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René Bouscatel : « On sait très bien où on veut aller »

Par Emmanuel Massicard
  • Le président de la LNR se montre confiant au sujet d'une Coupe du Monde des clubs.
    Le président de la LNR se montre confiant au sujet d'une Coupe du Monde des clubs. Icon Sport
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La Ligue Nationale de Rugby tiendra son Assemblée générale ce mercredi à La Rochelle. Avant de rejoindre les terres de Vincent Merling (qu’il a battu lors de l’élection à la présidence en mars 2021), René Bouscatel dresse le bilan de son début de mandat et fixe le cap à suivre.

Vous venez de boucler votre première saison pleine à la tête de la Ligue. Pour quel bilan ?

Positif. Je dirai même très positif et qui correspond à mes attentes. Je voulais d’abord faire revenir le public dans les stades après la période "Covid" et ce fut une surprise de le voir présent en nombre aussi vite, avec une accélération après le grand chelem du XV de France. De mémoire, sur la première partie de saison, Top 14 et Pro D2 réunis, nous avons eu près de 13 500 spectateurs en moyenne par match ; soit des niveaux équivalents à la période avant Covid. Sans compter les demi-finales à Nice qui ont fait le plein et la finale où, malgré les grèves, nous avons accueilli 79 000 personnes au Stade de France. C’est très bien. Côté audiences télévisées, les chiffres sont également bons puisque nous sommes en hausse par rapport à la saison précédente, quand tout le monde était bloqué devant sa télé et privé de stade. Avec un record pour la première demi-finale avec plus d’un million de téléspectateurs.

Pour le reste, après une courte période d’adaptation pour les nouveaux élus, ces quinze mois de présidence m’ont permis de poser les principes de nouvelles méthodes de travail, revues et corrigées. J’ai également souhaité la mise en place de nouvelles commissions comme le développement économique et innovation, le volet "RSE" ou enfin, j’insiste dessus tant cela me paraissait être une nécessité, les relations clubs/Ligue qui est présidée par Frédéric Calamel (Carcassonne).

Qu’entendez-vous en parlant de nouvelles méthodes ? Qu’est-ce qui change avec les précédentes gouvernances ?

Nous avons un mode de fonctionnement très clair, ancré sur le modèle participatif car j’attends que tout le monde s’engage autour de moi. Chacun doit jouer son rôle au sein des commissions et participer aux nombreux travaux mis en place ; ces commissions transmettent leurs rapports au Bureau, qui en réfère ensuite aux clubs. Enfin, le comité directeur est là pour prendre des décisions. Tout le monde s’y retrouve et cela me va bien. Je ne souhaitais pas que la Ligue fonctionne sur quelques personnes mais sur l’ensemble. C’est une réussite.

Le climat s’est également apaisé avec la Fédération et l’équipe de France.

Oui. Je ne sais pas si c’est dû à ça mais nous avons vu la réussite sportive avec ce grand chelem magnifique. Il doit beaucoup, me semble-t-il, au travail réalisé en amont par mes prédécesseurs autour de la politique des "Jiff", et que nous continuons de faire évoluer la saison prochaine avec 17 joueurs issus des filières de formation présents à chaque match. Sans parler du salary cap !

Ce sont des mesures déterminantes, qui expliquent selon vous le rebond du rugby français en club comme en sélection ?

Ils sont très importants, déterminants même. Autant que le dialogue positif établi avec les dirigeants de la fédération et qui va se concrétiser autour de la nouvelle convention FFR/LNR que nous officialiserons dans les jours à venir. Chacun s’est engagé dans les discussions de manière constructive et le projet a été voté à l’unanimité dans les deux institutions. C’est remarquable et cela présage de bonnes choses.

Qu’est-ce qu’ont changé les bons résultats de l’équipe de France ?

