Abonnés

Madosh Tambwe, l’énigmatique Speedster

Par Dorian VIDAL
  • Madosh Tambwe est l'auteur du triplé le plus rapide du Super Rugby.
    Madosh Tambwe est l'auteur du triplé le plus rapide du Super Rugby. Icon Sport - Icon Sport
Publié le Mis à jour
Partager :

Le sprinteur d’origine congolaise, Madosh Tambwe, a rejoint Bordeaux-Bègles durant l’intersaison. Encensé pour ses très bonnes prestations avec les Bulls, le trois-quarts aile est déclaré non-éligible à la sélection sud-africaine. Pourtant, lui dit détenir son passeport. Une véritable bizarrerie. En attendant d’être éclairé sur la situation, l’ancien athlète veut briller en Top 14.

Madosh Tambwe est un homme à énigmes. Excellent la saison dernière avec les Bulls, le nouvel ailier bordelais (25 ans) n’a toujours pas été appelé avec les Springboks. Et même si la concurrence à l’aile est féroce au sein de la sélection, les performances du Speedster auraient au moins pu être évoquées par Jacques Nienaber (d’autant que le titulaire Cheslin Kolbe a rejoint l’infirmerie durant l’été). Au lieu de ça, le sélectionneur sud-africain a balayé l’idée d’une potentielle sélection d’un revers de la main. La raison ? Un malentendu administratif, visiblement, qui priverait pour l’instant le natif de Kinshasa (ancien Zaïre) d’une cape internationale. « Madosh n’est pas éligible. Il n’est pas un citoyen sud-africain, et tant qu’il n’a pas obtenu la citoyenneté, il n’est pas éligible », lâchait laconiquement Nienaber, en juin dernier. Des informations confirmées par le média Sport24, entre autres.
Tambwe, lui, nous assure qu’il détient bien son passeport : « Quand je prends mon passeport, il est écrit dessus « République d’Afrique du Sud ». Je ne sais pas ce que les gens veulent dire quand ils affirment que je n’ai pas de passeport sud-africain. Moi, j’ai fait toute ma vie en Afrique du Sud. Je ne peux pas changer mon lieu de naissance ! »
Le Bordelais est effectivement né sur les terres de l’actuel RDC. Or, il n’a vécu là-bas qu’une petite semaine, lorsqu’il n’était encore qu’un nourrisson. Venu au monde durant la Première Guerre du Congo, Madosh Tambwe n’a ensuite plus jamais remis les pieds dans ce pays d’Afrique centrale.
« Mon père vivait en Afrique du Sud. Il avait juste dû aller au Congo parce qu’il devait régler certaines affaires de famille, et il s’avère que je suis né là-bas. Mais j’avais à peine quelques jours lorsqu’on est partis en Afrique du Sud. Ce n’est pas comme si on avait quitté le Congo comme des réfugiés… » Pourtant, à en croire les médias sud-africains, c’est bien d’un statut officiel de réfugié qu’aurait bénéficié l’ancien des Bulls, ce qui, en raison de la réglementation en vigueur, serait à l’origine de sa non-sélection.


« À ma connaissance, je peux jouer pour les Boks »

