l’Argentine et ses 50 000 licenciés mettent leurs modiques moyens dans le Pladar (le Plan de développement du haut niveau), le rugby français continue de bidouiller des conventions collectives LNR/FFR qui ne font guère avancer le schmilblick.

Wenceslas Lauret monte au front

Au bout du bout, il ne se passe pas une semaine sans qu’une pluie de coups ne s’abatte sur cette équipe de France. Ici, c’est Richard Dourthe qui juge dans nos colonnes que Geoffrey Doumayrou « ne fait pas vraiment rêver. » Là, c’est le beau-frère de Riri la Gaudasse, Olivier Magne, qui sans le dire cloue Teddy Thomas au pilori : « Je préfère ne rien dire sur son action (un surnombre oublié). Je pourrais être méchant… ». Plus loin, c’est Clive Woodward qui s’en prend au peu d’« enthousiasme » affiché par les Tricolores ces derniers mois. Alors, les Bleus ont beau nous jurer qu’ils ne lisent pas la presse (permettez-nous néanmoins de douter du fait que des sportifs de haut niveau, capitalisant sur leur image, boudent l’exploitation positive ou négative qu’en font les médias), on n’ose croire, à l’heure de la toute-puissance des réseaux sociaux, que le flot des critiques puisse échapper à leur prescience. Dès lors, quand s’uniront-ils pour donner tort à cet environnement devenu une sorte d’ennemi commun ? Quand est-ce que les maillots Bleus seront-ils aussi colère que les « gilets jaunes » ? Combien de gifles faudra-t-il que les « pundits » (terme britannique désignant ces néoretraités rémunérés par les médias pour parler de leur sport, accessoirement en mal) n’adressent à ces Bleus avant que ceux-ci ne réagissent ? Quitte à ce qu’il y ait une fêlure entre une partie de l’opinion et cette équipe, autant qu’elle soit clairement consommée, n’est-ce pas ?

Alors indignez-vous, mille sabords ! Montrez les dents ! Et si, par peur de heurter les sensibilités des plus gluants de vos conseillers en image, vous n’osez dire « merde », ayez au moins l’audace de dire « stop ». « On rêve de gagner pour faire fermer les bouches », osait finalement Lauret, lundi dernier. Mais Dieu vous entende, cher Wenceslas ! Et croyez-le ou pas : si la victoire que l’on attend tous depuis huit mois (!) pouvait enfin nous contraindre à changer de rengaine et tremper la plume dans du sirop de miel plutôt que dans du venin, on en serait les premiers comblés. Ahora, vamos chicos ! *

* Maintenant, allez les enfants !

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