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Carnet noir - Hommage : Pierre Danos, comme un Torero

Par Jérôme PRÉVÔT
  • Pierre Danos, comme un Torero
    Pierre Danos, comme un Torero PA Images / Icon Sport - PA Images / Icon Sport
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Pierre Danos, l’ancien demi de mêlée de l’AS Béziers est décédé en 2023. Il laisse une trace bien particulière dans les mémoires, celle d’un joueur aux postures élégantes et à la silhouette de torero. Il fit partie de la mythique tournée de 1958 en Afrique du sud.

Il était magnifique. On se plaît à penser qu’il l’est resté jusqu’au bout ou presque. Il aura donc dépassé les 90 ans. Pierre Danos nous a quittés en ce lundi de janvier réputé le plus triste de l’année. Nous l’avions découvert à l’école élémentaire à travers les pages de notre livre de lecture. Y figurait t un extrait du "Du grand combat du XV de France" de Denis Lalanne. Nous n’avons pas retenu la phrase exacte, mais elle commençait comme ça : "Danos cria à Lacaze de…". De se placer pour un drop ? Un dégagement ? Une attaque face à une meute de défenseurs des Springboks ou du Transvaal assoiffés de contacts ? Autant laisser les mots courir dans notre imaginaire avant d’aller vérifier.

L’ancien demi de mêlée de Béziers et du XV de France a donc tiré sa révérence à 93 ans. Il résidait à Lamalou-les-Bains et de lui, nous retenons cette silhouette svelte de torero. Elle lui avait valu le surnom flatteur de "Dominguin", un sacré pedigree dans une ville taurine. Son nom est resté attaché à la sous-préfecture de l’Hérault, mais il n’en était pas originaire. Il était Toulousain, mais sans jamais avoir joué au Stade, ni au TOEC. "Peu de gens savent qu’il a débuté au Toulouse Cheminots Marengo Sports", nous a rappelé notre confrère Didier Navarre, historien et même archéologue des clubs de la Ville rose. Pierre Danos avait aussi porté les couleurs de Castelnaudary, Albi et Toulon de 1950 à 1955 qui lui offrit son premier grand trophée, le Challenge Yves Du Manoir en 1954.

Mais évidemment, c’est à Béziers qu’il a laissé la trace la plus profonde, parce qu’il fit partie de la première génération couronnée, celle de Raoul Barrière joueur, de Paul Dedieu et d’André Gayraud, dit "Le facteur". C’était un peu l’ASB avant l’ASB, finaliste en 1960 et championne en 1961.

Qui n’a pas vu son drop-goal du bord de touche lors de la finale 1961 face à Dax ne peut pas rejoindre en paix le territoire des ombres. Ce fut son chef-d’œuvre absolu. Son évocation nous rappelle que le rugby moderne semble avoir banni ces drops si délicats des demis de mêlée. On se demande pourquoi. Il en avait aussi réussi un lors de la tournée 1958 au Cap au cours du premier test, assurant un match nul qui ressemblait à une victoire.

Avec Béziers, il remporta aussi le Du-Manoir 1964 face à Pau, et même une coupe d’Europe face aux Roumains de Grivita Rosie. Mais il perdit la finale de 1962, un match superbe face à Agen sur un essai de Serge Méricq que tous les Biterrois contestèrent, Pierre jurait l’avoir poussé en touche in extremis. La polémique a été maintes fois commentée. Mais la beauté de ce match qui avait interloqué la presse britannique valait bien un demi-trophée pour les Biterrois..

Pierre Danos entraîna aussi l’ASB de 1966 à 1968. Il tint un café dans la cité : "Le Mondial", à l’angle des rues Solferino et Boieldieu.

Le célèbre aphorisme des joueurs de piano

Il était un brillant chef d’orchestre, auteur du célèbre aphorisme : "Au rugby il y a ceux qui jouent du piano et ceux qui les déménagent." Pour les générations qui lui ont succédé, il faisait figure de précurseur de Richard Astre, le demi de mêlée du grand Béziers des années 70 à qui il ressemblait physiquement. Celui-ci confie : "C’est lui qui m’a fait venir à Béziers car il connaissait mon père qui avait lui aussi joué au Toulouse Cheminots Marengo Sports. Je savais qui il était, mais à l’époque les images circulaient moins qu’aujourd’hui. J’avais juste quelques idées de ses postures et de sa famesue élégance. Mais à Béziers il ne m’a pas entraîné car à cause d’une histoire de licence rouge, je n’avais pas le droit de joeur en première. Je me suis contenté de l’équipe juniors avec qui nous avons été champions de France sous l’autorité de Raoul Barrière."

Avec les Bleus, Pierre Danos compta 18 sélections entre 1954 et 1960. Nous l’avons vu, il fut de l’équipée héroïque en Afrique du Sud sous le commandement de Serge Saulnier et de Lucien Mias. Son port princier fit son effet auprès des foules qui s’entassaient dans les tribunes. Les gens n’avaient pas la télé, gageons qu’il fut cité parmi les meilleurs ambassasdeurs du rugby tricolore, moins puissant que celui des Springboks, mais peut-être un peu plus inspiré.

Chez les Bleus, il fut souvent en concurrence avec Pierre Lacroix, l’Agenais, son exact contraire en termes stylistique. À leur époque, ces deux noms représentaient quelque-chose, les gens n’étaient pas gavés par la télévision. Alors, on se pressait le long des mains courantes pour les apercevoir. La drue chevelure de jais de Pierrot Danos éclatait à tous les regards, la précision de ses gestes prolongeait la magie des ces instants précieux, souvent glanés à Sauclières et à jamais évanouis.

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