On l’a vu directement sur les affluences dont je vous parlais auparavant. La vitrine est belle, et cela rejaillit sur le pouvoir d’attraction du Top 14 autant que sur le développement de la Pro D2. Imaginez donc que neuf équipes pouvaient encore se qualifier avant l’ultime journée du Top 14 ! Cette concurrence fait naître une très grande émulation et participe à la belle attractivité des compétitions professionnelles. À ce titre, j’ai toujours considéré le domaine sportif comme l’élément premier de nos actions et projets, avec l’économie pour lui permettre de se réaliser.

Comment jugez-vous le niveau sportif ?

(Il coupe) Le niveau sportif du Top 14 est très élevé. Pour la deuxième saison consécutive, deux clubs de Top 14 ont remporté les deux coupes d’Europe, La Rochelle et Lyon. Je trouve qu’en Pro D2 il y a eu une progression constante. En Top 14, les matchs sont parfois plus hétérogènes mais cela ne me gêne pas forcément, car je suis conservateur dans ce domaine. Contrairement à beaucoup de techniciens, je ne pense pas que tout le monde doit jouer de la même manière, en suivant la même musique. Je considère que chaque club a une culture de jeu qui lui est propre à respecter et sur laquelle il doit construire. Cela nous offre une belle diversité, qui fait notre attractivité et qui sert au final les intérêts de l’équipe de France.

Comment définir la méthode "Bouscatel" ?

La méthode "Bouscatel" comme vous dites, c’est la concertation, la discussion et le travail en équipe. Je ne suis pas un quelqu’un qui gère tout et qui décide seul de tout. Je vous le redis, avec moi les sujets sont traités par le plus grand nombre et le comité directeur prend ensuite les décisions qui s’imposent en toute connaissance de cause parce que les choses ont été bien préparées. Je vous parle beaucoup de ce modèle participatif mais, rassurez-vous, je sais aussi trancher les dossiers comme avec la Fédération : nos commissions travaillent ensemble et ensuite, avec Bernard (Laporte), nous savons arbitrer quand il y a lieu.

Rien d’évident au départ, quand on connaît votre rivalité antérieure sur fond de concurrence entre le Stade français et le Stade toulousain, voire l’équipe de France…

Ce qui a changé véritablement c’est que nous sommes passés d’un état d’esprit conflictuel d’un côté comme de l’autre à une dynamique très positive.

D’où vient le déclic ? Est-ce lié à la Coupe du monde 2023 qui se profile ?

Je pense, oui. Personnellement, je me suis présenté à la présidence de la Ligue quand j’ai vu que certains, eux, prônaient l’opposition Fédé/LNR malgré la perspective de la Coupe du monde. Ce qui n’empêche pas d’affirmer des positions fortes dans l’intérêt du rugby professionnel des clubs et de les défendre. Quand on prend du recul comme j’ai pu le faire pendant trois ans, on se rend compte qu’il y a d’autres choses à défendre que les intérêts de son club. L’intérêt général doit s’imposer et rejaillir sur tout le monde. C’est ce qui m’a fait m’engager alors que je ne l’avais pas prévu et c’est ce que j’essaie d’appliquer.

Vous parlez de votre désir de rassembler mais certains présidents ont maintenu un courant d’opposition en se réunissant régulièrement. Et à Nice, lors des demi-finales, bon nombre n’étaient pas présents.

D’abord, je n’ai jamais ressenti d’opposition aux projets que nous avons présentés.

Au sujet des demi-finales, je préférerais que tout le monde soit présent pour ce moment de fête où tous les projecteurs sont braqués vers le rugby professionnel français. Mais dans les faits, cela n’a jamais été le cas. Certains présidents espéraient se qualifier et n’y sont pas parvenus ; tous sont fatigués au bout d’une saison très longue… Je sais ce que c’est, je l’ai moi-même vécu. Au bout du compte, chacun est libre d’agir comme il l’entend. Nous sommes en démocratie et je respecte tout le monde.

Quels sont les chantiers qui vous attendent désormais ?

