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200 ans d'histoire (10/52) : en 1905 naissait le mythe des All Blacks

Par Jérôme Prevot
  • Dave Gallagher, capitaine de cette équipe mythique.
    Dave Gallagher, capitaine de cette équipe mythique. Midi Olympique - Fabien Aigrain Védille
Publié le Mis à jour
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Le mythe des All Blacks est né en 1905 lors de la première tournée des Néo-Zélandais enEurope. En gagnant trente-quatre matchs sur trente-cinq, ils se sont tout de suite hissés au sommet du rugby mondial, sidérant tout le monde par leur somme d’innovations.

Le plus étonnant, c’est de voir comment on les appelait sur le moment. Les Maorilanders, les New Zealanders, les Colonials. Le nom qui les rendrait célèbres, « All Blacks », arriva en cours de tournée. En 1905, pour la première fois, l’équipe de Nouvelle-Zélande vint en tournée en Europe, événement d’une portée considérable au regard de l’histoire. Il faut d’abord comprendre ce qu’étaient les tournées de l’époque. Un mois et une semaine de voyage en bateau (30 juillet - 8 septembre) pour trente-cinq matchs sur un laps de temps de cinq mois (16 septembre-8 février). Un programme démentiel qui ne mobilisa que vingt-sept joueurs et seulement deux dirigeants, un manager George Dixon et un entraîneur de 36 ans, Jimmy Duncan. Mais la vedette, c’était le capitaine Dave Gallagher (en image ci-dessous), avant-aile d’Auckland (1,83m, 84 kg), ancien combattant de la guerre des Boers et futur soldat de 14-18.

Les Néo-Zélandais furent absents de chez eux pendant sept mois. Quelle expérience pour des joueurs amateurs ! Cette odyssée nous dit d’abord quelque chose de la popularité qu’avait déjà atteint le rugby. Même sans avion, sans télévision et sans internet, les gens avaient envie de voir des matchs ou d’en lire les comptes rendus enfiévrés. Et les fédérations faisaient tout ce qu’elles pouvaient pour les satisfaire, en essayant par la même occasion de remplir leurs caisses par les recettes les plus gonflées possibles. Les Néo-Zélandais avaient forcément négocié pour toucher une partie du pactole car eux n’avaient pas les matchs annuels du Tournoi pour se financer.

Une seule défaite en cinq mois

Sur un plan strictement sportif, la tournée fit office de première Coupe du monde. Il était difficile d’établir une hiérarchie à cette époque où les confrontations étaient rares. Ces Kiwis, attendus comme les messies, mirent tout le monde d’accord : trente-quatre victoires en trente-cinq matchs, en marquant 976 points contre 59 encaissés. Un score moyen de 28 à 2. En tests, ils s’imposaient face aux Irlandais, aux Anglais et aux Écossais. Seuls les Gallois leur firent mordre la poussière et encore, sur un coup de dés (lire ci-dessous). Comment expliquer une telle supériorité ?

Plusieurs facteurs se combinent : d’abord, on se rend compte que les Néo-Zélandais jouaient des mi-temps de quarante-cinq minutes chez eux, contre trente-cinq minutes en Grande-Bretagne. On constate aussi qu’ils passaient un certain temps à travailler uniquement leur condition physique. Cela creva les yeux, ils couraient à un rythme soutenu jusqu’à la fin des matchs. De plus, leurs avants avaient tous une position spécifique en mêlée, alors que leurs adversaires se positionnaient dans leur ordre d’arrivée à l’endroit donné. En touche, les Néo-Zélandais répétaient à l’entraînement leur cohésion lanceur-sauteur. Quelle modernité ! Ils apportaient aussi une série d’innovations tactiques (lire l’encadré). Bref, les Néo-Zélandais étaient dominants dans à peu près tous les secteurs. Cette tournée de 1905-1906 installa leur domination sur le reste de la planète.

Les « Originals »

Reste le nom. Le terme « All Blacks » est apparu en cours de tournée, dans les colonnes de la presse anglaise, dans l’Express and Echo in Devon dès après le premier match survolé contre le Devon (55-4), à Exeter. Il faisait référence bien sûr à la tenue des joueurs. Puis le 11 octobre, le Daily Mail reprenait le terme pour présenter le match face à West Hartlepool. Le 1er novembre, toujours dans le Daily Mail, après la victoire face au Surrey (à Richmond), on lisait : « Cette équipe des All Blacks dont tout le monde parle. »

Curieusement, en Nouvelle-Zélande, on mit un peu plus de temps à utiliser le terme. Le 15 octobre 1905, le Premier ministre Richard Seddon envoyait des câbles de félicitations à la « Colony’s football team », puis le 4 décembre aux « New Zealand Footballers ». Mais le 21 du même mois, le NZ Herald évoquait une triomphale marche des « Blacks ». Le 6 décembre, il mettait en page une rubrique « All Black’Gossip » mais dans le texte, on parlait encore des « New Zealand Footballers ». Le 5 mars1906, jour du retour de l’équipe, il titrait encore sur les « NZ footballers » mais le lendemain, il franchit le pas avec un titre sur deux colonnes : « Retour des All Blacks. » Dans les jours qui suivirent, diverses affiches ou objets publicitaires dans tous les magasins du pays reprenaient la même formule. Le mot était lancé mais pour les différencier de leurs successeurs, les Néo-Zélandais parlaient des hommes de Gallagher comme des « Originals ».

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