En 2017, Tambwe avait été sélectionné pour représenter l’équipe d’Afrique du Sud des moins de 20 ans. Mais les manquements administratifs ne lui avaient finalement pas permis d’intégrer le groupe. Aujourd’hui en Gironde, le fulgurant sprinteur demeure dans l’incompréhension : « À ma connaissance, je peux jouer pour les Boks. Je ne sais pas d’où vient le malentendu sur le fait que je ne serais pas éligible. J’aimerais m’asseoir avec quelqu’un qui puisse m’expliquer ».
Il faut dire qu’au-delà de son lieu de naissance, Tambwe a quasiment tout de « Sudaf ». « Je me vois comme Sud-Africain parce que j’ai grandi en Afrique du Sud. J’y ai fait toutes mes classes, j’y ai démarré ma carrière, j’y ai vécu jusqu’à mes 25 ans, et je parle même quatre ou cinq langues utilisées dans ce pays. En fait, c’est toute ma vie. Je suis plus Sud-Africain qu’autre chose, assure-t-il avec émotion. Donc, quand on lance que je ne suis pas Sud-Africain, qu’est-ce que ça veut dire ? ».
Un malentendu, une bizarrerie, un quiproquo… Appelez ça comme vous voulez, mais Tambwe et la Fédération ne parviennent en tout cas pas à accorder leurs violons. Cet étonnant problème de communication prive pour l’instant l’ancien finisseur des Lions et des Sharks d’une sélection. Alors, si les fils tendent vers une procédure incomplète du côté du trois-quarts aile, difficile de savoir où se situe l’ultime vérité dans cette affaire.
« J’adorerais discuter avec Jacques (Nienaber) ou Rassie (Erasmus). Je voudrais leur demander quels sont les critères pour qu’un ailier soit sélectionné avec les Springboks. Ça me permettrait de connaître exactement les exigences », confie le principal intéressé. Et d’ajouter : « Tout ce que je peux faire actuellement, c’est continuer de pratiquer un bon rugby, et supporter l’équipe nationale. Puis, si un jour on me sélectionne, je serai heureux de représenter le pays dans lequel j’ai grandi, ce pays qui m’a tout donné ».


Bordeaux-Bègles, « un environnement tout nouveau »

Pour l’instant, et pour la première fois de sa vie, l’auteur du triplé le plus rapide de l’histoire du Super Rugby (trois essais en 13 minutes en 2018, face aux Reds) a donc pris ses distances avec la nation arc-en-ciel, géographiquement parlant.
Auteur de huit essais en United Rugby Championship la saison dernière, meilleur franchisseur et finaliste de la compétition, il a été libéré par les Bulls à un an du terme de son contrat. Depuis plusieurs semaines, le Congolais d’origine évolue donc du côté de l’Union Bordeaux-Bègles, où il a pour mission de remplacer Ben Lam. « Quand Laurent Marti et Christophe Urios m’ont appelé, je me suis dit que c’était l’occasion de découvrir un environnement tout nouveau pour moi. Puis, l’UBB est un super club, avec une vraie culture, et d’incroyables supporters. Je crois qu’en matière d’affluence, ils ont le plus gros public d’Europe. Et de toute façon, le rugby du sud est en train de bouger vers l’hémisphère nord. Aujourd’hui, vous voyez les équipes sud-africaines jouer en Champions Cup. C’était logique d’accepter ce défi ».
Cet ancien athlète (1,86 m, 92 kg), qui courait à l’époque le 100 mètres en 10,71 secondes sur les pistes de Johannesburg, espère exporter ses évidentes qualités offensives dans l’Hexagone, tout au long de la saison. L’entraîneur des trois-quarts, Frédéric Charrier, dépeint le style de son nouvel ailier : « Madosh Tambwe a un profil différent de Ben Lam. Il est électrique et plus athlétique. Là où Ben est un peu plus lourd dans la mise en action, Madosh est capable, grâce à ses appuis, de s’en sortir dans des petits espaces. Il se déplace beaucoup sur le terrain, a cette capacité à dézoner, et est aussi très bon sous les ballons hauts. C’est d’ailleurs une qualité sur laquelle il faut qu’on soit capable de s’appuyer ».
Si certains ont encore des doutes sur l’état de son passeport, Tambwe pourrait en tout cas laisser sa carte de visite à plusieurs de ses vis-à-vis au cours des prochains mois. Alors, peut-être qu’un jour, lorsque sa situation aura été éclaircie, la porte des Springboks s’ouvrira à lui.
 

Vous êtes hors-jeu !

Cet article est réservé aux abonnés.

Profitez de notre offre pour lire la suite.

Abonnement SANS ENGAGEMENT à partir de

0,99€ le premier mois

Je m'abonne
Voir les commentaires
Réagir
Vous avez droit à 3 commentaires par jour. Pour contribuer en illimité, abonnez vous. S'abonner

Souhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?