Nous avons posé les bases et digéré les impacts de la crise liée au "Covid", comme je vous l’ai dit. Il est temps à présent de préparer l’avenir au travers d’un plan 2023-2027 que nous allons préparer et qui pour beaucoup a déjà été lancé en commissions. Les prochains mois vont nous permettre de définir collectivement les axes de développement. On sait où l’on veut aller. Et c’est l’essentiel car quand on sait où aller, il n’y a pas de mauvais vent.

Quelle est votre vision pour l’avenir de la Ligue nationale de rugby ?

Je ne déciderai pas seul, vous l’aurez compris. Mais, pour moi, nous devons continuer d’améliorer l’ensemble des compétitions, qu’elles soient nationales ou internationales. On a commencé avec la Coupe d’Europe et l’intégration de provinces sud-africaines qui est une chose positive. Et on poursuivra avec la Coupe du monde des clubs à laquelle je crois beaucoup. Tout cela n’est pas neutre : rappelez-vous qu’il y a peu de temps encore, il était interdit pour les clubs d’avoir droit au chapitre des relations internationales ! Ce Mondial des clubs est donc une reconnaissance du travail effectué par tous dans les clubs, de manière incroyable. Le rugby progresse dans tous les sens, nous devons l’accompagner.

Rentrons dans le détail. Êtes-vous toujours défavorable à la modification des formats de compétition Top 14 et ProD2 ?

Effectivement. Je suis pour la stabilité des modèles, sauf s’il y a des modifications telles des compétitions internationales des nations et clubs que nos championnats se retrouveraient "coincés". C’est une question d’équilibre à trouver et à respecter.

Quid du modèle économique ? Êtes-vous favorable à l’arrivée de fonds d’investissement dans les clubs ?

Non. Et je ne pourrai m’y résoudre que s’il y avait nécessité de le faire pour couvrir d’importants déficits ou pour financer certains projets de développements structurants. La discussion sera ouverte.

Le rugby féminin est en plein essor en France mais sans aucune compétition professionnelle pour l’accompagner. Qu’entendez-vous faire ?

Il y a effectivement les filles et, aussi, le rugby à 7 autour desquels nous devons avoir des réflexions et un plan de développement. Pour le rugby féminin, c’est la Fédération qui est à l’œuvre et de nombreux clubs de Top 14 ou de Pro D2 ont encore à ce jour une équipe féminine. Je souhaite que nous arrivions progressivement à ce que tous en possèdent une, en commençant par le Top 14. Cela passera par une discussion institutionnelle que nous devrons avoir, la Ligue doit s’impliquer sur ce dossier du rugby féminin comme sur celui du rugby à 7. Les enjeux sont importants en termes d’image, de rayonnement et de développement auprès de nouveaux publics.

Quels sont les autres sujets ?

Nous avons un grand plan pour l’amélioration et le développement de l’arbitrage qui est lancé, avec proposition de cofinancement Fédé/Ligue. Nous allons participer car c’est un sujet très important pour nous. Même chose pour ce qui concerne la formation des joueurs, d’ailleurs. On souhaite investir grandement pour aider à développer les structures et infrastructures des clubs dévolues à la formation. Le but est de former des joueurs toujours plus performants.

Dans les faits, il y a tellement de chantiers que nous ne pourrons pas tout faire en même temps ; nous devrons suivre le calendrier déterminé en fonction des priorités. Mais retenez qu’il y a énormément de belles choses à faire, dont certaines sont déjà en route autour de l’innovation, du développement économique ou de l’engagement "RSE". La Ligue et les clubs doivent s’engager sur ces terrains, porter l’image d’un sport ouvert à tous, inclusif, harmonieux, solidaire, engagé au cœur de la société, autour d’une compétition de haut niveau et d’un spectacle de qualité où tout le monde peut se retrouver… Voilà pourquoi il sera tellement important de gagner la Coupe du monde 2023.

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