La valeur d’un titre

  • Les joueurs du Stade toulousain vainqueur du Top 14 de la saison 2018-2019
    Les joueurs du Stade toulousain vainqueur du Top 14 de la saison 2018-2019 Icon Sport - Icon Sport
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L'édito d'Emmanuel Massicard... Le rugby ne cède pas. Il résiste aux vents contraires, même aux tempêtes qui l’agitent de l’intérieur. Toujours debout, il entend jouer. Rejouer, plus justement. Et terminer la saison quand d’autres préfèrent « rester au chaud » jusqu’à septembre, quand il sera temps de démarrer une nouvelle aventure.

Même si, ne nous leurrons pas, l’affaire est avant tout économique, retenons l’image d’un sport qui résiste, lutte pour exister et refuse la fatalité d’une crise qui le dépasse pourtant. Ce don de soi, le goût du combat et la propension au dépassement (individuel et collectif) sont inscrits dans l’ADN « rugby ». Ils font sa force, encore aujourd’hui où les médecins Grisoli et Charabas sont mobilisés comme tant d’autres face au covid-19 ; où, sur un autre front, le président Fickou s’engage auprès de son club formateur.

En ce sens, il n’est pas étonnant de voir le Top 14 et le ProD2 tenter de rebondir dès cet été avec une formule « flash », version contre-la-montre jusqu’au Brennus. On ne parle quasiment plus du 18 juillet à huis clos, ce qui apparaît de plus en plus prématuré. Rendez-vous donc au mois d’août, en espérant que les stades soient pleins.

Le projet a été porté par Paul Goze, l’actuel président de la LNR. Il lui aurait été suggéré par Pierre-Yves Revol, son prédécesseur et certainement son successeur, qui défend l’idée d’une phase finale à huit. Dans leur sillage, enfin un consensus…

Alors, tout va bien dans le meilleur des mondes ? Pas forcément. Ce désir d’en finir (avec le championnat) porte de nombreuses parts de risque, principalement sur la santé des joueurs qu’il faudra bien encadrer sur le chemin de la reprise. Puis, reconnaissons-le, l’absence de visibilité est encore trop forte à ce jour pour que nous puissions nous bercer d’espoirs pour l’avenir.

Nous y reviendrons forcément dans ces colonnes, l’équilibre financier est instable. L’impact de la crise n’épargnera pas le rugby, ses clubs professionnels et amateurs, ses institutions. Chacun s’apprête à se serrer la ceinture, même si tous - les clubs - ne sont pas touchés dans les mêmes proportions : les plus gros budgets (et les plus gros salaires) souffrent davantage. Ironie du sort pour ceux qui sont ancrés dans l’économie réelle avec une forte dépendance au sponsoring et à la billetterie… Pour eux, les phases finales sont cruciales. Avec la qualification européenne qui les accompagnent.

À l’autre bout du classement, les « sans grade » du Top 14 et du Pro D2 ne finiront pas la saison. Pas invités au bal mais pas malheureux pour autant. Eux ont déjà assuré l’essentiel : sauver leur tête sans avoir à rejouer. Qu’importe si la logique sportive est bafouée. Qu’importe, encore, si cette décision sur tapis vert prive d’accession les meilleurs des divisions inférieures, eux qui auraient mérité de ne pas jouer pour une simple breloque… Si certains s’en réjouissent, pas nous.

Si elle doit nous ravir à l’idée de revenir bientôt sur les terrains du rugby, cette phase finale aoûtienne « entre soi » devrait faire une nouvelle fois étalage de l’inventivité du rugby français. Qui ne boucle donc qu’à moitié ses championnats qui, surtout, le fait avec les effectifs de la saison… suivante. Un drôle de mélange des genres qui n’échappera à l’histoire : si le Bordeaux de Laurent Marti est enfin champion, il le sera sans Radradra (il a signé à Bristol), ce joueur qui a tant apporté à l’UBB, leader du Top 14 d’avant la crise. Alors, la valeur d’un titre ?

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