Baptiste Pesenti et la prime à l’hybride

Baptiste Pesenti a découvert le grand concert international en y jouant une partition que ses partenaires palois connaissent bien. Son capitaine et son ami Martin Puech n’a pas été surpris : « Il a été bon en défense, et il a avancé tout le temps offensivement. Dans les duels, ça a été un des meilleurs puisqu’il a toujours été dans l’avancée. Il a montré qu’il était au niveau dans la dimension physique. » Baptiste Pesenti est un joueur de devoir, qui transpire les valeurs du rugby de papa, un rugby où les avants parlent peu mais bataillent sans chercher la lumière, encore moins la gloriole, mais seulement le respect de ses partenaires et adversaires. « Il est très dur à l’impact, poursuit Martin Puech, Rien qu’à l’entraînement, il n’est pas agréable de le croiser. C’est un roc, qui fait 120 kg, sans beaucoup de graisse. C’est une force de la nature qui sait utiliser sa puissance. Il est très dense, fait très mal et marque les adversaires dans l’affrontement physique. Les joueurs qui croisent son chemin s’en souviennent généralement. »

Baptiste Pesenti a donc cette image de joueur rude qui lui colle aux crampons. Pourtant l’homme est bien différent. « Ils ont des grandes discussions avec Martin », sourit le co-manager de la Section paloise Nicolas Godignon pour évoquer la personnalité de son protégé : « C’est vraiment un garçon gentil, doué, sympa avec la tête sur les épaules et elles sont bien larges ! Il a aussi une boîte avec son frère. Je crois qu’il aime se faire passer pour un besogneux qu’il n’est pas. » C’est aussi le sentiment de Martin Puech : « Il joue le rôle de garçon brut de décoffrage, le mec un peu bourrin, un peu rustre mais il a un humour assez fin… pas tout le temps (rires) mais il a aussi beaucoup d’autodérision. Il sait rigoler de lui et n’est pas trop susceptible. Ça fait du bien dans le monde du rugby. » 

Baptiste Pesenti est surtout encore jeune, ce que l’on a tendance à oublier : « Il a commencé tôt, poursuit son capitaine, Il est déjà bien marqué au niveau physique, au niveau de sa gueule (rires) et on se demande ce que ça va donner à 30 ans (rires) mais il n’a encore que 23 ans ! Il faut savoir qu’il est très modeste avec son intégration dans le groupe France. Il sait qu’il est là pour apprendre. Mais pour moi, avec ses qualités, c’était une évidence qu’il soit en équipe de France un jour ou l’autre. Tant mieux que ça arrive maintenant. »

La même mutation que Bernard Le Roux

Une montée en puissance qui n’est pas étrangère à sa polyvalence. Arrivé à la Section paloise comme troisième ligne aile, Baptiste Pesenti, qui fait officiellement toujours partie du centre de formation du club béarnais s’est peu à peu mué en seconde ligne. « Pouvoir évoluer aux deux postes me convient très bien, nous confiait-il lors de l’annonce de sa sélection, Ça ne change pas grand-chose pour moi et je suis très heureux de pouvoir faire les deux, d’autant plus que Karim Ghezal m’a effectivement expliqué que ma polyvalence était un atout, donc c’est quelque chose de bénéfique. » 

Une mutation qui a été réfléchie et bien expliqué au joueur comme l’explique Nicolas Godignon : « L’ensemble du staff de la Section trouvait qu’il avait un profil hybride. On pensait qu’il avait le physique d’un deuxième ligne avec les qualités d’un troisième ligne. Nous avions aussi beaucoup de prétendants à son poste et ça nous embêtait d’avoir à choisir. On lui a alors expliqué que ce n’était qu’une question de position sur les phases de mêlée et qu’on lui donnerait les mêmes fonctions qu’un troisième ligne. Nous avons vu que c’était un gros pousseur en mêlée, qui ne s'économise pas sans perdre sans faculté de déplacement. » 

Un troisième ligne aile reconverti au poste de deuxième ligne, cela rappelle forcément la trajectoire suivie par Bernard Le Roux, devenu un cadre du XV de France après sa reconversion. La comparaison est évidente pour Martin Puech : « Au niveau international, on recherche des deuxièmes lignes qui se déplacent beaucoup et n'est pas frêle non plus. Il peut remplir les critères du poste de deuxième ligne tout en couvrant beaucoup de terrain, c’est ce que l’on recherche au niveau international. »

Plus concentré, moins sanctionné

Les capacités physiques de Baptiste Pesenti étaient évidentes depuis ses premiers matchs avec la Section, notamment parce qu’il a toujours été capable de répondre dans l’engagement pour marquer ses adversaires. Il est ce genre de joueur adoré des entraîneurs pour cette capacité à montrer l’exemple au niveau de l’agressivité. « Il a un jeu dur et donc qui peut entraîner des fautes. C'est logique, souligne Nicolas Godignon, On pouvait craindre que cette indiscipline le pénalise. Mais il a su travailler sur ce point-là. Il a même été exemplaire là-dessus face à l’Italie. Il a appris à mieux lire les situations pour intervenir à bon escient. » 

L’expérience acquise au cours de ses cinquante matchs de Top 14 n’est pas étrangère à cette progression mais Baptiste Pesenti a surtout fait un travail invisible à l’œil nu pour Martin Puech : « Quand il a débuté, il était un peu perturbé par les éléments extérieurs et il avait quelques manques de concentration mais ce n’est quasiment plus le cas. Il a bien progressé là-dessus. » Il est surtout évident que la Section paloise a bien fait de lui faire signer son premier contrat professionnel juste avant cette Coupe d’Automne des Nations.